éditorial


Démission de Strauss-Kahn : leur " morale ", c’est 603 000 F d’honoraires pour l’un et moins de 3 000 F par mois pour six millions d’autres !

Strauss-Kahn a démissionné mardi car " la morale et le sens des responsabilités l’imposent ". Jospin a rendu hommage à son ancien ministre et l’a assuré de son " amitié fidèle " et toute la gauche plurielle a marqué sa solidarité avec lui. Avec un aplomb incroyable, ils voudraient renverser la situation et que nous plaignions Strauss-Kahn, qui a démissionné " pour ne pas être livré aux chiens " a dit Bocquet, le porte-parole du PC ! Pas un n’a trouvé scandaleux qu’un avocat qui défend " les valeurs de gauche " puisse demander 600 000 F d’honoraires, payés avec les cotisations de sécurité sociale des étudiants ! Tous se sont montrés solidaires car ils partagent la même morale, ils mènent la même politique au service des riches.

Seillière en personne lui a donné un satisfecit en le décrivant comme " un homme compétent et estimé ", tout en ajoutant que pour les patrons " honnêtement cela ne change rien ". Ce qu’a confirmé le successeur de Strauss-Kahn, Sautter qui a dit qu’il continuerait la politique de son prédécesseur. Seillière n’a effectivement aucune raison de s’inquiéter : Sautter, surnommé par ses propres amis " la carpe ", s’efface par avance devant le grand absent.

Que nous importe que Strauss-Kahn ait menti ou pas, qu’il ait ou pas effectué le " travail " demandé, quelques coups de téléphone et quelques heures de réunions ? Ce qui nous intéresse, c’est de comparer nos taux horaires avec les siens. A supposer qu’il ait consacré quelques dizaines d’heures à ce travail, cela fait un tarif horaire supérieur à un SMIC mensuel ! Loin des 40,72 F du SMIC horaire avec lequel des millions de salariés essaient de vivre ! Et ces tarifs semblent être la norme puisque l’Ordre des avocats avait trouvé que la rémunération était " d’un montant modéré " et que l’avocat qui a réellement rédigé les pièces de l’accord entre Vivendi et la MNEF a touché 120 millions de centimes !

Il y a peu de temps, Strauss-Kahn a présenté un projet de budget qui multiplie les milliards de cadeaux au patronat. Lui-même est intervenu à trois reprises en deux ans pour alléger la fiscalité des " stocks options ", ces combines financières qui permettent à quelques dirigeants de grandes entreprises de rafler des centaines de millions de francs ! C’est lui le chef d’orchestre de ces privatisations qui permettent aux grands groupes privés d’acheter des entreprises publiques à des prix bradés. C’est lui qui au Forum de Davos, devant le gratin du capitalisme international, expliquait que la loi Aubry était une aubaine pour les patrons parce qu’elle leur permettait de " réorganiser le temps de travail ", c’est-à-dire d’imposer la flexibilité à tout crin. Pas étonnant que les milieux d’affaires internationaux se soient " émus " du sort de Strauss-Kahn, il est de leur monde !

Dans son budget, Strauss-Kahn a aussi exigé que tous ceux dont les revenus annuels n’excèdent pas 22 500 F -2 100 F mensuels, paient une taxe d’habitation de 1 200 F et il a eu le front de présenter cela comme une mesure sociale puisqu’auparavant ils payaient 1 500 F ! Il s’est refusé, ainsi que l’ensemble du gouvernement, à augmenter les minima sociaux qui contraignent six millions de personnes à survivre avec moins de 3 000 F par mois. Ces gens-là sont avec les chômeurs, les jeunes, les travailleurs d’une brutalité inouïe. Tout franc perçu par un salarié ou un chômeur leur déchire les entrailles. Qu’ils posent aux " pères la Vertu " comme Jospin ou qu’ils se comportent comme des voyous en cravate, ils ne sont là que pour nous tromper et remplir les comptes en banque des capitalistes en pillant les fonds publics. Et comme ils font gagner beaucoup d’argent aux patrons - la plus grande fortune de France, Mme Bettencourt, gagne 32 SMIC mensuels à la minute ! - certains se disent qu’après tout, il est bien normal qu’ils en profitent ! 

Ces politiciens qui passent des cabinets d’avocats d’affaires aux cabinets ministériels, défendent les intérêts des patrons avec un cynisme et une brutalité dont Strauss-Kahn est le symbole. Ils sont du même monde. Les hommes politiques de gauche sont simplement plus cyniques : ils mènent une politique au service des patrons et prétendent le faire dans l’intérêt des travailleurs. Nous ne pouvons leur faire aucune confiance. Nous ne pouvons attendre d’eux que des mensonges et des coups. Remettre notre sort entre leurs mains, croire une seule seconde en leurs mensonges, c’est avoir l’assurance d’être trompés et défaits. Voyons-les comme ils sont, ne nous plaignons pas qu’ils nous trompent, ne croyons pas une seconde qu’ils pourraient mener une autre politique parce qu’ils se disent de gauche et socialistes !

Après tant d’autres, l’affaire de la MNEF montre que l’argent coule à flots dans cette société. A flots, sauf pour ceux qui produisent les richesses, sauf pour les travailleurs ! Pourtant, cet argent, il est le nôtre, il a été gagné sur la misère des chômeurs, l’exploitation des salariés réduits au travail précaire et de ceux qui s’échinent pour des salaires de misère dans les usines et les bureaux. Alors, ne laissons pas les patrons et leurs larbins nous détrousser. Réclamons ce qui nous revient ! Ayons autant d’audace pour défendre nos intérêts collectifs qu’ils ont de cynisme pour défendre leurs intérêts égoïstes et ceux de leur classe de parasites ! C’est sur nos propres forces, notre unité, notre enthousiasme, notre révolte, que nous pouvons compter pour défendre nos droits et récupérer ce qu’ils nous volent !