Jeter les bases d’un nouveau parti des travailleurs...



Jeter les bases d’un nouveau parti des travailleurs, c’est écrire la continuité de notre programme…

Comme ceux de Cellatex et d’Adelshoffen, souvent acculés, n’ayant pas d’autre choix, des travailleurs luttent pour sauvegarder leurs emplois, avec leurs moyens, sans illusions, avec une détermination d’autant plus grande qu’au même moment, patrons et gouvernement se vantent de la croissance retrouvée, de la baisse du chômage. Ces actions sont le signe d’une évolution importante des consciences. Ces forces éparses sont en train de changer le rapport des forces. Aujourd’hui sur la défensive, elles ont besoin d’une politique pour pouvoir réellement inverser le cours des choses, c’est-à-dire prendre l’offensive. La remontée des luttes qui se prépare a besoin d’une politique et d’un programme.

Au lendemain de notre exclusion de LO, en mars 1997, nous écrivions : " nous entendons (…) contribuer à ce que le mouvement révolutionnaire se donne les moyens matériels, humains, politiques pour nous préparer à une remontée du mouvement ouvrier. Nous voulons agir pour que se constitue le cadre nécessaire à la collaboration de tous ceux qui veulent participer à la construction du parti dont la classe ouvrière a besoin ". Toute l’évolution politique et sociale actuelle le confirme, nous sommes au début de cette remontée et les forces de l’extrême-gauche ont devant elles la tâche de jeter les bases de la force politique nouvelle indispensable. Cela suppose une politique.

Cette perspective passe par le regroupement des organisations d’extrême-gauche, mais aussi par l’ouverture la plus totale à tous les militants qui sont conscients de la nécessité de constituer une force capable de s’opposer au gouvernement et au patronat et prêts à s’y engager. Mais pour que ce regroupement puisse se faire, pour qu’il fonctionne, il faut que nous puissions dire aux personnes qui se tournent vers nous : " voici notre politique, voici pourquoi nous nous battons, voici nos objectifs ", et ainsi leur permettre de se reconnaître ou pas, comme des amis politiques. Il faut également qu’au sein du parti, chaque militant, chaque groupe, soit à même de tirer les enseignements de chaque combat, de construire son " bagage politique ", et pour cela dispose d’un cadre de référence dans lequel il puisse situer ses actions et évaluer leurs résultats. Pour toutes ces raisons, le parti, petit ou grand, a besoin d’un programme.

Après avoir été exclus de Lutte ouvrière, nous nous sommes attelés à la tâche d’écrire un projet de programme, " Pour un parti démocratique des travailleurs révolutionnaires (socialiste et communiste) ", destiné à notre propre usage militant, mais aussi à servir de base de discussion avec les autres organisations. Il a pu sembler prétentieux à certains qu’un petit groupe ait cette audace. Là n’est pas le problème. Chaque révolutionnaire qui veut réellement militer doit se donner les moyens de le faire. Ecrire un programme est une nécessité, une tâche militante comme une autre, qui demande de la lucidité sur ses propres forces et dans laquelle la fausse modestie n’est d’aucune utilité pratique.

Le programme de militants marxistes ne peut pas se donner pour objectif de trouver une réponse à tous les problèmes de la vie sociale. Destiné à servir de référence à notre action militante, il doit avant tout nous permettre d’élaborer une description suffisamment précise de la situation en cours pour que nous soyons à même d’anticiper sur ses évolutions probables, afin de nous fixer des objectifs politiques réalistes. Un tel programme s’appuie nécessairement sur le passé, sur la compréhension des enchaînements historiques, sur les méthodes et les façons de raisonner de nos prédécesseurs. Mais il ne peut pas être le calque des programmes du passé. Tenter de " coller ", par exemple, le Programme de transition, écrit par Trotsky pour la 4ème Internationale à la fin des années trente, sur la situation actuelle ne pourrait aboutir qu’à masquer la réalité, qu’à nous paralyser politiquement. Matière essentiellement vivante, le programme est à réécrire à chaque changement de la situation, à chaque nouveau pas en avant du parti.

Notre projet de programme fixait l’objectif urgent et immédiat du regroupement de ses diverses tendances dans la perspective de la construction d’un parti des travailleurs révolutionnaires. Un pas a été franchi dans ce sens avec notre entrée comme tendance au sein de la LCR, un petit pas et… comme nous le disions dans nos thèses pour le dernier congrès de notre organisation : " l’évolution politique et sociale met à l’ordre du jour comme une tâche urgente et immédiate le regroupement de toutes les forces du monde du travail qui veulent se constituer en une opposition de classe à la politique du gouvernement. Nous militons pour que ce regroupement se fasse sur les bases des idées vivantes du marxisme révolutionnaire, autour d’un programme se définissant dans la continuité des idées du socialisme et du communisme, programme de transformation sociale révolutionnaire dont nous avons voulu esquisser le contenu dans notre projet de programme. "

Eric Lemel

 

Offrir une alternative, c’est aider les opprimés à prendre la parole

Le capitalisme ne se contente pas de prélever son profit à travers l’exploitation des salariés. La situation sociale dans laquelle la logique du marché plonge toute la société fait que les catégories de la population les plus opprimées en font plus que doublement les frais. Depuis des années, avec leurs propres méthodes, en l’absence d’un mouvement ouvrier capable de leur offrir une perspective politique, ces catégories sociales ont su trouver les chemins de la lutte. Elles ont su dénoncer la situation qui leur était faite, accuser, revendiquer leurs droits, conquérir le droit à la parole que leur nie cette société.

 

Résultat de la dernière crise économique, des millions de travailleurs se sont retrouvés au chômage. Trimballés de stages en petits boulots, beaucoup ont dû et doivent encore se contenter d’allocations leur permettant tout juste de survivre, quand ils n’ont pas fini dans la rue, " sans domicile fixe ". A l’initiative d’organisations comme AC !, la CGT chômeurs, et d’autres, ils ont su vaincre leur isolement social et se battre, pour faire respecter leur dignité, affirmer leur droit à une vie décente et leur refus du statut d’exclus que les bonnes âmes ont tenté de leur coller. Mais leur combat est loin d’être terminé. Au moment où patrons et gouvernement se félicitent de la baisse du chômage et de la croissance, Seillières, avec la complicité de Notat, a pour projet de les forcer à accepter n’importe quel travail, à n’importe quel salaire, sous la menace du retrait de leurs allocations- chômage. Nous sommes loin d’en avoir fini avec le chômage.

Chassés par la pauvreté de leur pays, attirés par la richesse relative des pays européens, des centaines de travailleurs, africains, asiatiques, cherchent à franchir les frontières. Quand ils y réussissent, au risque de leur vie et en y laissant leur pécule, sans qualification professionnelle, ils deviennent les proies de patrons du bâtiment ou de la confection sans scrupules. Victimes d’autant plus faciles à exploiter qu’immigrés sans-papiers, ils sont soumis au risque d’expulsion, à la double peine, aux charters façon Chevènement. Privés de tous droits, ils n’ont pas eu d’autre ressource que de mener des grèves de la faim, souvent très longues, à la mesure de leur détresse et de leur révolte. Pour leur droit le plus élémentaire de vivre, pour tenter d’arracher au gouvernement de la gauche plurielle la régularisation de leur situation.

Les femmes ont une place bien à part dans ce monde malade. Dans une société basée sur la propriété privée, transmission de l’héritage des parents aux enfants oblige, elles sont les premières victimes de l’idéologie qui en découle. Dévalorisées dans leur travail, considérées comme inférieures aux hommes, elles ont dû se battre pendant des dizaines d’années de luttes pour le droit à la contraception et à l’IVG. Mais ces luttes sont à recommencer sans arrêt. A cause des réactionnaires hystériques qui organisent les commandos anti-IVG, bien sûr, mais surtout parce que, plus insidieusement, la société sécrète des pressions sociales telles qu’en France, les services pratiquant l’IVG ont du mal à recruter les médecins nécessaires et que certains sont fermés, faute de personnel. Actuellement, on peut voir, au nom de l’" éthique ", la socialiste Aubry tergiverser devant la possibilité d’allonger le délai d’intervention de 10 à 12 semaines pour l’IVG.

Si toutes les femmes sont victimes des mêmes discriminations, les conséquences pratiques en sont différentes selon leur situation sociale. Les plus aisées peuvent, comme par le passé, se payer des cliniques privées où avorter ; elles ont les moyens de se débarrasser des tâches domestiques et de la garde des enfants en payant des " employés de maison ". Il n’en est pas de même pour le commun des femmes travailleuses. Elles doivent souvent s’occuper des enfants et du ménage après leur journée de travail, ajoutant leur oppression de femme à celle de travailleuse, et beaucoup d’entre elles ont été touchées plus durement que les hommes par le chômage. Pire encore, dans quelques uns des pays les plus pauvres, mais aussi en Europe, dans certains milieux issus de l’immigration, sous la pression de la misère et en l’absence d’autres perspectives politiques, se développent des réactions religieuses qui se traduisent par un véritable esclavage domestique des femmes dont le port du voile, pour les femmes musulmanes, n’est que la partie la plus visible. Enfin, loin de s’atténuer, la conséquence la plus abjecte de la misère, la prostitution, se développe.

A travers leurs associations, chômeurs, sans-papiers, ont trouvé les moyens de rompre leur isolement. Le combat des femmes pour le maintien de leurs droits est animé par divers collectifs regroupant des militantes et des militants d’horizons différents. Autant d’encouragements pour tous ceux qui souffrent de l’exploitation à prendre la parole, dénoncer, accuser, s’organiser.

E.L.

  

En finir avec les fausses barbes du centralisme démocratique…

" Il ne peut y avoir une forme d'organisation immuable et absolument convenable pour les partis communistes. Les conditions de la lutte prolétarienne se transforment sans cesse et, conformément à ces transformations, les organisations d'avant-garde du prolétariat doivent aussi chercher constamment les nouvelles formes. Les particularités historiques de chaque pays déterminent aussi des formes spéciales d'organisation pour les différents partis. "
(Thèses sur la structure, les méthodes et l'action des partis communistes, troisième congrès de l'Internationale Communiste).

Voilà en quels termes les communistes révolutionnaires posaient la question des formes d’organisation des partis en train de se former au début des années 20. Nulle idée préconçue, nul dogmatisme, nul modèle !

Le stalinisme a caricaturé la pensée révolutionnaire faisant de tout un dogme, un modèle dans lequel il enfermait toute pensée, censurant par avance tout esprit critique. Tout obéissait à des règles
au nom du " marxisme léninisme ", toute pensée indépendante était par avance exclue. Pour imposer cette censure, Staline et les siens, comme leurs successeurs, ne se contentaient pas des règles, les règles n’étaient qu’un moyen de pression qui n’aurait guère eu d’efficacité si elles n’avaient eu comme alliée la violence sous toutes ses formes, y compris physique.

Les procès n’auraient pas suffi à eux seuls à décapiter, à briser le mouvement ouvrier sans les condamnations et les exécutions.

La discipline imposée par la bureaucratie a trouvé sa justification dans une formule vidée de tout contenu révolutionnaire, " le centralisme démocratique " dont la paternité reviendrait à Lénine. En matière d’organisation, comme dans tous les autres domaines, la pensée de Lénine n’a jamais été figée, surtout pas en une formule dont la déclinaison peut se faire de bien des façons. Entre la démocratie comme condition même de toute centralisation ou la réciproque, il y a une infinité de compréhensions concrètes de cette formule au point qu’elle a été tellement galvaudée qu’elle ne veut plus rien dire aujourd’hui. Ou plutôt, elle a pris un sens et un contenu dont les révolutionnaires ne peuvent que chercher à se dégager.

Cela ne veut pas dire que nous nous détournons du contenu qu’y donnaient les révolutionnaires. " Une centralisation formelle et mécanique ne serait que la centralisation du "pouvoir" entre les mains d'une bureaucratie en vue de dominer les autres membres du parti ou les masses du prolétariat révolutionnaire, extérieur au parti. Mais seuls les ennemis du communisme peuvent prétendre que, par ses fonctions de direction de la lutte prolétarienne et par la centralisation de cette direction communiste, le parti communiste veut dominer le prolétariat révolutionnaire. C'est là un mensonge et, de plus, à l'intérieur du parti, la lutte pour la domination ou un antagonisme d'autorité est incompatible avec les principes adoptés par l'Internationale Communiste relativement à la centralisation démocratique. " (Thèses sur la structure, les méthodes et l'action des partis communistes. Troisième congrès de l'IC)

Aujourd’hui, les révolutionnaires reprennent pleinement à leur compte cette façon de penser, tout en la mettant en œuvre dans un contexte nouveau.

Ne pas être prisonnier des formules

Cela signifie ne pas se contenter de formules toutes faites mais, à l’opposé, tout redéfinir pour nous donner les moyens d’accomplir nos propres tâches. Il s’agit de penser notre propre activité réelle, au lieu de se bluffer en invoquant des formules ou en prenant la pose. Prétendre se donner les structures d’une organisation visant à la prise du pouvoir quand on est un petit groupe, même de quelques centaines de militants, est au mieux du bluff au pire une imposture.

Trop souvent, dans le passé, nous avons été dupes de ces formules qui dominaient notre propre pensée et surtout notre propre activité coupée d’une classe ouvrière influencée par les préjugés réformistes.

Nous ne pouvons aborder sainement nos tâches organisationnelles qu’en discutant concrètement de notre situation réelle, de nos forces comme de nos objectifs. Voilà la façon dont nous formulions ce problème en avril 1997, en conclusion d’une brochure intitulée " La question du parti " : Nos buts actuels sont de diffuser le plus largement possible les idées du communisme, les conceptions marxistes, de faire pénétrer ces idées dans les milieux les plus larges de travailleurs, mais aussi dans les milieux de la petite-bourgeoisie intellectuelle.

Il serait ridicule de proclamer une fausse discipline formelle, qui n'est en général que le masque de la passivité et de l’irresponsabilité à laquelle une vraie discipline souple, tolérante, résultant des besoins et des tâches, est infiniment supérieure et plus efficace. Cette discipline n'est pas décrétée administrativement, elle résulte du travail nécessaire en fonction du développement du mouvement révolutionnaire. Sinon, la discipline comme les fausses barbes de la clandestinité, ne sont que les instruments d'un pouvoir sur les militants, un mode petit-bourgeois de gouvernement, des méthodes de direction qui s'apparentent à celles d'un chef du personnel.

La démocratie, comme ses indispensables corollaires, la discipline et la confiance, ne se décrètent pas. Elles reposent sur une participation quotidienne de tous aux tâches politiques y compris aux tâches d'élaboration au sens où aucune direction ne peut élaborer, concevoir une politique pour une fraction même minime de la classe ouvrière, sans la participation active de celle-ci.

De ce point de vue, la vie qui s'organise autour de la presse de l'organisation est le creuset où se fondent discipline et démocratie grâce à la confiance et où elles prennent un contenu vivant, concret, politique, vérifiable par chacun. C'est alors que la discipline apparaît concrètement comme le complément indispensable de la démocratie, la condition même de la démocratie. Cette presse, c'est d'abord et avant tout la presse d'entreprise, qui est en quelque sorte le modèle que reproduit à différents niveaux la presse en général d'une organisation ou d'un parti révolutionnaire, visant à associer militants, sympathisants, travailleurs du rang, à son élaboration, sa confection politique et technique, à sa diffusion comme à sa discussion, sa défense tant politique que financière.

C'est à cela que nous voudrions essayer de donner corps dans la mesure de nos moyens et avec tous ceux qui voudront nous y aider, pour peut-être demain créer un cadre qui permette dans la démocratie la plus large, dans une pleine transparence, de vérifier, de confronter les idées, les raisonnements et les hommes qui donneront naissance à un véritable parti ouvrier, communiste et révolutionnaire. "

A notre modeste niveau, nous avons avancé dans notre travail qui maintenant s’inscrit pleinement dans le cadre de notre nouvelle organisation.

C’est cette conception vivante, pratique de la discipline comme de la démocratie que nous voudrions mettre en œuvre pour aider notre organisation à accomplir la tâche qui lui incombe face à la remontée du mouvement ouvrier, redonner vie aux idées du marxisme révolutionnaire.

Yvan Lemaitre

 

Faire de la politique autrement,
c’est faire la critique la plus radicale de la société !

Il est fréquent d’entendre aujourd’hui des personnalités ou des courants politiques affirmer la nécessité de " faire de la politique autrement ". Ces affirmations sont la prise en compte d’une réalité nouvelle : le discrédit des formations politiques, reflet des illusions perdues sur la capacité des partis de gauche, Parti socialiste comme Parti communiste, à changer la société dans le sens des intérêts du monde du travail et de la population. A défaut d’une alternative révolutionnaire qui s’affirme largement, ce discrédit se traduit souvent par l’idée que les luttes menées, l’engagement pour la défense des droits des opprimés, ne peuvent être que dévoyés s’ils se placent sur un terrain politique et qu’ils sont alors utilisés à des fins électoralistes. Le sociologue Bourdieu - et d’autres avec lui - s’est fait le champion de cette " autonomie du mouvement social " à l’égard des organisations politiques.

Mais à elle seule, cette proclamation de " faire de la politique autrement " en refusant l’intervention des partis et des organisations politiques ne suffit évidemment pas. La revendication d’apolitisme n’a jamais protégé de la " récupération politique ", bien au contraire. Elle favorise plus sûrement les manœuvres en censurant toute discussion dès lors qu’elle est initiée par des organisations ou par des militants qui affichent leur combat politique.

L’autonomie du mouvement social " telle qu’elle est revendiquée aujourd’hui ne peut aboutir qu’au morcellement des mouvements de contestation et de révolte qui se sont manifestés ces dernières années et ne pas vouloir " faire de la politique " dans de telles conditions, cela peut se traduire aussi par le fait de ménager le gouvernement ou d’espérer le faire changer de politique en faisant pression " dans le bon sens ", ce qui est très politique !

Tout au contraire, les salariés ne peuvent défendre leurs intérêts que s’ils n’admettent aucune limite à la critique de la société, à la remise en cause de ceux qui la dirigent sur le plan politique et économique. Ce n’est pas avec la politique, - c’est-à-dire avec la nécessaire intervention dans tous les domaines de la vie sociale - qu’il faut rompre, c’est avec tous les calculs politiciens, les concessions aux illusions électorales, les appareils des partis de la gauche gouvernementale. Cela suppose de combattre pied à pied l’idée d’une possible amélioration du sort des travailleurs dans le cadre de ce système social, d’oser affirmer nos propres objectifs et définir une politique qui défende les intérêts généraux du monde du travail, qui remette en cause les droits de la propriété privée, la mainmise des bourgeois sur l’économie. C’est s’organiser à la fois pour défendre ces idées et mener les luttes nécessaires contre les mille aspects de l’exploitation. C’est donner l’objectif à ces luttes de changer la société, en faisant la critique la plus radicale qui soit de la société actuelle. C’est affirmer que l’on se place dans un camp social, affirmer la fierté de ce camp et lui donner confiance dans sa capacité à lutter et à changer la société, en l’aidant à s’émanciper de toutes les illusions et de toutes les pressions par lesquelles la bourgeoisie et ses porte-parole politiques tentent de nous empêcher de mener notre propre combat politique.

Jean Kersau

  

La jeunesse : le souffle du parti, l’avenir de la société

On a vu souvent, ces derniers mois, la jeunesse faire irruption sur le devant de la scène politique. Les mouvements lycéens de 98 et 99, les manifestations contre Seattle et plus récemment, la mobilisation de Millau contre la mondialisation, qui a été l’occasion d’un gigantesque rassemblement auxquels les jeunes ont massivement participé, sont le signe vivant de l’engouement et de la volonté de la jeunesse de jouer son rôle dans la vie politique et sociale. Dans cette société, les jeunes sont les plus touchés par le chômage et la précarité qui s’abattent violemment sur l’ensemble de la population et leurs perspectives d’avenir sont bien souvent réduites aux petits boulots, à l’intérim, bref, à l’incertitude la plus totale. C’est donc sur le terrain des luttes que les jeunes, lycéens, étudiants ou travailleurs, se retrouvent pour dire leur ras-le-bol de ce monde dirigé par la loi du fric, gouverné par des politiciens qui se fichent éperdument de leur sort et qui n’hésitent pas à leur balancer leur mépris à la figure quand ils descendent dans la rue pour dire à quel point ils sont en colère.

Qui pourrait s’étonner ensuite que les jeunes rejettent en bloc les organisations politiques traditionnelles ? Qui pourrait reprocher à la jeunesse de ne pas faire confiance à ces politiciens de tous bords, ces rapaces assoiffés de pouvoir qui se bagarrent pour des postes alors qu’une fraction de plus en plus grande de la population s’enfonce dans la misère pendant qu’une petite minorité s’en met plein les poches ? N’en déplaise aux gouvernants donneurs de leçons qui aimeraient mieux que la jeunesse soit sage et obéissante, la génération des 15-20 ans fait de la politique, elle agit, participe aux luttes, crie sa révolte et a bien l’intention de changer le monde.

Ce que veulent les jeunes, c’est du concret, de l’efficace, avoir l’impression que l’action change les choses, jour après jour : " Il vaut mieux agir que faire de grands discours ". L’humanitaire, l’écologie, la lutte anti-raciste par exemple, sont des domaines qui touchent particulièrement les jeunes et à travers lesquels ils pensent changer le monde, petit bout par petit bout, à défaut d’une autre solution, d’autres perspectives. Car ce sont ces perspectives qui manquent le plus à la jeunesse ; malgré des aspirations généreuses, une profonde volonté de faire évoluer le monde et de se battre contre les ravages de cette société, les jeunes se retrouvent bien souvent sans boussole, dans une impasse. C’est bien là que réside le rôle des révolutionnaires, donner des perspectives claires aux jeunes, les aider à nourrir leur révolte, leur donner confiance en eux pour que les idées de la révolution deviennent la principale arme de leurs luttes et de leur émancipation. La tâche n’est pas des plus aisées, mais gagner une nouvelle génération aux idées de la révolution, de la lutte contre la propriété privée qui génère tous les maux de cette société, est une priorité et un pas indispensable dans la construction du parti.

Les préjugés contre le communisme et contre la révolution ne sont pas si solides qu’on peut le penser chez les jeunes, qui n’ont pas connu toute la période d’opposition entre les blocs de l’Est -représenté par les dictatures " communistes "- et de l’Ouest -le monde de la " démocratie ". Quant aux vieilles guerres d’appareil, aux différents sectarismes dans l’extrême-gauche, bref, tout le vieux fatras, les jeunes n’en sont pas prisonniers : le passé n’a pas ce poids sur leur conscience et leur cerveau est ainsi plus libre pour le présent, pour les idées, pour la lutte.

A nous maintenant d’être capables d’offrir aux jeunes le cadre réellement démocratique auquel ils aspirent, celui dans lequel ils pourront militer et débattre librement, celui où les valeurs qui leur sont chères, la solidarité, le respect de chacun quels que soient son origine ou son sexe, s’exprimeront largement et quotidiennement. C’est à toutes ces exigences des jeunes et des moins jeunes que le cadre du parti devra répondre.

Les jeunes générations ont l’avenir devant elles et un monde à transformer, une organisation politique sans jeunes est destinée à s’éteindre. Nous devrons savoir attirer à nous un grand nombre de jeunes, accepter qu’ils nous bousculent, qu’ils nous transforment, qu’ils nous apportent des idées, qu’ils nous poussent à être moins timides. Le parti que nous voulons construire aura besoin de l’énergie et de l’audace de la jeunesse, de son esprit plus libre et novateur. Elle sera le souffle de nos prochaines luttes et de nos victoires.

Léa Prassi

 

Députés révolutionnaires au Parlement européen : un point d’appui pour le mouvement révolutionnaire

Les résultats des Européennes ont confirmé que les idées révolutionnaires défendues par la LCR et LO représentaient désormais un courant d’opinion significatif et durable, quatre ans après les élections présidentielles de 95 et après les élections régionales de 98.

C’est la première fois que l’extrême-gauche a, en France, des élus dans un scrutin national et cela contribue bien sûr à donner une crédibilité au courant révolutionnaire et une notoriété plus grande à ses porte-parole.

Alors que les révolutionnaires dénoncent les illusions électorales et qu’ils privilégient les luttes sociales et politiques comme moyen de changement de la société, il est paradoxal que ce soit à travers des élections que l’unité des révolutionnaires ait pris une réalité à l’échelle nationale et même au-delà. Mais s’il est regrettable que l’unité n’ait pu se faire que sur un terrain électoral, l’élection des députés révolutionnaires européens sur une liste commune a été un fait significatif et encourageant.

L’activité des députés révolutionnaires européens permet de faire la démonstration qu’au-delà de divergences bien normales entre deux courants qui ont des histoires différentes, il y a entre eux, face aux autres forces politiques et sur les sujets les plus divers, un accord sur l’essentiel. Et l’apparition commune d’Arlette Laguiller et d’Alain Krivine dans la manif des Michelin, par exemple, donne une réalité et un visage à la force politique révolutionnaire qui s’est exprimée à travers leur élection et les luttes sociales.

La parution du bulletin commun de l’activité des parlementaires européens témoigne de c