Pour faire disparaître le chômage et la misère, ne comptons que sur nous, les travailleurs, préparons nos luttes et un autre avenir
Tous ceux que le système économique actuel prive dun travail et dun revenu décent nont pas été dupes du caractère dérisoire des mesures avancées par le gouvernement contre lexclusion. Des milliers dentre eux lont fait savoir dans la rue samedi dernier. Des politiciens et des responsables syndicaux en cheville avec le gouvernement sont venus faire de la figuration dans ces manifestations des chômeurs mais ils nont pas pu donner le change et nous faire croire que le gouvernement est de notre côté. Indépendamment des manuvres des uns ou des autres, les chômeurs poursuivent leur lutte. Ils réclament leur dû face à Jospin et Aubry, et en particulier le relèvement des minima sociaux de 1500 francs.
Jospin, déguisé en jardinier prudent et prévoyant, nous a servi jeudi dernier un boniment sur les fruits de la croissance qui ne seraient pas encore mûrs et quil ne pourrait pas encore distribuer. En attendant les patrons, les financiers et les gros actionnaires ramassent toujours plus de profits bien juteux. Ils encaissent toujours plus de milliards qui sont le résultat de lexploitation de plus en plus forcenée du monde du travail tandis quune fraction de plus en plus importante de la population senfonce dans la misère.
Le jardinier Jospin est tout simplement un larbin de ces gens fortunés, de même que tous les ministres et dirigeants de la gauche plurielle qui ont le culot de se dire encore socialistes ou communistes.
En quoi Robert Hue se distingue-t-il de Jospin en lui faisant laccolade au cours dun meeting électoral et en répétant sur toutes les ondes que dans lensemble la politique de Jospin est bonne ? Il a voulu marquer sa petite différence en proposant des mesures fiscales modestes et qui resteront sans lendemain et il a réclamé le report de tous les plans de licenciements. La ministre socialiste Aubry lui a répondu aussitôt avec une brutalité digne du patron du CNPF : Des entreprises ont aujourdhui besoin de licencier parce quelles perdent des marchés, parce quelles ont besoin de se moderniser . Cette dame patronnesse qui prétend lutter contre lexclusion épouse totalement le point de vue du grand patronat. Elle approuve par avance les dizaines de milliers de licenciements qui vont augmenter le nombre des chômeurs, accroître la misère et le désarroi de nombreuses familles.
Les élections régionales de dimanche prochain seront une occasion pour nous de condamner sans ambiguïté le grand patronat, les financiers et les riches qui sont les seuls responsables du chômage et de toute la dégradation sociale que cela entraîne.
Ces élections nous permettront de désavouer cette gauche plurielle qui mène la même politique que celle de Juppé et de condamner cette droite de cohabitation que nous avons vue à luvre contre nous pendant des années. Nous exprimerons notre rejet du Front national dirigé par le milliardaire Le Pen, cette extrême droite qui veut diviser les rangs des travailleurs et rêve de détruire tous leurs moyens de défense face aux patrons et aux riches.
Nous dirons tout cela en votant pour des listes de travailleurs, qui participent aux luttes du monde du travail et qui veulent, avec tous les salariés, les chômeurs et les jeunes qui le souhaitent, préparer un autre avenir pour toute la société, un avenir sans exploitation et sans chômage.
Cest le cas des listes soutenues par Voix des Travailleurs en Charente, Gironde, dans les Landes et dans les Pyrénées-Atlantiques. Cest le cas de la liste commune en Seine-Maritime soutenue par LAssociation pour le Rassemblement des Travailleurs, la Gauche Révolutionnaire/JCR, la Ligue Communiste Révolutionnaire de Rouen et Voix des Travailleurs.
Ailleurs Voix des Travailleurs appelle à voter pour les listes Lutte Ouvrière, malgré le renoncement de la direction de LO à donner un prolongement concret à lappel de 1995 dArlette Laguiller à construire un parti des travailleurs. Au-delà de léchéance électorale de dimanche, il sera nécessaire que nombre de ceux qui auront voté pour les listes soutenues par Voix des Travailleurs ou pour les listes Lutte Ouvrière se regroupent et jettent les bases dune force politique vraiment socialiste et communiste, dune véritable opposition des travailleurs, des chômeurs, des exclus et des jeunes.
Au Kosovo le début dune nouvelle guerre dont les grandes puissances sont les principales responsables
Des affrontements sanglants ont repris dans la région la plus pauvre de lex-Yougoslavie, le Kosovo, dont la population est à 90 % albanaise. Le chef de lEtat serbe, Milosevic, a pris le risque de déclencher une nouvelle guerre en envoyant les forces de lordre attaquer au canon et bombarder par hélicoptères des dizaines de villages. En une semaine la répression a fait plus de cent morts et 3500 personnes ont quitté le Kosovo pour se réfugier dans la région voisine du Monténégro.
Milosevic a pris pour prétexte quelques actions armées très limitées dun mouvement nationaliste albanais, lUCK. Il sest inquiété du projet des nationalistes modérés dorganiser des élections pour la présidence et les députés du Kosovo afin dobtenir une reconnaissance internationale. Mais fondamentalement les tueries et toutes les exactions de la police serbe contre la population albanaise ont avant tout pour but de consolider le pouvoir de Milosevic. Il a toujours des concurrents ultra-nationalistes en Serbie prompts à laccuser de mollesse à légard des Albanais du Kosovo. Mais il a surtout besoin de museler les classes populaires serbes, de détourner leur mécontentement contre la population albanaise. Il a besoin de terroriser la population albanaise pour lempêcher de se mobiliser et de sorganiser pour arracher son indépendance. Car au bout du compte Milosevic préfère que les travailleurs du Kosovo se rangent derrière les petits bourgeois nationalistes albanais plutôt quils ne prennent conscience des intérêts de classe quils ont en commun avec les travailleurs serbes.
La démagogie nationaliste comme arme de division des travailleurs
Cest précisément au Kosovo dans les années 80 que Milosevic a commencé à utiliser la démagogie nationaliste pour briser les rangs de la classe ouvrière yougoslave. En 1981 il répondait à la mobilisation des étudiants puis à celle des chômeurs et des ouvriers du Kosovo par une répression qui a fait des dizaines de morts et des centaines de blessés. Les travailleurs du Kosovo avaient été suivis par ceux des autres régions du pays qui menèrent des grèves et des manifestations importantes. Ils réagissaient tous, quelle que soit leur origine ethnique, contre les effets désastreux de la crise économique frappant de plein fouet la Yougoslavie. En 1989 linflation était de 2500 % et le taux de chômage avait brutalement grimpé à 17 %. La pression de la crise du système capitaliste sur un pays pauvre dont lEtat était surendetté a provoqué lexplosion de la Yougoslavie. Car les classes dirigeantes yougoslaves ont répondu à cette pression en divisant par le poison du nationalisme la force sociale qui les menaçait directement dans leurs privilèges, la classe ouvrière. Dans ce sens Milosevic et tous les dirigeants nationalistes croates, slovènes, bosniaques etc, ont bien relayé les intérêts des grandes puissances capitalistes dans cette région. A tout prendre elles préféraient de beaucoup que la contestation sociale et surtout ouvrière soit dévoyée et que tout dégénère en une série de guerres ethniques effroyables plutôt quen une révolution ouvrière yougoslave susceptible dentraîner dans son sillage dautres classes ouvrières des pays de lEst.
La crainte des impérialistes dune explosion incontrôlée
Aujourdhui les dirigeants des grandes puissances rejouent la comédie de lindignation à légard de Milosevic qui ne respecte pas les droits de lHomme au Kosovo. Cest évidemment le cadet de leur souci. Loppression de lEtat serbe contre la population albanaise les indiffère tellement que la question du Kosovo navait même pas été effleurée dans les accords de Dayton de 1995 ficelés par les Etats-Unis pour régler la guerre en Bosnie sur le dos des peuples de lex-Yougoslavie.
Ils sont uniquement préoccupés que la situation explosive du Kosovo engendrée par la misère et loppression contre les Albanais nentraîne pas un conflit difficile à contrôler et sétendant à la Macédoine et au Monténégro. Tant que les événements ne prennent pas cette tournure, ils se satisfont parfaitement que lEtat de Milosevic continue ses massacres et ses tortures au Kosovo.
Lutter contre lexclusion, cest lutter contre le chômage, produit de la folle logique du capitalisme
La présentation du projet de loi contre lexclusion a remis sur le devant de la scène un certain nombre de chiffres : en 15 ans, le nombre de pauvres a augmenté de 70 %, 6 millions de personnes survivent avec des minima sociaux, 10 % des ménages sont en dessous du seuil de pauvreté et 40 % des ménages de chômeurs sont en dessous de ce seuil, plus dun million de personnes touchent le RMI, plus dun million des chômeurs officiellement déclarés -37 % - sont sans travail depuis plus dun an, 200 000 personnes sont sans abri, deux millions sont mal logées.
Dans le projet de loi quelle a présenté, Martine Aubry prétend en trois ans vaincre lexclusion. Son plan prévoit daffecter 51 milliards à ces mesures : 38 milliards à la charge de lEtat dont 22,4 milliards de dépenses nouvelles sur trois ans, soit sept milliards de francs de dépenses nouvelles par an. A peine plus que les 6,1 milliards de francs du dividende exceptionnel que la Compagnie Générale des Eaux va verser aux actionnaires dHavas à loccasion de la fusion des deux sociétés.
Le plan de Martine Aubry est à limage de ces chiffres : dérisoire. Pour développer lemploi, elle propose plus de CES, plus demplois jeunes pour les jeunes des quartiers pauvres, plus de contrats de qualifs et dorientation, en un mot plus de tous ces stages et de ces formations bidons qui depuis vingt ans permettent aux patrons dempocher des subventions sans créer demploi et de bénéficier dune main duvre bon marché. Seule mesure nouvelle , le TRACE, trajet daccès à lemploi qui est sur 18 mois un pot pourri de stage de qualification et demploi précaire pour lequel dailleurs lancien ministre de Juppé, Jacques Barrot réclame des droits dauteurs, tant cette mesure ressemble à ce quil avait lui même proposé !
Ce plan de lutte contre lexclusion a été aussi loccasion pour les gouvernants détaler un solide mépris social. Le désormais fameux nous voulons une société de travail, pas dassistance de Jospin a été décliné sur tous les tons : comment inciter les exclus à retrouver du travail car il ne faudrait quand même pas quils se complaisent dans les délices du RMI et de lASS revalorisée de 175 F par mois ! Aussi na-t-il pas été question daugmenter le RMI et de savants calculs ont été faits pour déterminer dans quelle mesure les minima sociaux pourraient être cumulés avec le salaire dun chômeur qui retrouverait un emploi pour que le tout ne dépasse pas le SMIC !
Dans la même semaine, Martine Aubry a révélé le fond de sa pensée et la véritable nature de sa politique en déclarant que des entreprises ont besoin de licencier lorsquelles perdent des parts de marché. De la même manière, Pierret, le secrétaire dEtat à lIndustrie a justifié les 2700 licenciements chez Renault au nom de la compétitivité. Ces déclarations montrent quel crédit on peut accorder à ce gouvernement lorsquil prétend lutter contre lexclusion.
Car il nest pas possible de combattre lexclusion sans combattre le chômage, cest à dire sans lutter contre la logique de la concurrence capitaliste. Le chômage et la misère sont inscrits dans la logique de cette économie où les licenciements et lexploitation des travailleurs nourrissent les profits records des entreprises qui entretiennent cette euphorie boursière qui voit chaque semaine la Bourse battre des records. Combattre le chômage, cest imposer aux patrons comme aux financiers de tenir compte des intérêts de la majorité de la population, cest-à-dire remettre en cause leur droit à diriger la marche de léconomie.
Cela, le gouvernement actuel en est organiquement incapable : il est là pour défendre la politique des patrons qui lui dictent leur volonté comme ils lont dictée aux gouvernements précédents.
Seul un gouvernement des travailleurs et de leurs organisations, un gouvernement qui sappuierait sur la mobilisation du monde du travail, sur son organisation, qui serait son instrument pour mettre un coup darrêt à la dégradation des conditions dexistence de la majorité de la population, pourrait prendre les mesures simples et radicales qui simposent et garantir le droit des travailleurs de contrôler la marche des entreprises publiques et privées, des banques comme de lEtat lui-même et des collectivités locales.
De cela, il ne peut être question pour le gouvernement actuel. On ne peut infléchir sa politique contrairement à ce que prétend Robert Hue pour justifier la participation du Parti Communiste à la gestion des affaires de la bourgeoisie. Dailleurs, il est évident que ni les ministres, ni les députés nont la moindre influence. Ils nont dautre choix que de soutenir la politique de Jospin. Il nest pas possible de faire pression ou dinfléchir la politique de ce gouvernement, il faudra que nous le fassions plier, comme on fait plier un adversaire ou lallié dun adversaire.
Pour être libres de défendre leurs propres intérêts, les travailleurs doivent voir en toute lucidité derrière les discours faits pour les duper, les mauvais coups. Une autre politique est nécessaire, elle ne peut venir que de nos luttes et de notre organisation.