ELF : Les grévistes obligent la direction à reculer
A lissue de 104 jours de grève au Centre scientifique et technique de Pau et au siège social de Paris, les grévistes dELF ont fait reculer leur direction, qui a retiré purement et simplement le plan de 1320 suppressions de postes, que le PDG Jaffré voulait imposer au personnel. Cette restructuration du secteur Exploration-Production, qui fait travailler 2 850 salariés sur les deux sites de Pau et Paris, visait à supprimer plus dun millier de postes, pour " créer de la valeur pour lactionnaire dELF ". ELF a dégagé 3,5 milliards net de profits en 98, mais les actionnaires nen ont jamais assez !
La direction, qui na pu venir à bout de la détermination des grévistes, a dû remettre son projet baptisé " Performance " dans sa poche, et sest engagée à labandon des poursuites judiciaires contre les grévistes et au paiement intégral des jours de grève. Jaffré, pour ne pas perdre la face, a prétexté lOPE lancée contre ELF par TotalFina, et déclaré que le plan de restructuration prévu nétait plus " opportun " dans le cadre de la fusion à terme des deux groupes, mais il sagit bel et bien dun recul et les grévistes lentendent bien ainsi, conscients que leur détermination et le soutien apporté à leur grève par toute la population de Pau et les salariés des autres entreprises de la région a permis de remporter le bras de fer contre la direction. Ils ont voté la reprise aux cris de " on a gagné contre Jaffré " et cest par une grande fête quils ont fêté leur victoire.
Le 21 octobre 1998, le groupe Elf décidait d'engager une étude sur le secteur Elf Exploration-Production à Pau, et les salariés avaient compris quil nen sortirait rien de bon pour eux. Au centre Jean-Feger de Pau, le " cerveau de lentreprise " qui regroupe les systèmes informatiques, les salariés se lancèrent dans une série d'actions, discussions, débrayages, campagnes de pétitions, auxquelles ils ont réussi à associer en permanence dautres salariés et la population, jusquà ce quils apprennent par la presse le 18 mars dernier que la direction décidait de supprimer 1300 emplois dans les sites de Pau et de la Défense à Paris.
Le 12 avril, les 2200 employés, chercheurs, ingénieurs et techniciens du centre Jean-Feger se lancèrent dans la grève, suivis quelques jours plus tard par leurs camarades du siège à Paris, et depuis, ils occupaient jour et nuit le centre, bloquant les serveurs informatiques et en conséquence toute lactivité informatique du secteur, en débrayant à tour de rôle 2 heures par jour. Jaffré engagea alors le bras de fer avec les grévistes en déclarant quELF pourrait tenir sans problème jusquà la mi-juillet, mais que la grève sessoufflerait avant. Il a dû déchanter. La détermination des grévistes na été entamée par aucune de ses manuvres, pressions vis-à-vis des grévistes à leur domicile pour les pousser à reprendre le travail, poursuites judiciaires... Alors que, dernière provocation, elle entamait vendredi dernier un recours auprès du juge des référés pour lancer la procédure dexécution du plan social, la direction était contrainte de retirer sans condition son projet le lendemain.
Les grévistes, qui, daprès lun deux, ont joué " jusqu'au bout la carte de la démocratie et de l'unité " ont su mettre à profit les moyens modernes de linformatique au service de la grève, créer les réseaux de solidarité, et sattirer le soutien et la sympathie de la population et des travailleurs de la région qui ont été 6 000, puis 13 000 en avril à manifester dans les rues de Pau contre une politique qui sert les actionnaires et la finance en semant partout le chômage et la misère.
Après cette grève, la plus longue depuis 40 ans, les grévistes sont conscients davoir gagné une bataille mais pas la guerre puisque le patron dELF, Jaffré, était cette semaine aux Etats-Unis pour tenter de convaincre les gestionnaires des fonds de pension, principaux actionnaires du groupe, du bien fondé de sa contre-OPE contre Total, et de la fusion des deux groupes qui doit saccompagner de 6 000 licenciements, dont 2 000 prévus en France.
Mais les grévistes ont fait la démonstration que pour sopposer aux mauvais coups, la seule voie est celle de la lutte collective et de la grève.
C.A.
Satelec-Pierre Rolland (Mérignac-33) : Après les " mesures économiques ", les licenciements
Le jeudi 22 juillet, la Direction a convoqué le Comité d'entreprise afin d'annoncer pour Satelec, entreprise de matériel dentaire, un plan de suppression d'emplois, pour " motif économique ". Trois secteurs d'activité sont touchés : l'activité " laser-distribution ", l'activité " tchizz " ( logiciels de gestion de cabinets dentaires) et l'activité " micro-moteurs ", tous deux qualifiés de " foyers de pertes importants ". Aucune mesure de reclassement n'est prévue pour ces deux secteurs. Pour l'activité " laser distribution ", le licenciement porte sur celui des deux salariés ne " pratiquant pas l'anglais ". Sans avoir été nommés, ni avoir reçu de lettre de licenciement, les deux salariés du secteur savent déjà qui reste et qui part.
Après avoir fait le chantage aux licenciements, le patron avait, en juin, imposé des mesures " économiques " se traduisant notamment par la perte d'une semaine de congés (VDT n° 96), le patron supprime six postes, " condition sine qua non de la sauvegarde des emplois ".
Nous avons tous le sentiment de nous être fait posséder et que tout ceci a bien été prémédité par la Direction afin d'obtenir et les mesures " économiques " et les licenciements.
Aussi, la colère et le ras le bol grandissent rapidement. D'ailleurs, le patron dans une note intérieure de 8 pages que nous avons reçue le vendredi 23, mais datée du 16 - donc antérieure à l'annonce des licenciements -, se justifie et menace. Il tente de s'expliquer sur une réunion qu'avait organisée le CE après l'annonce des premières attaques, afin de répondre à nos " questions et à nos inquiétudes ". Le patron résume ainsi les réflexions qui y avaient été exprimées : " principe de rapport de force, manier le bâton, salariés qui vivent mal psychologiquement; ambiance malsaine ". D'après le patron, ces réflexions - qui décrivent parfaitement l'ambiance actuelle -, " n'engagent que leurs auteurs, c'est-à-dire une infime minorité ".
La prose patronale atteint des sommets de cynisme. Si nous n'acceptons pas les licenciements, selon le patron, " c'est que le petit intérêt individuel et à court terme prévaut sur la réussite de l'entreprise et son succès, que le côté franchouillard et assisté a pénétré dans une entreprise qui se veut mondiale et performante ".
Il conclut, menaçant, " qu'il ne tolérera plus aucun trouble comme il y en a eu par le passé et qui ressemblent à des gesticulations dans la cour des petits ". Et il nous demande " de faire corps en ordre serré derrière sa direction et son encadrement, tout autre attitude serait grave et suicidaire ".
Pour nous, il est clair que les attaques du patron ne sont pas terminées et qu'après le plan de suppression de postes à Satelec, c'est le secteur Pierre Rolland qui sera touché.
D'ailleurs, si le patron fait preuve d'une telle virulence à notre égard, c'est que beaucoup d'entre nous n'hésitent pas à exprimer leur ras le bol. Il tente par là même d'étouffer toute velléité de contestation afin de pouvoir continuer à faire ses mauvais coups, à moins que nous arrivions à faire face et à nous organiser.
SED (Blanquefort 33) - La direction cherche à rendre des travailleurs responsables des conséquences de sa propre politique
SED est une usine dembouteillage de vin de la banlieue bordelaise. La semaine dernière, la direction a convoqué trois camarades à un entretien préalable à licenciement pour deux dentre eux, un ouvrier et un agent de maîtrise, et à sanction disciplinaire pour le troisième, agent de maîtrise à la Maintenance.
Le premier, ouvrier sur une chaîne dembouteillage, a été placé en mise à pied conservatoire dès le 13 juillet. La direction lui reproche davoir remis volontairement deux bouteilles trop pleines sur la chaîne. Il avait arrêté son poste, tout à fait normalement, pour aller prendre sa pause ; quand il est revenu, il sest aperçu que la tireuse avait été remise en route pendant son absence, mais sans la pompe qui vide le col des bouteilles trop pleines. Du coup, il y avait tout un stock de bouteilles trop pleines sur la chaîne et notre camarade les a dégagées en les posant par terre autour de lui. Sauf deux, quil a remises sur la chaîne, faute de place au sol, le temps daller chercher de quoi dégager le stock. Cest ce geste qui est venu aux oreilles de la direction, et quelle a considéré comme un " acte malveillant ", une " faute grave " susceptible de justifier quun travailleur se retrouve à la rue !
Notre second camarade est agent de maîtrise et responsable de cette même chaîne. La direction a lancé contre lui une procédure de licenciement pour " incompétence et faute grave ". Dune part, il ne serait pas capable de " tenir " son équipe, qui serait particulièrement indisciplinée, il naurait pas été voir louvrier pour sa soi-disant faute, et nen aurait pas averti la direction. Dautre part, elle lui reproche davoir laissé passer un lot de bouteilles avec le bouchon fendu... ce que lon ne peut voir quen les débouchant.
Notre troisième collègue, agent de maîtrise à la Maintenance est, lui, menacé de sanction disciplinaire par la direction qui lui reproche de ne pas être capable de faire en sorte que la boucheuse ne fende plus les bouchons quelle pose.
Depuis plus dun an et demi, il y a eu de nombreux retours de lots à cause de bouchons fendus. Pour régler ce problème, il faudrait remplacer les mâchoires défectueuses de certaines boucheuses. Les collègues de la Maintenance lont signalé à la direction à plusieurs reprises, et le problème a même été posé par les délégués en réunion de CE. Aujourdhui, elle tente de faire porter le chapeau à nos camarades pour des défections créées par sa propre politique déconomies à courte vue. Et cest dautant plus clair aux yeux de tous quelle vient de commander de nouvelles mâchoires, ce qui est une façon de reconnaître que cest là la véritable cause du problème et que nos camarades ny sont pour rien.
Ce nest pas la première fois que la direction porte contre des travailleurs des accusations sans fondement, mais assorties dune menace de licenciement tout à fait réelle, et quelle cherche à mener jusquau bout. Il y a un an et demi, un camarade a été jeté à la rue sous laccusation davoir injurié un cadre, et depuis, plusieurs travailleurs se sont vus menacés de sanctions pouvant aller jusquau licenciement, dautres se sont vus mis à pied pour de simples retards. A cette politique systématique qui consiste à faire planer sur tous la menace du chômage pour nous faire accepter sans broncher de continuelles aggravations de nos conditions de travail, la direction ajoute maintenant celle qui consiste à vouloir nous sanctionner pour la gabegie qui règne en permanence dans lusine à cause de son souci déconomies.
Cette fois-ci, elle a cherché à profiter du moment où beaucoup dentre nous sont en vacances et remplacés en partie par des intérimaires pour faire son mauvais coup. Un tract de la CGT et de FO, dénonçant les méthodes de la direction, sest fait lécho de ce que beaucoup dentre nous pensent, et certains travailleurs ont pris linitiative de le diffuser dans leur service. Une collecte a par ailleurs été organisée pour aider le camarade mis à pied.
Aux dernières nouvelles, ce camarade vient de recevoir une lettre de la direction qui laisse tomber le motif d " acte malveillant ", donc la demande de licenciement, mais maintient une sanction de deux jours de mise à pied. Cela permet au patron, en plus dessayer de ne pas perdre la face, de tenter déviter de payer à notre collègue le salaire de ses 14 jours de mise à pied conservatoire. Ce dernier va refuser la sanction. Les deux autres travailleurs nont, pour linstant, rien reçu de nouveau.
Vigilance Echo du bulletin "Voix des Travailleurs" Total Le Havre
La fusion Total-Fina se met en place dans de nombreux sites en Europe. Sur notre établissement, le Centre de Recherches est concerné par la suppression de 35 postes. Il y a un mois, le personnel avait manifesté devant nos patrons venus trinquer en lhonneur de cette fusion. Depuis, cest le statu quo dans lattente du compte-rendu dune expertise demandée par le CHSCT sur les conséquences de ces suppressions de postes sur les conditions de travail.
Le personnel doit rester vigilant et prêt à manifester de nouveau pour exiger le maintien de lintégralité de leffectif.