dans les entreprises



Les éboueurs de Marseille obtiennent leurs revendications par la grève, tous ensemble

Les 47 éboueurs de la société privée Bronzo se sont mis en grève mardi 17 août pour des embauches et contre la dégradation de leurs conditions de travail. Cette filiale à 100 % de la Société des Eaux de Marseille (SEM) elle-même détenue à parité par les trusts aux profits juteux, Vivendi et la Lyonnaise des Eaux, venait de signer en juin un contrat avec la municipalité de Marseille dont les deux tiers de la collecte des ordures sont assurés par les services municipaux et le reste par des sociétés privées. Bronzo voulait imposer une nouvelle organisation du ramassage des ordures avec seulement 10 bennes au lieu des 12 utilisées jusqu’alors, ce qui signifiait des équipages réduits à deux, un chauffeur et un ripper (ramasseur) au lieu de deux et donc, l’allongement des tournées. Les éboueurs ont aussitôt signalé qu’ils n’arrivaient pas à tenir le rythme. Le patron a alors mis en place une onzième benne mais les travailleurs continuaient à rentrer au dépôt plus tard que prévu. Les éboueurs ont alors exigé la douzième benne et l’embauche de 4 éboueurs supplémentaires. La SEM a d’abord " proposé " une douzième benne mais aucune embauche. Le mouvement s’est durci avec, mercredi 25 au soir, le blocage des deux centres de stockage temporaires de Marseille, empêchant le ramassage des ordures dans toute la ville. La SEM acceptait alors les embauches mais en refusant une douzième benne. Alors qu’une campagne était orchestrée dans la presse pour dresser la population contre les éboueurs, les " 3 000 tonnes d’ordures " et le " risque d’épidemies ", selon le maire de droite Gaudin, les travailleurs ont tenu bon dénonçant " le drainage des profits pour les grands groupes ", selon le délégué CGT, Eric Coppa. Et lorsque un accord a été signé vendredi 27 par les deux syndicats majoritaires à Bronzo, la CFDT et FO, l’ensemble des grévistes l’ont dénoncé et ont continué le mouvement. Le patron leur demandait de reprendre le travail le soir même sans avoir signé de protocole ! Dans les cités du nord de Marseille desservies par Bronzo, des habitants, excédés, ont loué une benne qu’ils ont chargée de détritus qu’ils ont répandus devant la mairie.

Gaudin a couru demander et obtenu aussitôt, samedi, l’autorisation du Préfet pour recourir à l’armée pour briser la grève et ramasser les ordures. Alors, lundi 30 août, les éboueurs des trois autres sociétés privées de ramassage des ordures de Marseille, Onyx, chargée du ramassage dans le centre-ville, Polyurbaine et Abilis se sont joints au mouvement. Pour Michel Laperdula, délégué CFDT d’Onyx : " Ce n’est pas seulement la solidarité qui nous rallie au mouvement mais les mêmes préoccupations concernant les effectifs et les conditions de travail. Le système d’attribution des marchés nous pose problème car l’attribution se fait au bénéfice de l’entreprise qui propose le prix le plus bas. Laquelle entreprise doit ensuite réduire ses coûts pour pouvoir tenir ses engagements, ce qui entraîne réductions d’effectifs et de matériel ".

Lundi également, une grève d’une partie des chauffeurs de bus marseillais a éclaté suite à l’agression, dimanche, de l’un d’entre eux. Lundi soir, les éboueurs ont obtenu la douzième benne et 4 embauches supplémentaires, avec le sentiment bien réel d’une victoire des éboueurs unis sur le patron et sur la mairie.

S.C

Fichage informatique = flicage des salariés d’Alstom

548 salariés de l’entreprise Alstom Energy Systems installée à Vélizy dans les Yvelines, ont fait l’objet d’un fichage informatique portant sur leur vie privée, leur caractère ou leur degré de motivation. Révélées par le quotidien l’Humanité daté du 27 août, ces fiches datées de juillet 99 recensent les " lacunes " des salariés, telles que " longue maladie ", " séquelles de l’hémiplégie " ou " indisci-pline " qui sont présentées comme des motifs pouvant justifier la suppression de leur poste. Un salarié est ainsi jugé " difficile à contrôler ", un autre " marche à la carotte " et un cadre se voit reprocher " son potentiel limité par la vie familiale ". Aucune catégorie du personnel n’échappe en effet au collimateur patronal. Les femmes sont particulièrement visées comme étant, entre autres, " trop absentes ".

La direction générale n’a pas démenti l’existence d’un tel fichier. Mais elle veut bien sûr en minimiser la portée. Tantôt elle a parlé " d’une erreur " ; tantôt elle a cherché à désamorcer le problème en faisant croire qu’il s’agissait d’un simple traitement informatique des entretiens individuels (ce qui n’est pas plus légitime pour autant !) ou " d’un document de travail destiné à étudier l’évolution des métiers et en aucune manière à alimenter un fichier informatisé s’inscrivant dans un plan de suppression d’em-plois ".

Mais l’Alstom n’en est pas à son coup d’essai en la matière. Au cours du conflit de novembre 94, des grévistes de Belfort avaient découvert un fichier précisant l’attitude des salariés vis-à-vis des syndicats dans le but de repérer les salariés dociles et les rebelles. On sait que bien des patrons pratiquent de la sorte et que le flicage des salariés, qu’il soit informatisé ou pas, a existé de tout temps dans les entreprises. Tout travailleur connaît les garde-chiourme chargés par les directions de surveiller les ouvriers ou les employés dans les ateliers et les bureaux. De tels renseignements peuvent servir à tout, à décerner des augmentations individuelles, à changer de poste et bien sûr, en cas de restructuration, à supprimer des postes et à licencier.

Cette fois-ci, la direction de Vélizy a été prise la main dans le sac. Et ce fichier informatique démontre une fois de plus que les patrons ne se privent pas pour développer des pratiques contraires à la loi. Le plus sûr moyen de les débusquer, est que les travailleurs aillent mettre leur nez de plus près dans leurs papiers.

Elise Sabe

Ralston-Caudebec (Seine-Maritime) : vers une mobilisation des salariés ?

A Ralston, tout le monde parle de l’application des 35 heures à la sauce Aubry. La direction voudrait, sous couvert de baisser le temps de travail, annualiser ce même temps de travail, et donc faire travailler les salariés en fonction de la demande, avec des périodes hautes et des périodes basses. En période de forte production (à Ralston, on produit des piles), la direction voudrait faire tourner l’usine 6 samedis matins. Au début, elle parlait de 10 samedis, matins et après-midi. Elle a dû reculer, mais cela ne suffit évidemment pas.

Quant à la baisse de travail, les salariés passeraient de 40 heures à 37,5 heures, payés 39. Une baisse de salaire, donc. Et question embauches, qui sont paraît-il le but de l’opération des 35 heures, il n’y aurait rien ! Il est vrai que l’usine a procédé il y a bientôt un an à une " restructuration ", avec la perte de 334 emplois, c’est-à-dire des deux tiers de l’ensemble du personnel. C’est dire qu’il n’est pas dans les calculs de la direction d’embaucher ! Cela ne l’empêche pas pour autant de prévoir, en cas de grosse production, le recours à des intérimaires, jusqu’à 25 % du total des effectifs. Toutes ces mesures, en discussion pour le moment, ont de quoi inquiéter. Beaucoup de salariés craignent qu’un syndicat signe un accord avec la direction. Tout le monde a en tête l’exemple local de Renault-Cléon, où on a vu des syndicats minoritaires, la CFDT et FO, signer l’accord et donc permettre son application, selon les termes de la loi Aubry.

Mais d’autres salariés disent que même en cas de signature, rien n’est impossible si les travailleurs se battent, et que l’on peut toujours remettre en question les accords passés avec la direction. Tout dépend du rapport de force ! C’est d’ailleurs ce qui est en train de se passer avec d’anciens salariés de l’usine. A la suite de la grève d’octobre 1998 contre les 334 licenciements, les travailleurs " en mesure d’âge ", c’est-à-dire les plus anciens, qui allaient partir en préretraite maison, avaient obtenu une prime de 30 000 francs. Et les autres, ceux qui allaient devoir trouver du travail, avaient obtenu 130 000 francs. Mais en juin dernier, une quarantaine d’ex-salariés " en mesure d’âge " ont décidé de " remettre ça ", de ne pas s’arrêter à l’accord passé avec la direction en octobre 1998 à la fin de la grève, et de se battre pour obtenir les 130 000 francs pour tous. Ces ex-travailleurs, aujourd’hui en préretraite maison, se sont donc réunis deux fois devant l’entreprise, ils sont allés en car à la Préfecture, et ils menacent de bloquer Martot, le dépôt de l’usine.

Ce qui est positif, c’est que ces anciens salariés ne se sentent freinés par aucune signature, qu’ils mettent en avant leurs intérêts avant toute chose, et que, malgré leur isolement, puisqu’ils ne sont plus dans l’usine, ils continuent à se voir, s’organiser et se battre ! Une bonne leçon de choses !

Correspondance VDT-LCR

Escroquerie - Echo du bulletin Voix des Travailleurs de Renault-Cléon (76)

Fin juillet, l’accord sur les mesures d’âge dans l’automobile a été signé par le patronat et les syndicats perroquets sous l’œil bienveillant du gouvernement.

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on est loin des départs massifs à 55 ans comme cela avait été annoncé. En fait, durant deux ans, de 55 à 57 ans, les travailleurs concernés seront toujours inscrits aux effectifs et susceptibles d’être appelés à tout moment. Bref, Renault et Peugeot copient le système des réservistes cher à l’armée.

Pour les travailleurs que nous sommes, la revendication reste la même : un vrai départ à 55 ans équivalent à une embauche et non trois départs pour une embauche, ce qui va aggraver encore plus les conditions de travail.

De plus en plus de Smicards : baisse du coût du travail pour satisfaire les boursicoteurs

Le ministère de l’Emploi a publié récemment le nombre de salariés payés au Smic en 1998 : 2,4 millions, soit 12,4 % de l’ensemble des salariés. Cette proportion est en forte hausse par rapport à 1994, où les Smicards représentaient 8,2 % des salariés.

Les plus touchées restent les femmes : 17,2 % en 1998 contre 9,1 % d’hommes. Et les jeunes : environ 31 %.

Dans les entreprises de moins de 10 salariés, la proportion est deux fois plus élevée que la moyenne nationale : 26 %.

Dans l’hôtellerie-restauration, ce sont 45,4 % des salariés qui sont payés au salaire minimum (5440 F nets depuis le 1er juillet) ; dans les services personnels : 31 % ; dans l’agro-alimentaire : 20,2 % ; dans le textile : 19,4 %.

Dans les plus grandes entreprises, là où il peut y avoir des grilles salariales avec un plancher un peu plus élevé, la politique des patrons qui renouvellent les effectifs est de profiter des départs en retraite, quand ce n’est pas de pousser vers la sortie les travailleurs les moins productifs, pour embaucher des jeunes au plus bas salaire possible. Et tout est bon pour baisser le coût du travail. On peut voir des augmentations annuelles de 0,5 %, payées en deux fois, ou pas d’augmentation du tout, quand ce n’est pas une baisse du salaire par la suppression ou la diminution de primes, et peu à peu, ce sont ainsi des dizaines de milliers de salariés qui deviennent Smicards, rattrapés par le Smic qui lui, légalement, doit être augmenté chaque année, même si Jospin s’est fait un devoir de ne l’augmenter qu’au minimum (+1,24 %, soit 70 F de plus pour un temps plein en juillet 99).

De plus, en 1997, 10 % des salariés ont gagné moins de 3600 F, et 5 % entre 4800 et 3600 F par mois, à cause des temps partiels, de l’intérim, ou des contrats type CES.

Au total, aujourd’hui, ce sont donc plus du quart des salariés qui touchent le Smic et moins.

C’est le fruit de la politique patronale qui, depuis des années, fait pression pour baisser le coût du travail, main dans la main avec les gouvernements qui se succèdent et qui reproduisent dans le secteur public la même politique de rigueur… pour les travailleurs. C’est de ces économies-là que l’Etat tire les milliards de subventions pour le patronat. C’est de cette pression sur les salaires que les patrons tirent les dividendes des actionnaires.

Franck Coleman