Retraites : Jospin voudrait faire mieux que Juppé



 

Contre les attaques sur les retraites : imposer nos revendications.
Dans le privé comme dans le public, les 37,5 annuités.

" La retraite à 60 ans a probablement vécu ", " elle est devenue impossible à financer ". Le 3 mars dernier, le MEDEF annonçait ainsi la couleur en s’apprêtant à discuter de la " refondation sociale ".

Les patrons et le gouvernement nous abreuvent de chiffres montrant la soi-disant impossibilité de financer les Caisses de retraite dans les années futures du fait du " papy boom ", comprenez l’augmentation du nombre de retraités, qui vivent de plus en plus vieux et profitent ainsi plus longtemps de leur retraite.

Ainsi, alors qu’aujourd’hui deux salariés actifs cotisent pour un retraité, il n’y en aurait plus qu’un en 2040. On nous dit aussi qu’en 2020, le régime des fonctionnaires civils accuserait un déficit de 30 milliards de francs. Et concernant le secteur privé, on nous annonce que dès 2015, le régime général comptera plus de retraités que de cotisants et que dans 40 ans, les prestations à verser pour les pensions seront de 34,5 % plus élevées que les cotisations. Bref, ce serait la faillite de tout le système et les retraités, " si rien n’est fait d’ici là ", se retrouveraient sur la paille.

Ce sont bien évidemment là des mensonges grossiers pour tenter de nous convaincre d’accepter les " réformes " en notre défaveur, alors que la solution au problème des retraites, est dans la suppression du chômage, l’augmentation des salaires de 1 500 à 2 000 F pour tous et le partage en faveur des travailleurs des formidables gains de productivité et des richesses ainsi créées.

Du travail pour tout le monde pour payer les retraites

Il y a aujourd’hui dans le pays quelque 6 millions de travailleurs, chômeurs, exclus, ou occupant des " petits boulots " (CES…) qui ne cotisent pas, ni aux caisses de Sécu, de chômage et bien évidemment de retraites. D’après B. Thibault, secrétaire général de la CGT, " chaque million de personnes en plus au travail, réduit de 80 milliards de francs le besoin de financement des régimes sociaux ". Il est donc urgent d’imposer aux patrons l’embauche de tous les chômeurs !

Augmenter les salaires pour remplir les Caisses des assurances sociales

Les Caisses de retraites sont alimentées par les cotisations sur les salaires des travailleurs en activité. Celles-ci représentent 16,35 % de la rémunération brute dans le secteur privé (6,55 % de part salariale, 8,2 % de part " patronale ", plus 1,6 % prélevé sur l’ensemble des salaires). Les cotisations dites " patronales " n’ont pas bougé depuis 1979 alors que les cotisations des salariés ont augmenté de 40 % !

Le blocage des salaires, la forte pression des patrons et de l’Etat pour faire reculer le niveau de vie des salariés, ont eu pour conséquence de diminuer les paies et du même coup de réduire les rentrées dans les Caisses de retraites. L’augmentation des salaires de 1 500 à 2 000 francs pour tous est plus que jamais une nécessité qu’il faut imposer.

Imposer le partage des richesses

En un siècle d’évolution, la productivité du travail s’est accrue considérablement. La production a été multipliée par dix avec un nombre de travailleurs qui n’a augmenté que de 20 % et un nombre d’heures de travail par personne presque divisé par deux ! Chaque heure de travail d’aujourd’hui est en moyenne 16 fois plus efficace qu’il y a 100 ans !

La production par personne a augmenté de 196 % entre 1949 et 1973 et de 60 % entre 1973 et 1998. Chaque heure travaillée a été aussi beaucoup plus rentable : + 222 % entre 1949 et 1973 et + 91 % entre 1973 et 1998 !

Comment croire qu’il faille encore reculer l’âge de la retraite alors qu’il serait normal au contraire de travailler moins longtemps puisque le progrès humain le permet ?

C’est que, si la productivité du travail s’est considérablement améliorée, les richesses générées ont été volées par la bourgeoisie pour son enrichissement alors que la part qui revenait aux travailleurs était de plus en plus maigre.

Imposer nos revendications en prenant sur la part des patrons

Ce sont ces richesses que nous devons récupérer aujourd’hui, pour assurer des salaires et des retraites décentes à tous les travailleurs.

Contrairement à ce qu’on veut nous faire croire, il n’y a pas de problème pour financer les retraites et revenir aux 37,5 ans de cotisation pour tous, dès lors que le chômage n’existe plus, que les salaires retrouvent un niveau normal par des augmentations de 2 000 francs mensuels pour tous avec le SMIC à 8 500 francs et que les richesses créées reviennent vraiment à ceux qui travaillent.

C’est cela qu’il faudra imposer à la bourgeoisie !

Michel Meunier

 

Jospin voudrait faire mieux que Juppé

Le mardi 21 mars, Jospin a annoncé spectaculairement ses " pistes de réformes " pour les retraites.

Il propose aux syndicats de fonctionnaires de négocier dans les mois qui viennent un " Pacte des retraites  ", dont la principale mesure est l’allongement à 40 ans de cotisations au lieu de 37,5 ans actuellement pour toucher une retraite pleine et entière ! Une telle mesure avait été repoussée massivement par les travailleurs par la grève générale de la Fonction publique en 1995.

Cela n’empêche pas Jospin de revenir à la charge.

Prudemment bien sûr ! Pour essayer de faire passer le mauvais coup, il se donne l’air de satisfaire une revendication des fonction-naires : tenir compte des primes (jusqu’à 20 % du salaire annuel d’un fonctionnaire) dans le calcul de la retraite. Mais il se garde bien de se prononcer pour l’intégration de ces primes dans le salaire de base, ce qui réglerait le problème définitivement ! Il dit aussi vouloir favoriser les choix de départ individuel en retraite des agents de l’Etat, mais cela ne lui coûte pas cher.

La presse a bien sûr relevé que Jospin " écartait la retraite par capitalisation  " et se prononçait pour le système par répartition et les politiciens de la gauche plurielle ont crié victoire. C’est oublier un peu vite que le Premier ministre a ajouté qu’il envisageait " d’aider les salariés par la mise en place d’instruments d’épargne à long terme, collectifs et négociés  "… qui pourraient bien demain servir de base à la création des fonds de pension " à la française  " !

Il a annoncé aussi que le Fonds de réserve des retraites, qui concerne tous les travailleurs, sera abondé à hauteur de 1 000 milliards de francs d’ici 2020 en prenant sur les excédents de l’assurance-vieillesse ainsi que sur des prélèvements sociaux sur les revenus du capital et des produits de la réforme des Caisses d’Epargne, comme actuellement. Mais rien ne dit que ces milliards promis seront jamais versés car ils reposent en partie sur une " prévision  " d’augmentation du taux de croissance de 3,5 % par an, et qu’ils ne se transformeront pas dans l’avenir en… fonds de pension d’Etat, alimentant avant tout la spéculation boursière et les profits financiers.

L’alignement de la durée de cotisation des fonctionnaires pour leur retraite sur celle du privé est présentée par Jospin comme une mesure d’équité entre les travailleurs. Egaliser les acquis par le bas est toujours la technique des exploiteurs et de ceux qui les servent. Jospin a le culot de dire aux travailleurs du secteur privé qu’il ne ferait pas d’allongement du temps de versement à 42,5 ans comme le préconisait le rapport Charpin. Il confirme par là que sa politique est la même que celle de Balladur ou plutôt une aggravation de celle mise en route par Balladur.

M.M

Rocard, Balladur, Juppé, Jospin, même combat contre les travailleurs

En avril 1983, l’instauration de la retraite à 60 ans, après l’arrivée au pouvoir de Mitterrand, avait été une manière de satisfaire une vieille revendication syndicale mais sans imposer au patronat de financer cette mesure sur ses profits. Depuis, tous les gouvernements se sont ingéniés à remettre en cause ce nouveau droit.

En 1991, Rocard, alors Premier ministre, ouvre le feu le premier en publiant un " Livre blanc " sur les retraites dans lequel il explique déjà que pour pallier la baisse du nombre des cotisants prévue en 2040, il faut allonger le temps de versement au-delà des 37,5 années nécessaires pour avoir une retraite pleine et entière et envisage, pour financer les retraites… les fonds de pension et l’épargne salariale en actions ! Le même Rocard impose le premier prélèvement de 1,1 % de la CSG sur les retraites…

En 1993, Balladur reprend hardiment… les idées de Rocard. A la faveur de l’été, il imposera sans coup férir son plan quinquennal qui prévoit, entre autres, l’allongement progressif du temps de versement des salariés du secteur privé de 37,5 ans à 40 ans. Il décide aussi que les pensions ne seront plus calculées sur les 10 meilleures années, mais sur les 25 dernières. Enfin, dans la même année, il décidera de supprimer l’indexation des retraites en fonction de l’évolution de l’indice d’augmentation des salaires moyens, pour ne plus retenir que l’indice INSEE. Mesure qui provoque rapidement un important recul du niveau des pensions.

En 1995, Juppé, Premier ministre de Chirac, voudra imposer aux fonctionnaires le même recul sur leurs retraites que celui imposé dans le privé. Mais il se heurtera à la grève générale de la Fonction publique et il devra remballer son plan.

En 1997, la gauche revient au pouvoir et montre qu’elle est tout aussi soumise aux ordres de la bourgeoisie puisque c’est Jospin qui aujourd’hui tente d’imposer aux travailleurs de l’Etat ce que ses prédécesseurs avaient tenté de faire sans succès. Rien ne dit qu’il réussira là où les autres ont échoué car les travailleurs, de plus en plus nombreux, comprennent qu’ils n’ont rien à attendre des politiciens de gauche comme de droite et sont décidés à lutter.

M.M.

 

L’avenir que les patrons nous préparent,
vivre chichement à la retraite,
n’est pas inéluctable

En 1995, 1,2 million de retraités devaient se contenter de 3 000 F par mois pour vivre et le pouvoir d’achat des retraites, tous régimes confondus, a déjà baissé de 1 % par an depuis 10 ans ! (Source L’Hebdo CGT).

Avec la loi Balladur-Veil, le taux de remplacement des retraites (le rapport entre la pension versée et le dernier salaire perçu) va baisser de 5 à 10 % si on ne revient pas à l’indexation des retraites sur l’augmentation des salaires moyens des actifs. Ainsi en 2035, la retraite mensuelle d’un Smicard ne serait que de 3 600 F d’aujourd’hui.

En 1994 et en 1996, une réforme de la même eau a été appliquée aux régimes de retraites complémentaires ARRCO et AGIRC pour 5 ans. En 2001, les salariés cotisants auront ainsi perdu chaque année 20 % de points de retraite !

Du fait de cette réforme, un salarié, né en 1960, qui aura cotisé 40 ans, verra sa retraite totale amputée de 2,5 %. Quant à l’évolution du taux de remplacement de la retraite pour la catégorie des ouvriers, il passera de 80 % en 1998 à 65 % en 2036 ; celui d’un employé, de 70 % à 57 % et celui d’un cadre moyen de 60 % à 45 % !

En rallongeant le temps de versement pour la retraite, les patrons ne cherchent pas à maintenir à tout prix les vieux travailleurs à la production, mais à diminuer les revenus de ceux qui, de toute façon, ne voudront ni ne pourront rester au travail du fait de leur lassitude ou de leur épuisement. Dès aujourd’hui par exemple, les patrons du privé disposent de moyens pour faire partir les travailleurs dès 55 ou 56 ans, soit à mi-temps, en " préretraite progressive " (PRP) ou à plein temps par " l’Allocation de remplacement pour l’emploi " (ARPE) et les remplacer par des jeunes beaucoup moins payés. Dans ce cas, il est tout à fait abusif de parler de " retraite ", il s’agit de licenciements, ceux qui partent de cette façon étant payés par la caisse de chômage, l’UNEDIC.

Ce que l’Etat et le patronat veulent mettre en place, c’est la baisse généralisée des revenus des retraités, qui devront se débrouiller en faisant des petits boulots au lieu de profiter de leur temps libre pour mener une autre vie sortie des contraintes de l’exploitation patronale.

La société capitaliste organise la vie de millions d’êtres humains en fonction de ses propres critères de rentabilité. Pressurés pendant leur vie active, les travailleurs vivent leur retraite comme un soulagement, mais très souvent aussi comme un temps d’exclusion de la vie sociale, pas toujours facile à vivre avec des pensions misérables.

Les marxistes révolutionnaires militent pour une autre société où cette coupure entre vie active et retraite n’existerait pas. Cela suppose bien sûr une autre organisation de la société où le temps de travail soit fortement réduit puisque partagé entre tous. La démocratie, à la base de la société future, ne sera pleine et entière que quand tous ses membres pourront jouer leur rôle et dire leur mot tout au long de leur vie. C’est pourquoi il ne sera plus question de " retraite " au sens d’aujourd’hui où c’est la seule façon de survivre quand on est âgé, mais simplement de vivre pleinement et en toute conscience toute sa vie sociale durant.

M.M