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Entre ces deux politiques, selon les départements, les militants de la LCR se sont associés ou ont constitué une gamme de listes dont les intitulés reflètent bien les orientations à géométrie politique variable. Chercher à regrouper des forces politiques pour présenter des candidatures unitaires aux élections, rassembler des militants dorigines diverses pour défendre en commun des idées, un programme, na rien de choquant en soi. Tout le problème est de savoir avec qui, sur quelles bases et pour défendre quelle politique auprès des travailleurs cette unité est recherchée ou réalisée.
La tentative, certes repoussée par une majorité de militants de la LCR, mais affirmée par son porte-parole le plus connu, Alain Krivine, dêtre présent sur la liste de la gauche gouvernementale en Seine Saint Denis montre jusquoù peuvent aller, ou plutôt vers qui peuvent dériver les solidarités à Gauche . La participation effective de la LCR, en bouche-trous même pas admise dans les meetings officiels, sur la liste des Verts dans le Nord na elle non plus rien à voir avec une quelconque rupture ou force unitaire et radicale .
Le kaléidoscope des listes soutenues par la LCR traduit une attitude politique fausse. La majorité de la LCR na pas vis à vis du gouvernement de la gauche plurielle une attitude claire. Elle est critique certes. Mais qui ne lest pas ? Même Robert Hue et D. Voynet se hasardent parfois à émettre des critiques. Mais la direction de la LCR na pas voulu apparaître en opposition au gouvernement, elle na pas cherché à sadresser aux travailleurs pour exprimer cette opposition qui grandit dans leurs rangs. Les trois enjeux du scrutin définis par C. Piquet dans Rouge du 5 mars sont significatifs. Le premier est que la droite soit boutée hors dun grand nombre de régions , le second est de ne pas donner un quitus à léquipe aujourdhui aux affaires et le troisième est dexprimer lexigence dune véritable politique de gauche .
Dans les discussions pour constituer des listes aux élections régionales, la direction de la LCR a surtout eu le souci de sadresser à la Gauche , de privilégier déventuels accords avec certaines de ses composantes : Verts, Mouvement des Citoyens, courants critiques du PCF ou avec des groupes se situant aux marges de la gauche plurielle. Dans la campagne de bien des listes auxquelles la LCR participait, comme dans les axes développés dans Rouge , ce qui ressortait avant tout était la nécessité de battre la droite , de ne pas donner un chèque en blanc au gouvernement , et de changer la donne à gauche . Toutes ces formules visaient à apparaître comme un courant critique de la gauche, insistaient sur ses préoccupations électorales et faisaient limpasse sur les responsabilités du gouvernement dans sa politique anti-ouvrière.
Les résultats de lextrême-gauche vont à lencontre de cette politique et de ces préoccupations.
Les travailleurs qui ont voté pour les listes soutenues par Lutte Ouvrière, la LCR ou, à une plus modeste échelle Voix des Travailleurs, ont voté pour des listes quils percevaient bien comme des listes dextrême-gauche. Ils savaient quils votaient pour des militants révolutionnaires.
Ces résultats sont le reflet dune évolution dans la conscience dune partie importante de la classe ouvrière. Evolution qui va dans le sens dune désaffection vis à vis des partis de la gauche gouvernementale, dune radicalisation. Les travailleurs membres ou électeurs habituels du PCF ou du PS qui ont voté pour ces listes ne voulaient pas voter à Gauche mais à lextrême-gauche .
Ces faits devraient inciter la majorité des camarades de la LCR à reconsidérer les orientations qui sont les leurs depuis plusieurs années. La stratégie qui consiste à essayer doccuper un terrain entre la gauche plurielle et lextrême-gauche révolutionnaire est condamnée. Car ce terrain nen nest pas un. Cest un no mans land , doù lon ne peut sortir quen rejoignant clairement lun ou lautre des deux camps. Sil sagit dattirer, de convaincre les travailleurs, les militants qui gardent encore une confiance, de plus en plus mitigée, dans le gouvernement, ce nest pas en faisant preuve de complaisance vis à vis des partis qui le composent quon peut y parvenir. Au contraire. Cest en affirmant clairement notre identité de militants communistes révolutionnaires, en regroupant toutes les forces militantes sur ces bases là quon pourra réellement construire une véritable alternative , un parti des travailleurs.
Citation :
Lénine,
lEtat et la révolution,
1917
Tribune
libre : Tendance Révolution ! de la
LCR
Les résultats des élections
régionales sont riches denseignement.
A droite, la crise du RPR et de lUDF
sous la pression du Front National ne cesse de sapprofondir et peut
connaître un nouveau seuil lors de lélection des
présidents des Conseils Régionaux. Ce qui se passe localement
laisse entrevoir ce qui peut se passer au niveau national dans les années
à venir : le choix dune partie des composantes de lUDF
et du RPR dune alliance avec le Front National, dautant plus
si ce dernier vire Le Pen et se donne un aspect plus
clean et convenable.
La gauche plurielle qui nest au
gouvernement que depuis 9 mois, nest certes pas désavouée
massivement mais subit une érosion notable de plus de 5 %.
Ajouté à cela, le très fort taux dabstention,
il se confirme quil ny a pas pour le moins dadhésion
massive et franche à sa politique. Cétait déjà
vrai lors des dernières élections législatives. Cest
encore plus vrai depuis la fermeture de Vilvorde, la privatisation des
Télécoms et dAir France, la non-abrogation des lois Pasqua,
le refus de régulariser tous les sans-papiers et après le mouvement
des chômeurs qui a clairement montré que le gouvernement
nentendait pas céder à la rue et quil voulait
poursuivre la politique économique de ses prédécesseurs
sur toutes les questions essentielles.
Mais le fait marquant de ces élections
régionales, ce sont les scores de lextrême-gauche. 22
élus (20 pour Lutte Ouvrière, 2 pour la LCR) et surtout le
fait que dans nombre de villes, les scores cumulés de
lextrême-gauche se situent largement au-dessus de 5 %,
approchant et même dépassant parfois les
10 %.
Il ne sagit pas simplement dun
vote protestataire, ou de mauvaise humeur à légard de
la gauche gouvernementale même si cet aspect existe. Cest aussi
la traduction politique du mouvement des sans papiers, du mouvement des
chômeurs, de toutes les mobilisations qui se sont développées
ces dernières années le plus souvent indépendamment
et parfois contre les partis traditionnels. Certes, il ne faut pas exagérer
les résultats et les phénomènes électoraux qui
sont souvent éphémères. On observe pourtant une certaine
constante des résultats de lextrême-gauche depuis les
5,3 % dArlette Laguiller à lélection
présidentielle et il est incontestable que les organisations
révolutionnaires ont renforcé leur crédibilité.
Cest dailleurs la première fois que
lextrême-gauche obtient de tels résultats avec le gouvernement
de gauche. Mais elle a aussi, à commencer par la Ligue et Lutte
Ouvrière, des responsabilités nouvelles. Le sentiment qui
sest exprimé massivement lundi sur les lieux de travail chez
toutes celles et tous ceux qui regardent du côté de
lextrême-gauche était de dire : Bravo
pour vos résultats, mais maintenant arrêtez vos bêtises
et vos querelles de chapelle et débrouillez-vous pour faire des choses
ensemble. Et il est vital de répondre à cette
aspiration. Beaucoup ne pardonneront ni à la Ligue ni à LO
de rester larme au pied et de faire comme si rien ne sétait
passé dimanche dernier.
Pour la Ligue, cela nécessite
de rompre avec lorientation mise en uvre ces dernières
années, qui a été confirmée lors de son dernier
congrès national. Elle doit cesser de vouloir être laiguillon
de la gauche, davoir comme seule ambition de prendre sa place au sein
de la gauche pour en faire bouger les clivages. Si les scores de LO sont
supérieurs à ceux de la Ligue malgré son absence ou
son peu de présence dans les mouvements sociaux, ce nest pas
uniquement parce quelle sest présentée
systématiquement dans toutes les échéances électorales
depuis 20 ans, cest aussi parce quelle a adopté un profil
clair vis-à-vis de la politique du gouvernement et des partis de la
gauche plurielle.
La LCR a brouillé son image en
passant des mois et des mois à interpeller le gouvernement pour
quil mène une politique vraiment à gauche, à proposer
à toute la gauche la possibilité dactions communes ou
encore en sinscrivant dans des cadres dalliance avec des forces
de la gauche plurielle (liste commune avec les Verts dans le Nord et dans
les Bouches-du- Rhône, avec les Verts et le Mouvement des Citoyens
dans le Lot-et-Garonne).
Il est temps de changer dorientation.
La Ligue avec linsertion de ses militants dans les mouvements sociaux,
dans les luttes, dans les syndicats et les phénomènes de
recomposition syndicale, est la plus à même de prendre des
initiatives qui correspondent aux aspirations de celles et ceux qui ont
voté pour lextrême-gauche et battre en brèche le
scepticisme paradoxal de Lutte Ouvrière sur les potentialités
de la situation politique et sociale. Nous devons proposer à Lutte
Ouvrière de débattre, dorganiser unitairement des initiatives
politiques (meetings, fêtes, etc.) à tous les niveaux,
denvisager une liste commune lors des élections européennes
lannée prochaine.
Les luttes qui ne manqueront pas de se
développer dans les mois à venir tout comme les
échéances électorales à venir peuvent être
autant doccasions pour lextrême-gauche de renforcer son
influence politique et davancer dans la construction dun nouveau
parti des travailleurs.
Tribune
libre : Gauche
Révolutionnaire
Le taux dabstention de 42 %
- du jamais vu dans ce type de scrutin -, montre la désaffection
croissante délecteurs qui ne se sentent plus représentés
par ces partis de droite et de gauche qui se succèdent au pouvoir
et se ressemblent. Dailleurs, il ne sagit pas dun fait
isolé. Depuis les années 80, le taux des abstentions augmente
délection en élection.
Mais le fait marquant de ces élections
est que presque un million délecteurs ont porté leurs
suffrages sur les listes dextrême gauche, avant tout celles de
Lutte Ouvrière. Cest la preuve que les 5 % dArlette
Laguiller aux élections présidentielles navaient rien
daccidentel, ou de passager. Le résultat de 1995 comme celui
de mars 1998 témoignent de lévolution dune partie
de la classe ouvrière et de la jeunesse. Aujourdhui, le gouvernement
Jospin sert de plus en plus ouvertement les besoins du grand capital
français et international. De lapplication du plan Juppé
aux privatisations et à la fidélité à lEurope
des patrons, incarnée par les traités de Maastricht et
dAmsterdam, Jospin poursuit la même politique que son
prédécesseur. Une politique qui tourne le dos aux
intérêts des salariés, des chômeurs, des jeunes,
des immigrés. Parmi les salariés la méfiance grandit
par rapport à la loi sur les 35 heures, vue de plus en plus comme
une attaque sournoise contre les salaires et les conditions du travail. Le
mouvement des chômeurs sest vu proposer quelques miettes et surtout
les matraques des CRS. Ces mêmes CRS ont été envoyés
par le gouvernement de la gauche plurielle contre ceux qui restent,
aujourdhui comme hier, des sans-papiers.
Une frange de travailleurs et de jeunes
a déjà mis une croix sur le PS et le PC et cherche autre chose.
Dautres ont sans doute voté pour lextrême-gauche
pour lancer un avertissement à leurs partis, dans le cas des
électeurs communistes pour refuser les listes communes avec le PS
qui concrétisent à leurs yeux les reniements de la direction
Hue. Mais dune manière ou dune autre, des centaines de
milliers de travailleurs regardent vers
lextrême-gauche.
Cette extrême-gauche est présente
dans les luttes, comme dans les élections. Elle nest pas encore
crédible. Dun côté ses militants sont présents
dans les luttes - dans les entreprises, dans le mouvement des chômeurs
ou pour soutenir les sans-papiers. De lautre lextrême-gauche
peut représenter sur le terrain électoral une alternative à
labstention ou au vote critique pour le PS
et le PC. Mais elle napparaît pas encore comme une véritable
alternative politique.
Aujourdhui toute
lextrême-gauche, et en premier lieu Lutte Ouvrière, se
trouve devant un défi. Comment répondre à lattente
des travailleurs et des jeunes qui regardent vers nous ? La réponse
se trouve dabord dans notre capacité à agir ensemble,
non seulement dans les élections, mais surtout dans les luttes, dans
les entreprises, dans le mouvement syndical, dans le mouvement des
chômeurs, dans le mouvement anti-raciste et à constituer un
pôle dattraction pour tous ceux qui veulent se battre. Ensuite
dans notre capacité à défendre une politique qui part
des besoins des exploités pour aller vers la rupture avec le capitalisme.
Ainsi pourrons-nous créer les conditions pour avancer vers le nouveau
parti dont la classe ouvrière a besoin. Il est de notre
responsabilité à tous dagir dans ce
sens.