échos dentreprises et de luttes
A Bordeaux, les salariés de deux centres de tri de la Poste, le C.T.Distribution et le C.T.Courrier, mitoyens, sont en grève.
Au CTD, la grève a commencé le 5 octobre pour sopposer à une réorganisation qui amènerait la disparition de tous les emplois de nuit - 82 salariés - et au transfert du courrier et des agents vers dautres centres comme Bordeaux Recette Principale pour le courrier des particuliers, ou le centre de tri départemental pour celui des entreprises (cedex). Les contractuels du matin, qui ont des horaires atypiques (3 h 30 à 7 h du matin) et qui nont que des contrats à temps partiel, se sont aussitôt joints à la lutte pour réclamer des CDI à temps complet.
Au CTC, les revendications sont liées à la fois à la politique de restructuration de la Poste et à la mise en place de la RTT. Environ 400 personnes nauraient droit à aucune RTT, sous prétexte quelles travaillent déjà moins de 35 heures (horaires de nuit par exemple). Et les embauches seraient loin de compenser la RTT. Le vrai problème, cest la politique déconomie de la Poste, comme disait un camarade : " quand on veut du profit, on attaque la masse salariale, on attaque les effectifs de toute façon, dans lhistoire, on na jamais vu le temps de travail diminuer sans les luttes et un rapport de forces ".
La direction départementale de la Poste refuse toute discussion, elle a déclaré à la radio : " on ne discute pas avec les révolutionnaires du statu quo " ! Quant au directeur du CTC, il ne vient plus au centre il sest trouvé un bureau à la DD !
Pour briser la grève, la Poste a mis en place depuis le début du conflit des centres de tri parallèles en recrutant de jeunes intérimaires payés au lance-pierre. Le 18 octobre, 50 grévistes du CTC et du CTD, excédés par le mépris du directeur, ont alors fait une expédition à lun de ces centres illégaux à Artigues, en banlieue. Quelques ufs et quelques pétards ont été lancés, ce à quoi la direction de La Poste a répondu en portant plainte et, trois jours plus tard, trois gendarmes ont débarqué au domicile dun militant CGT actif et connu, pour le mettre en garde à vue, manipulation qui navait pour but que de décourager et impressionner les grévistes ce qui a aussitôt provoqué lextension du mouvement. Pendant sa détention, le copain de la CGT a été sommé de dénoncer ses camarades et face à son refus de délation, les gendarmes ont décidé de prolonger sa garde à vue. A partir du 21 octobre, la grève sest étendue à dautres services (Plate-forme colis, Bordeaux docks ). La solidarité sest ainsi imposée avec notamment une manifestation de 300 personnes devant la direction qui a été contrainte de retirer sa plainte.
Depuis, la lutte continue, chaque assemblée générale décidant des actions à mener. Une série de manifestations et de rassemblements ont été organisés devant la direction départementale, la préfecture, la mairie de Bègles (Noël Mamère) ou le Conseil Régional, où il y avait entre 100 et 150 postiers.
Mardi soir, à lAG de léquipe de nuit du CTC, les militants reçus laprès-midi faisaient le bilan de lentrevue accordée par des conseillers du président de région, le " socialiste " Rousset, qui étaient daccord sur tout mais pour qui rien nétait possible, car la situation était " corsetée par la signature du contrat de plan entre lEtat et la Poste " !
Dans lAG, de nombreuses interventions, dont celles des militants de la CGT et de SUD qui animent la grève, mettaient en avant le ras-le-bol des fausses négociations ou entrevues avec des représentants qui nont rien à proposer, ni le pouvoir de décider, alors que la vraie direction se débine. Le représentant de la direction présent a été contraint de téléphoner à plusieurs reprises à ses supérieurs, les grévistes voulant négocier de suite et au plus haut niveau, refusant de se déplacer désormais pour voir des sous-fifres.
La poursuite de la grève a été votée, dautant que les brigades de journées commencent à rejoindre plus nombreuses le mouvement. Tout le monde se dit quil faudrait une extension de la lutte à lensemble des Centres de tri de la Poste, comme en 95, tant il est clair que la grève soppose à une volonté politique densemble de la direction nationale qui est de rendre la Poste profitable, en cassant toutes les résistances, au mépris des salariés et des usagers, en supprimant des milliers demplois.
Vercors : un patron de choc traîne en justice un militant qui dérange
Un responsable syndical traîné en justice pour avoir dénoncé les conditions de travail dans une entreprise : cest ce qui arrive à Patrick Brochier, qui devait comparaître ce jeudi 28 octobre devant le tribunal correctionnel de Grenoble. Son crime : avoir signé, au nom de lunion locale CGT du Vercors, un communiqué de presse paru dans le Dauphiné Libéré, dans lequel les établissements JOLY MARION étaient mis en cause. Cette PME fabricant des " objets décoratifs " sest installée voilà quelques années à Lans-en Vercors, petite commune de montagne, à grand renfort daides publiques, et elle emploie aujourdhui plusieurs dizaines de salariés. Mais son patron, tout moderne et dynamique quil soit aux yeux de la presse locale, a vite combiné les méthodes paternalistes traditionnelles avec une gestion brutale du personnel : absence de droits syndicaux, interdiction de parler à lextérieur du vécu dans lentreprise, salaires de misère, usage abusif des heures supplémentaires et, naturellement, la porte pour qui se rebiffe. Suite au communiqué de la CGT, la presse locale a même reçu une lettre " spontanée " des employés de JOLY MARION protestant contre les " calomnies " du syndicat. Il est vrai que si les anciens salariés de lentreprise sexpriment sans réserve sur les conditions de travail quils ont subies, la pression et le chantage au licenciement jouent à plein sur ceux qui sont en poste.
En sattaquant à Patrick, la direction de JOLY MARION voudrait contraindre la toute récente UL CGT à respecter elle aussi la loi du silence. Elle compte sur le soutien du patronat local, dont les méthodes ne sont guère différentes, et dune partie des élus du Vercors qui, évidemment au nom de lemploi, sont prêts à laisser transformer notre région en zone de non droit. Cest que laction syndicale dérange, quelle a permis à nombre de salariés des entreprises du coin de ne plus se résigner, quelle les aide à faire valoir leurs droits, avec comme résultat la constitution de plusieurs sections syndicales et lélection de délégués du personnel. Le procès intenté à Patrick Brochier, qui est passible de 6 mois de prison et dune forte amende, montre aussi lacharnement des notables locaux contre ce travailleur de lONF, militant de la CGT et du PCF. En 1998, le sénateur maire dAutrans, la petite commune où il réside, avait obtenu de la direction régionale de létablissement public sa mutation forcée à lautre bout de lIsère. La mobilisation syndicale avait forcé lONF à reporter cette mesure. Elle doit obtenir aujourdhui lacquittement de Patrick.
Correspondant
Echos du bulletin hôpital Charles Nicolle (Rouen)
SOUS CONDITIONS
Sur la paye de décembre, un acompte de 1 500 F de la prime de service 99 peut être obtenu par les agents qui en feront la demande. Cet acompte sera le bienvenu puisquil tombera pour les fêtes de fin dannée, mais la direction entend pénaliser les agents qui ont eu plus de 10 jours darrêt maladie dans lannée.
Cest quand même le comble dans un hôpital de sanctionner la maladie.
" DU POGNON IL Y EN A DANS LA POCHE DU PATRONAT ! ! ! "
Le Conseil dAdministration du 15 octobre (les représentants du personnel, les médecins) a refusé de voter le budget de létablissement pour lan 2000 et cest tant mieux ! Ceci met en évidence le manque de moyens attribués ces dernières années et qui a conduit le CHU à réduire considérablement le nombre de mensualités de remplacement
A force davoir rogné par tous les bouts, le manque de moyens met en cause le fonctionnement de létablissement et aboutit à la fermeture plus importante de lits, dune année sur lautre. Pour la fin de lannée, le manque de personnel est catastrophique dans beaucoup de services.
Alors la direction dit quelle ne peut rien faire : " cest aux politiques de prendre leurs responsabilités ".
Oui bien sûr mais il ne sagit pas de prendre aux autres établissements hospitaliers publics qui éprouvent eux aussi les même difficultés. Il sagit bel et bien de sopposer à la politique du gouvernement en matière de restrictions dans la santé et dimposer des crédits à la mesure des besoins de la population.
Les 35 heures à lhôpital public : une attente sans illusions
Si on a appris, par la presse, que tous les syndicats de la Fonction Publique sont, depuis début octobre, reçus à tour de rôle par Emile Zucarelli, ministre de la Fonction Publique, pour discuter des 35 heures, rien nen transparaît dans les tracts syndicaux.
Dans les services, cette question des 35 heures revient sans cesse : " tu crois quils vont finir par nous les donner à nous aussi ? " " ça serait bien de souffler un peu davoir quelques fériés en plus... " ou encore : " si ça pouvait permettre des embauches, des titularisations... "
Mais beaucoup sont lucides et plutôt inquiets : " depuis que mon mari a les 35 heures, il fait des samedis obligatoires et non payés en heures supplémentaires ". Et nombreux sont ceux qui, constatant la grave dégradation des conditions de travail de ces derniers mois disent : " ils nembaucheront pas, alors, faire quatre heures de moins dans ces conditions, merci bien ! "
Les personnels de nuit à lhôpital public ont les 35 heures depuis quelques années. Cest un engagement qui avait été obtenu suite aux grèves des infirmières. Cette baisse du temps de travail est certes appréciée par ces collègues. Mais elle a été appliquée sans aucune embauche, car, contrairement à ce que disent les syndicats, les 59 postes accordés au CHU de Bordeaux, par exemple, étaient des postes redéployés dautres services. Mais ce dont ne parlent pas les syndicats, cest que pour mettre en place ces 35 heures de nuit, des équipes de remplaçants ont été constituées, au volontariat, acceptant de faire toute lannée, sans interruption, quatre nuits de rang, moyennant dêtre de repos tous les vendredi, samedi et dimanche et deux mois et demi pour les congés en été. Un roulement épuisant et une dérogation au régime habituel des roulements de nuit qui ouvre une brèche et pourra être très utile à la direction pour lavenir.
La direction, si elle ne laisse rien transparaître pour linstant, a aussi des raisons dêtre inquiète car elle connaît tout à fait la pénurie de personnel et le mécontentement qui existe. Plus dun de ces messieurs doit se demander comment appliquer avant 2002 les 35 heures sans budget et sans embauches. Il est vrai que le rapport Roché (sorte de mémoire établi, à la demande du gouvernement, pour envisager ce passage aux 35 heures sans aucune embauche) leur offre quelques " gisements " à exploiter : on ne pourra peut-être pas embaucher, mais on pourra redéployer les effectifs puisquil y a encore tant de services et de lits à fermer (30 000 daprès Martine Aubry). Et puis, il y a temps de travail et temps de travail " effectif " ! Certains hôpitaux connaissent encore la demi-heure de repas prise sur le temps de travail. Nest-il pas temps de mettre fin à ces " corporatismes " et daligner tout le monde par le bas ? Il y a aussi ce problème du chevauchement des équipes qui, de 13 heures à 15 heures permet aux équipes de matin et de soir de se retrouver pour passer les consignes, aller au self (quand on peut). Là encore, ne peut-on réduire ce chevauchement à une heure ? En une semaine, ça permettrait de grignoter 5 heures
Comme on le voit, les projets ne manquent pas. Le personnel en discute, lidée de la nécessité dune riposte fait son chemin. Toute la question est celle de son organisation, bien peu aujourdhui font confiance aux syndicats pour cela.
Au Leader Price de la cité de Saige Formanoir à Pessac (banlieue de Bordeaux), nous sommes une vingtaine demployés, en majorité en CDI et les autres en CDD. Pour palier aux absences (maladies, congés ) le responsable du magasin fait appel à lintérim.
Depuis des mois, celui-ci emploie des méthodes plus que douteuses, pour faire rentrer dans le rang ceux qui oseraient protester contre ses projets dorganisation du travail.
Quelques exemples. Prenant des collègues à part, il dit à ceux qui voudraient bien lentendre : " certains ne font pas leur travail ". Ou en tête à tête, il nhésite pas à employer la vulgarité pour intimider ou provoquer.
Il nous impose de ne pas prendre plus de 2 semaines de congés à la suite. Pour les caissières, il nest pas question de prendre un seul samedi matin de repos.
Les salaires eux, ne bougent pas depuis des années, pour les plus anciens cest toujours le SMIC après 6 ans de présence. Certains dentre nous ont essayé de demander des augmentations, la réponse est invariable " si j'en augmente un, il me faudra augmenter tout le monde ". Alors ce n'est personne !
En juin 98, nous avions fait grève un jour tous ensemble, pour les salaires et lembauche. La direction générale avait dû céder, accorder un poste de caissière de plus et des heures de manutention supplémentaires qui sont faites par des CDD. Nous avions aussi obtenu des choses élémentaires, comme une salle de repos et le respect des temps de pause.
Depuis, le gérant ne la pas digéré, alors il cherche par tous les moyens à nous diviser. Pour la majorité dentre nous pour linstant, cest la colère rentrée, même si certains osent exprimer publiquement leur désaccord avec ces méthodes, accompagnées dun chantage au licenciement.
Malgré cela, lidée de réagir et ne pas laisser faire fait son chemin.
Dernier lancement dun navire aux Ateliers et Chantiers du Havre : patrons et gouvernants ont quitté le navire, restent les travailleurs au chômage
Samedi 23 octobre, les ACH ont livré leur dernier navire, le seul des 3 chimiquiers commandés par larmateur Stolt, qui part en direction dun autre chantier qui le terminera. Le nombre des emplois directs ou indirects supprimés serait de 3000 dans une ville de 200 000 habitants. 950 travailleurs des ACH auront perdu leur emploi dici à la fermeture totale en juin 2000. Bove, le Monsieur Réindustrialisation du Havre avait promis un plan social " exemplaire " de 260 millions de francs, avec primes au départ et reclassement. Ce plan sera sans doute exemplaire pour les patrons : lensemble du Holding ACH est vendu par petits morceaux à bon prix à des patrons petits et grands. Le site de 11 hectares à Graville fera la joie des manutentionnaires de conteneurs. Le siège social en centre ville enrichira un capitaliste quelconque de limmobilier, pendant que certaines activités pointues de conception ou de réparation sont rachetées, y compris par les patrons actuels. Une fois de plus, ils ne devraient pas sortir perdants de lhistoire. Les travailleurs qui ont tout quitté pour aller à St-Nazaire embaucheront chez Alstom (chantiers de lAtlantique), avec toute leur expérience, mais en perdant leur ancienneté. De toutes façons, il y aura moins dembauches que prévues. Cest le cas pour lensemble du plan social car pour linstant, ce que les licenciés obtiennent, ce sont surtout des promesses. Sur 450 licenciés à la mi-octobre, seule une cinquantaine a retrouvé de lembauche et que dire des intérimaires ou sous-traitants dont personne ne sait ce quils sont devenus ? Laudit sur un futur Pôle Industriel et Naval est " en quête de définition ", manière de dire que cest un flop, mais quau passage, cet audit aura eu le mérite denrichir le cabinet qui la réalisé. Le Port Autonome comme Total et EDF vont toucher une manne de subventions car 20 milliards de francs dinvestissements sont prévus dans les années à venir, mais lembauche, elle, nest toujours pas là. Hispano Suiza reprendrait bientôt une trentaine de salariés. Pour le reste, cest donc linquiétude, dautant que les perspectives demplois ne sont pas excellentes. Delmas, propriété du milliardaire Bolloré, actionnaire à 35 % des ACH et dont larrivée du siège social il y a 2 ans avait été annoncée à grande trompe, Delmas donc, licencie lui aussi. CMS, une entreprise de chaudronnerie liée à Alstom et qui avait reçu des garanties de la multinationale quand celle-ci a fermé son usine du Havre, est menacée de fermeture. Encore 200 chômeurs de plus en perspective dans une ville qui compte déjà un taux de chômage de 17 %. Autant dire que les promesses de Bove, qui avait déjà sévi dans la sidérurgie lorraine, laissent tout le monde très perplexe : cest " parole de patron ". Le lancement du dernier navire aux ACH laisse donc un goût très amer. Celui davoir assisté à un gigantesque gâchis. Les responsables ? Les patrons, trop près de leurs profits et de leurs subventions et incapables de moderniser lentreprise. Les politiques : ceux de droite qui signent une commande irréalisable en 1995 pour propulser Rufenacht, candidat RPR à la tête de la mairie, et ceux de gauche qui laissent périr le chantier. Lamertume existe également à lencontre du syndicat CGT dont la politique dunion sacrée avec les patrons et les politiques de tous bords a été un frein pour la lutte. Le désarroi domine. La volonté aussi de ne pas assister de nouveau dans lavenir à un tel " enterrement de 1ère classe ". Reste à discuter des moyens pour éviter cela.
Travail de nuit des femmes - Sous le prétexte hypocrite dégalité, une nouvelle attaque contre les conditions de travail et de vie des femmes, et de tous les salariés
Au nom de légalité entre les femmes et les hommes, une directive de la Commission européenne demande la fin de linterdiction du travail de nuit pour les femmes qui travaillent dans lindustrie en France. La France est en effet le seul pays où le travail de nuit des femmes est interdit par une loi, considérée en contradiction avec la directive européenne de 1976 sur légalité des sexes, et elle est condamnée à payer pour cela une amende qui sélève à 943 881 F dastreinte par jour pour non respect de cette fameuse directive.
La Commission européenne estime que linterdiction faite aux femmes de travailler la nuit constitue une discrimination sexiste. Pour ces législateurs hypocrites, les femmes françaises seraient ainsi écartées de la possibilité daugmenter leur salaire par des primes de nuit, de pouvoir organiser leur temps de travail comme les hommes.
Tout le monde sait aujourdhui que le travail de nuit, pour les femmes comme pour les hommes est dangereux pour la santé physique et nerveuse. Une enquête de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales révèle que le travail de nuit abaisse de 7 ans lespérance de vie des salariés, de 10 ans celle des infirmières. Or aujourdhui, 3 millions de salariés travaillent actuellement en France, régulièrement ou occasionnellement la nuit, 20 % dhommes et 6 % de femmes. Et si la loi est toujours théoriquement en vigueur, dans les faits, le travail de nuit ne cesse de se développer, imposé aux femmes par un patronat qui ne connaît que la rentabilisation du travail et la flexibilité. Il ne sagit pas dune quelconque liberté de choix pour les femmes, qui sont les premières victimes du chômage, des bas salaires et de la précarité, contraintes daccepter la dégradation de leurs conditions de vie et de travail, daccepter les 2 x 8 ou les 3 x 8, lallongement des journées de travail, etc. Pour les ouvrières non qualifiées, le travail en 2 x 8 ou en 3 x 8 a progressé de 21 % en 91 à près de 30 % en 98. Un demi-million de femmes, femmes de ménage, infirmières, serveuses ou ouvrières, travaillent de nuit. Parallèlement à laugmentation du travail de nuit des femmes dans lindustrie, on assiste dans le commerce, secteur très féminisé, à une extension du travail du dimanche et des jours fériés, des fins de journée tardives, avec des emplois précaires et à temps partiel.
Cette loi française sur le travail de nuit des femmes avait été votée en 1892 pour défendre la moralité de la famille et des femmes, jugeant quil nétait pas " convenable " quune femme gagne de largent par une activité salariée. Malgré les préoccupations réactionnaires de ses initiateurs, elle a permis de protéger les femmes, et sa remise en cause aujourdhui est un recul qui concerne non seulement les femmes mais lensemble des salariés, car elle signifie laggravation des conditions de travail pour tous, un nouveau verrou qui saute dans le sens dune plus grande flexibilité et une réorganisation du travail (rentabilisation des machines qui pourront tourner 24 heures sur 24, modulation...) au seul profit du patronat.
C.A.
Les patrons mouchardent les travailleurs pour faire pression et augmenter la productivité
La direction de Thomson dans le Loiret, a engagé une nouvelle procédure de licenciement contre Armelle Bruand, déléguée CGT, parce quelle a dénoncé auprès de lInspection du travail et de la Cnil (Commission nationale informatique et libertés) la présence dune caméra de surveillance cachée dans un lampadaire à côté des fenêtres de la permanence syndicale. Cet engin pouvait zoomer, depuis le poste de garde, sur des documents posés sur les tables de la CGT et de la CFDT. La direction, qui en est à sa troisième procédure de licenciement contre cette militante, argue quelle aurait révélé à la presse " des informations protégées par le secret défense " ! Le 19 octobre, des militants CGT de lagglomération orléanaise ont dénoncé devant lusine cette attaque contre les libertés syndicales.
Une enquête récente de Liaisons Sociales révèle que le mouchardage des salariés par les patrons se développe. Installées soi-disant pour mieux surveiller les clients en cas daffluence, les bandes caméra leur servent aussi à traquer les travailleurs ; un patron de Relais H a licencié ainsi deux salariées pour faute lourde. Le motif : présomption de vol de deux paquets de cigarettes. Lune dentre elles, filmée en train de poser les paquets sur le comptoir, a dû passer 18 heures en garde à vue. Un cadre de la Fnac Etoile à Paris y a passé plus de 36 heures après avoir été perquisitionné et menotté, puis licencié pour vol ; il aurait été filmé au stock pendant un mois ! Des caméras ont également été installées dans des Assedic, dans des boules banalisées ! Dans une grande surface lyonnaise, les salariés se réunissent sur le parking parce que le service de sécurité a confirmé leurs soupçons ; leurs conversations étaient bien espionnées dans le magasin et le local syndical truffé de micros.
La loi interdit de filmer, écouter ou espionner un salarié à son insu. Mais, dans le cas des plate-formes colis des PTT, la direction a obtenu en procès le droit de braquer, comme cest le cas à celle de Saint-Pierre-des-Corps, 19 caméras sur les postes de travail ; ces caméras, analogiques et non numériques, nentraînent pas une déclaration à la Cnil ! Les patrons se servent des badges pour contrôler les horaires des ouvriers, mais aussi leur menu à la cantine, quand la carte à puce sert aussi à enregistrer les repas. Dans une entreprise parisienne de lautomobile, lorsquune ouvrière sest blessée avec une machine à coudre, la direction a refusé de déclarer laccident du travail sous prétexte quelle avait bu du vin le midi !
Tous les systèmes de contrôle informatisés badge daccès, auto-commutateurs, mesure du temps de travail -, devraient, selon la loi, être déclarés à la Cnil, avec leur finalité. Car les patrons se servent de plus en plus de linformatique et des nouvelles technologies pour mettre la pression sur les travailleurs. Une secrétaire de concessionnaire auto a été menacée de licenciement, parce que sa direction avait fait vérifier par France Télécom que 30 % de ses communications naboutissaient pas, alors que son standard ne lui permettait pas de prendre plusieurs appels simultanément ! Dans une plate-forme téléphonique de France Télécom au Nord de Paris, un " superviseur " sait en permanence combien de minutes les agents parlent avec un client ; dans la salle, un gros compteur électronique indique le nombre de travailleurs présents, ceux qui sont déconnectés du standard et les clients en attente. Et il est impossible dévaluer le flicage bien réel des disques durs dordinateurs, des boîtes de courrier électronique des salariés pour contrôler leur activité, leur rythme de travail à partir des données mémorisées. Une enquête sur les conditions de travail en 1998 a révélé quau cours des années 90, les contrôles par les ordinateurs des salariés de la grande distribution ont progressé de 300 %...
Sophie Candela
A.G de lUL Saint Médard (33): pas dillusions sur la loi Aubry !
LAg de lUL sest tenue avec la participation dune vingtaine de salariés de Dentressangle, Cordier, Ford, des municipaux du Haillan, des Cars Ouest Aquitain et de lEducation nationale.
La discussion a essentiellement porté sur les 35 heures. Elle avait été introduite par une camarade de Dentressangle qui après avoir dénoncé la politique des patrons à travers " laffaire Michelin " a dénoncé la façon dont la loi Aubry permettait aux patrons, avec la complicité du gouvernement, dimposer la modulation, la flexibilité et des attaques contre les salaires. Les camarades de la SED, une entreprise dembouteillage de Blanquefort, ont montré en dénonçant la situation de leur entreprise la continuité de la politique des gouvernements au service des patrons. En effet, un accord De Robien avait été signé à la SED. Il vient à expiration cette année et le patron semble très désireux de le prolonger en appliquant la loi Aubry qui lui donnera la possibilité de toucher de nouvelles subventions et daménager les horaires à sa guise, lui qui est en train de mener une véritable bataille pour grappiller cinq minutes sur les 20 minutes de pause ! Un camarade des municipaux du Haillan expliqua que le maire était daccord pour appliquer la loi Aubry mais quil voulait en " contrepartie " reprendre tous les avantages qui nétaient pas " statutaires " comme une prime payée en deux fois qui représente léquivalent dun treizième mois.
Devant ces témoignages, lintervention dune représentante de lUD, responsable de lUGICT, provoqua des réactions assez vives : elle se mit à vanter les mérites de cette loi qui contraint les patrons, " et cest la première fois ", à discuter de lorganisation du travail dans tous les secteurs dune entreprise. Un travailleur de la SED lui répondit quen matière dorganisation du travail, eux qui avaient connu en quelques années plusieurs patrons différents, avaient été soignés et que leurs horaires étaient maintenant " aussi extensibles que des élastiques " à force davoir été " réorganisés ". Cest donc bien le sentiment que cette loi est le prétexte aux attaques patronales contre lesquelles il nous faut nous défendre qui a dominé la réunion. Un sentiment bien différent de la précédente AG où ceux qui mettaient en cause la loi Aubry étaient traités de " pessimistes " par certains responsables syndicaux.