éditorial


 

Pour ne plus faire les frais de la mondialisation et de la concurrence capitaliste, préparons-nous à demander des comptes et notre dû

Et un, et deux, et trois mille francs " réclamaient plus de 15 000 chômeurs, exclus, dans les rues de Marseille mardi dernier. Au même moment, à Metz, les mineurs des houillères du bassin de Lorraine se donnaient les moyens de faire entendre leur révolte par des actions déterminées contre la police et la préfecture. " Les mineurs ne demandent pas l’aumône " affirmait l’intersyndicale en réponse à la prime de 500 francs accordée par la direction pour unique augmentation de salaire. Les pompiers aussi ont eu des affrontements avec les flics. " Etat de légitime défense " scandaient le même jour les travailleurs des banques contre la remise en cause de leurs acquis et les menaces de licenciements. La semaine précédente, à travers tout le pays, se sont déroulés de nombreux conflits sociaux souvent provoqués par les négociations autour de la loi des 35 heures et de sa mise en application, mais aussi conflits pour des embauches, conflits parfois pour l’amélioration des conditions de travail, conflits aussi pour les salaires. De plus en plus nombreux sont les travailleurs qui tiennent à montrer qu’ils ne sont pas dupes, qu’ils ont compris qu’avec la loi des 35 heures, on les avait trompés et floués, et qui entendent exiger leur dû. Oui, pour tous les salariés, il y a état d’urgence.

C’est ce qu’expriment ces conflits et au-delà, le sentiment qu’il y en a assez que l’on se moque de nous, qu’il est inacceptable de voir tant d’argent s’accumuler, se gaspiller dans les hautes sphères de la société, alors que les travailleurs eux, voient leurs conditions d’existence se dégrader, parfois de façon dramatique. Les salariés qui rentrent en lutte expriment les sentiments de l’immense majorité d’entre nous, ras-le-bol de l’affairisme de haut vol comme de celui des petits politiciens, l’affairisme de tous ces privilégiés, petits et grands, qui affichent leur mépris de ceux qui n’ont pas d’autre solution que de gagner leur vie en travaillant pour la collectivité.

Dans les années passées, la pression du chômage, la pression des politiciens dits de gauche, alliée à celle des directions syndicales, leurs complices, n’ont pas réussi à empêcher notre résistance de s’exprimer. Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus nombreux à prendre conscience que ça ne suffit pas, qu’il faut aller plus loin, parce qu’il n’y a pas de limites à l’avidité de la petite minorité qui tient entre ses mains l’économie. Ce qui est à l’ordre du jour, c’est bien la préparation d’une riposte d’ensemble pour mettre un coup d’arrêt à l’offensive qu’ils continuent, patrons et politiciens, d’accord et complices, de mener contre la classe des salariés et toute la population.

Certains ont pu croire ou espérer que tous ces privilégiés sauraient avoir un minimum de reconnaissance à l’égard des travailleurs. Force est de constater qu’il n’en est rien. Nous n’avons, en réalité, aucune reconnaissance à attendre d’eux. La seule morale des classes privilégiées est l’égoïsme forcené de leurs intérêts privés, au mépris de ceux de toute la société. Le seul langage qu’ils comprennent, c’est le seul qu’ils savent parler, celui du rapport de forces. Ils ne respectent que la morale du profit et de la domination, ne craignent que la force. Chaque concession que nous acceptons prépare un nouveau mauvais coup.

D’un certain point de vue, patrons et financiers n’ont guère le choix. C’est tout leur système qui est en cause, le libéralisme économique, c’est-à-dire la mise sous tutelle de l’ensemble du monde par quelques centaines de multinationales, réparties dans quelques pays riches, opposées par la concurrence acharnée que les unes et les autres se livrent en prenant toute l’humanité et la planète en otage.

On nous parle beaucoup ces jours-ci de la réunion de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) qui se déroule à Seattle aux Etats-Unis, la ville de Boeing et du trust de Bill Gates, Microsoft, pour nous convaincre des nécessités de nous plier aux évolutions économiques que les politiciens et les journalistes osent nous présenter comme une " modernisation ", la mondialisation. Oui, les progrès techniques des dernières décennies sont une modernisation considérable, mais la petite minorité qui a le pouvoir de les utiliser ne les utilise que pour son propre compte. Voilà pourquoi ces merveilleux progrès se traduisent par un recul des conditions d’existence de l’immense majorité des habitants de cette planète.

C’est ça leur " modernisation ", plus ils investissent dans les techniques, plus ils rattrapent le coût de ces investissements par une dégradation des conditions de travail et des conditions de vie des salariés et des peuples.

Nous vivons dans un des pays les plus riches du monde, pourtant nos conditions de vie se dégradent et les filles et fils des travailleurs ont devant eux un avenir bien bouché s’il ne le prennent pas eux-mêmes en main.

Oui, il faut que les forces modernes, les forces de progrès, les forces démocratiques, c’est-à-dire le monde du travail, se fassent entendre, exercent leur pression, voire leur contrôle sur la marche de la société. C’est pourquoi on ne peut que se réjouir du succès des manifestations qui ont eu lieu samedi dernier, dans près d’une centaine de villes du pays, pour dénoncer la loi des multinationales. C’est pourquoi on ne peut que se réjouir aussi qu’à Seattle, les contestataires réussissent à rompre le consensus officiel.

Ce combat est le nôtre, c’est le combat de la population travailleuse contre le chômage et pour de meilleures conditions d’existence, notre combat pour faire respecter nos droits fondamentaux. Le 11 décembre, les organisations de chômeurs, le Parti communiste, Lutte ouvrière, la Ligue communiste révolutionnaire, appellent à manifester contre le chômage et pour l’emploi. A nous de faire de ces manifestations un succès préparant de nouvelles étapes de notre lutte.