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Meeting pour Mumia Abu-Jamal

Le Collectif de soutien à Mumia Abu-Jamal, qui réunit de nombreuses organisations qui réclament justice pour Mumia, organise à Paris un meeting afin " d’informer davantage les militants sur la mobilisation internationale, de définir de nouvelles actions et d’améliorer la coordination à l’échelon international de ces actions afin d’intensifier la mobilisation ".

Le collectif appelle à lutter pour la révision du procès et la libération de Mumia Abu-Jamal, l'abolition de la peine de mort, le respect des droits constitutionnels des prisonniers et la reconnaissance du statut de prisonnier politique.

Ce meeting se tiendra vendredi 10 décembre 1999 de 18 h à 22 h à l'annexe de la Bourse du Travail, 29 Bd du Temple, angle de la rue Charlot, (métro République) Paris 3ème.



Même partielles ou émiettées par les réformistes, les luttes actuelles contribuent à la prise de conscience et à la combativité du monde du travail et posent le problème des responsabilités de l’extrême-gauche

Impossible de faire la liste des conflits actuels. Chaque jour, la presse régionale témoigne de grèves plus ou moins médiatisées de quelques jours ou de plusieurs semaines, selon qu’il s’agisse de revendications salariales, de luttes contre la Loi Aubry, d’éviter un plan de licenciements. Le ton avait été donné dès la rentrée, et la rentrée a commencé tôt cette année, avec les éboueurs de Marseille, l’emprisonnement de José Bové, puis les licenciements chez Michelin. Lutte contre la R.T.T. mise à part, on y trouvait déjà les ingrédients des luttes actuelles qui traversent toutes les régions, toutes les catégories, les travailleurs des villes comme ceux des champs, cadres comme ouvriers ou chômeurs, le privé comme le public : la dernière grève de l’audiovisuel public agissant, comme souvent dans ce secteur, à la fois comme un témoignage et une chambre d’écho de la profondeur du mécontentement, et le légitimant auprès d’une grande partie de l’opinion salariée.

Malgré tout, bon nombre de militants, y compris autour de l’extrême-gauche semblent désarçonnés : les luttes sont partielles, personne ne parle du " Tous ensemble " et dans ce climat les directions réformistes de la CGT et du PC sont à l’aise pour émietter l’expression du mécontentement, la CGT avec sa journée du 30 novembre, le PCF avec la journée du 11 décembre, sans compter la multitude de journées d’action par secteurs.

En fait, les directions réformistes ont une réaction qui est à l’exact opposé des processus qui transforment à l’heure actuelle la conscience de millions de salariés. Travailleurs, chômeurs, précaires prennent conscience de l’oppression commune des forces du marché, des groupes financiers qui opèrent au sein de la mondialisation du capital ; et parallèlement, les attaques dans les services publics et l’application de la Loi Aubry créent une situation commune à de nombreux secteurs. La multiplication des " journées d’action " témoigne de l’inadéquation entre ce que proposent les directions réformistes et les travailleurs, comme de leur tentative pour éviter une convergence des luttes qui ne pourrait que prendre un tour antigouvernemental. Ce qui n’empêche que ces journées sont malgré tout des occasions à saisir. Evidemment, nul n’est dupe de leur capacité à faire céder les patrons et le gouvernement dans l’immédiat. Mais ce qui est en jeu en ce moment, c’est finalement bien plus.

Nous sommes dans une nouvelle étape de l’évolution à l’œuvre depuis 1995

 Des dizaines de milliers de travailleurs reprennent le chemin de la lutte, abandonnant au passage tout ou partie de leurs illusions, non seulement sur la politique des partis réformistes, mais plus généralement sur le capitalisme. Des travailleurs qui, il y a encore quelques mois pensaient que la Loi Aubry permettrait des embauches et améliorerait leurs conditions de travail confrontent promesses et résultats, comme en témoigne ce courrier envoyé par le personnel d’une clinique privée du Mans à Martine Aubry et paru dans Le Monde : " qu’en est-il du progrès social ? Qu’y a-t-il à attendre de votre loi sur la réduction du temps de travail qui ne fait qu’aggraver nos conditions de vie ? ". Ce genre d’évolution, ou le pompier de Rouen qui déclare : " les hospitaliers ont raison de se battre. Nous on amène les gens blessés à l’hôpital, eux les soignent. Partout il faut se défendre " (VDT n°116), est au moins aussi précieuse que des slogans " Tous ensemble " repris dans une manif. La réunion de la conférence de l’OMC à Seattle, et les manifestations conjointes de salariés, de jeunes et d’agriculteurs qu’elle a suscitées ont renforcé ce sentiment de subir une même oppression : celle du capital financier. Ce qui se passe aujourd’hui dans la classe ouvrière, c’est aussi le passage en revue des bataillons. Chacun se forme, s’aguerrit, adopte sa tactique et son programme.

Mi-défaites, mi-victoires, les combats actuels laissent tout le monde insatisfait, en découragent encore beaucoup, confortent d’autres dans l’idée que ce sont des combats de grande ampleur qu’il faut préparer, et permettent de juger qui est dans notre camp, qui ne l’est pas, qui est ambigu. C’est la condition nécessaire, mais pas suffisante, pour que les " Tous ensemble " de demain ne soient pas dévoyés, comme ceux du passé justement. Car que l’on parle de 1936, de 1968 ou de 1995, on ne peut pas dire que les résultats aient été à la hauteur des espérances, sans parler de la défaite politique de l’après 1936 avec la capitulation des forces du Front Populaire devant la droite réactionnaire. Quant à 1995, beaucoup de travailleurs, ceux du privé, n’ont regardé ce mouvement que de loin et leur dire aujourd’hui " qu’il faut faire comme en 1995 " n’évoquerait pour eux pas grand chose.

Plutôt que d’être doctrinaires des mouvements sociaux façon ceci ou façon cela, les militants d’extrême-gauche ont tout intérêt à regarder ces mouvements avec les lunettes du présent et du coup, à s’appuyer sur ce qui peut renforcer notre camp social. Par rapport aux exemples du passé, plusieurs conditions de la réussite sont en train de se former : la rupture avec les illusions réformistes et les liens qui se tissent entre militants du mouvement ouvrier, ce qui finalement participe d’une seule et même évolution. Que pouvons-nous faire pour accélérer, donner un cadre organisé à ces évolutions afin qu’elles contribuent à la préparation des luttes futures et nous permettent, plus largement, de renforcer la conscience et l’organisation de nos camarades de travail, de quartier, d’ANPE etc. ? Voilà les questions du jour. Nous les posions ainsi dans le VDT de l’après élections européennes (n°95) : " (…) dans ces relations de libre discussion, dans un débat que beaucoup ressentent comme une nécessité, dans la préparation des luttes, () nous pouvons tisser des liens de confiance. () En multipliant les occasions de rencontres et de discussions, () nous pouvons confronter nos idées, nos programmes, nos pratiques militantes. ". Une semaine plus tard, dans la tribune que nous leur proposions, les camarades de la Gauche Révolutionnaire-La Commune et de la tendance R ! de la LCR posaient le problème dans des termes similaires. La dernière conférence nationale de la LCR témoigne du fait que c’est l’ensemble de la LCR qui s’engage dans cette voie. Lutte Ouvrière, paralysée par son sectarisme et son opportunisme actuels, freine alors qu’elle aurait à jouer un rôle moteur et est pour beaucoup dans le relatif surplace des 6 derniers mois. Mais la perspective de l’intégration de VDT à la LCR, l’après 16 octobre et l’actuel frémissement des luttes sociales peuvent nous permettre de prendre les initiatives nouvelles, inédites, qui à la fois rassembleront les militants des luttes sur une base de classe et seront à même de convaincre les militants de Lutte Ouvrière de l’impasse politique dans laquelle les mène leur direction actuelle, freinant ainsi toute l’extrême-gauche dans sa capacité à prendre des initiatives utiles aux travailleurs qu’elle seule est en mesure de prendre.

Lucien Zigand

Elections cantonales partielles à Bordeaux, la politique et les petites manœuvres du PS sanctionnées par la progression du PC et la présence des révolutionnaires

Plus de 75 % d’abstention dans les deux cantons de Bordeaux où se déroulaient dimanche dernier deux élections cantonales partielles. Le grand perdant des ces élections est le PS.

Dans le 3éme canton, très à droite, le PS et les Verts avaient investi de leur soutien un candidat catalogué jusqu’alors divers droite. La combinaison n’était pas gagnante, puisque ce candidat très pluriel atteint un peu plus de 25 % des voix face à un candidat de droite qui réalise plus de 45 % des voix alors que le RPF de Pasqua-De Villiers enregistre un réel succès avec 13 % des voix. Le FN est ramené à 5 %. Notre camarade François Labrosse de la LCR que Voix des travailleurs soutenait, fait 1,19 % des voix. C’est le candidat soutenu par le PC et le MDC qui capitalise le mécontentement à gauche avec 7,73 % des voix, soit une progression de plus 3,5 % des voix. Le PCF soutenait, il faut dire, un candidat très en vue, Me Boulanger un des avocats de l’affaire Papon.

Dans le 1er canton, populaire, ancien fief du PS, ce dernier recule de 14 % alors que le candidat du PC recueille 19 % des voix, une progression de 3,5 %. Notre camarade Catherine Durin de la LCR que nous soutenions aussi a obtenu 2,08 % des voix.

Nous n’avons pas réussi à capter le mécontentement populaire à l’égard du gouvernement et du PS, à l’aider à s’exprimer en se dégageant de toute solidarité avec un parti gouvernemental. C’est son allié le PC qui en bénéficie, du fait de sa notoriété certes, mais aussi parce que nous n’avons pas réussi à donner au courant révolutionnaire une image suffisamment populaire, proche des travailleurs, une image de classe. Les candidats de la LCR, malgré leur score faible, ont œuvré à implanter nos idées dans les classes populaires.

YL

Cambadélis, un petit monsieur du Parti socialiste " conseilleur " d’un ancien homme de main d’extrême-droite…

Jean-Christophe Cambadélis, député et numéro deux du Parti socialiste, vient d’être jugé pour " recel de biens sociaux ". Il est soupçonné d’avoir perçu, entre mars 1993 et septembre 1995, près de 450 000 F de salaires injustifiés d’une filiale de l’Agence des foyers et résidences hôtelières (AFRP) qui gérait 35 foyers pour travailleurs immigrés et personnes en difficultés et dont le président, Yves Laisné, est un minable homme de main d’extrême-droite, ancien dirigeant du Front national dans les années 70. Laisné est lui-même accusé d’avoir utilisé les fonds publics versés à l’AFRP " à des fins personnelles " et à des raids spéculatifs alors que les comités de résidents des foyers qu’il gérait dénonçaient leur vétusté et leur insalubrité. Laisné avait d’ailleurs déjà été jugé pour " hébergement contraire à la dignité humaine " en 1996 et… relaxé.

C’est en 1993, après avoir perdu son siège de député PS et parce que, explique-t-il, il avait " une famille à nourrir " que Cambadélis, docteur en sociologie, a proposé ses services à Laisné qui devait alors faire face à la contestation de sa gestion. " Je donnais à Laisné des conseils d’image pour qu’il se défende sur un certain nombre de sujets. Il fallait qu’il modifie ses angles de vision, ses tics de langage qui venaient de sa propre histoire " explique-t-il. Ces " consultations orales " étaient données au cours de " déjeuners ou de dîners " précise ce petit monsieur habitué à " militer " dans des repas chics et à la note de frais. " J’étais payé 230 F par heure, je pense que je vaux un peu plus " ajoute-t-il modestement. Il aurait donc fait, si on l’en croit, un prix d’ami à ce Laisné dont il affirme avoir ignoré l’appartenance politique, ayant juste remarqué qu’il était " violemment anti com-muniste ".

Ancien militant après 1968 de l’organisation trotskiste OCI (qui deviendra plus tard le PCI), devenu administrateur de la mutuelle étudiante MNEF de 1976 à 1983 et président du syndicat étudiant UNEF-ID de 1980 à 1984, Cambadélis a acquis des mœurs de petit bureaucrate non au contact des idées trotskystes, bien au contrai-re, mais en les reniant, en les utilisant pour conquérir quelques positions d’appareil. Et quand, poussé par l’opportunisme, il a adhéré au Parti socialiste en 1986, il n’a eu aucun mal à se faire aux mœurs de l’appareil et il en a rapidement gravi les échelons, devenant un fidèle de Jospin. Entré au Comité directeur dès 1987, il a fait partie de l’équipe de campagne de Mitterrand en 1988 et était jusqu’à récemment considéré comme le numéro deux du parti.

Poussé par l’arrivisme, il se retrouve aujourd’hui sur le même banc des accusés qu’une médiocrité d’extrême-droite qui trafiquait sur le dos de travailleurs immigrés.

Carole Lucas