Ami(e)s et camarades lecteurs et lectrices
Ce numéro spécial est le dernier numéro du mensuel
" Voix des travailleurs ". Notre intégration-fusion avec
la LCR aboutit à larrêt de notre mensuel afin que nous
puissions prendre pleinement notre place dans la nouvelle organisation et
sa presse.
La compréhension de la période et des tâches que nous
décrivons dans ce numéro spécial définit les
perspectives telles que nous les voyons pour notre organisation, la LCR,
mais aussi pour tous ceux qui se réclament du marxisme
révolutionnaire et plus largement pour tous ceux qui veulent uvrer
à une renaissance du mouvement ouvrier. Nous voudrions nous situer
du point de vue des intérêts de lensemble du mouvement
révolutionnaire en nous considérant comme des militants de
ce parti dextrême-gauche qui sest affirmé lors des
dernières élections européennes, sans exclusive.
Ce numéro se veut linstrument dune discussion et nous
encourageons vivement lensemble de nos lecteurs à prendre une
part active, dynamique dans ce débat, à y apporter leur
expérience et leurs contributions.
La nouvelle force politique dextrême-gauche sera le résultat
de la convergence des initiatives de chacun.
Alors, camarades et ami(e)s, bonne lecture et bonne discussion, bonnes vacances
aussi pour ceux qui partent et rendez-vous à la rentrée. Voix
des travailleurs éditera alors un " bulletin du militant "
que vous pourrez vous procurer auprès de nos camarades.
A bientôt.
Les mois qui nous séparent des dernières élections européennes ont été des mois despoir puis de déception. Tous ceux qui ont soutenu les candidats révolutionnaires aux élections au Parlement européen, qui ont fait campagne avec eux, pour eux, attendaient quelque chose de neuf de ce succès important de lextrême-gauche que fut lélection de cinq députés révolutionnaires.
Cet espoir, celui dun pas en avant en rapport avec le succès, la plupart du temps ne se formulait pas concrètement, il était une attente plus quune volonté, et ce fut là sa faiblesse.
Lutte Ouvrière et la Ligue communiste révolutionnaire avaient conclu un accord électoral, aucune des deux organisations ne donnait à cet accord un autre sens, une autre portée, pas plus dailleurs que leurs deux minorités. Seule une pression venue den bas aurait pu imposer que ce simple accord électoral se transforme en un projet politique, cest-à-dire créer un cadre organisationnel et politique pour faire de la nouvelle force politique qui sétait exprimée électoralement une réalité militante.
Ce projet avait une politique, celle de lunité.
Il nen était pas question pour la direction de LO. Notre organisation, en réponse, navait pas la force, si elle en avait eu la volonté, dopposer au sectarisme de LO laudace dun projet unitaire. Il lui revient davoir gardé le cap de lunité et de continuer dans cette direction.
Notre tendance a soutenu cette orientation en travaillant à larmer dun projet, dune perspective globale.
Aujourdhui, la déception pèse devant léchec qui aboutit à la rupture pour les élections municipales. La responsabilité en revient à LO dont le cours sectaire est devenu le principal obstacle à tout pas en avant significatif de lextrême-gauche.
Seule une extrême-gauche unie serait capable de faire face, au mieux, aux nécessités du moment.
Le mouvement ouvrier est confronté à une situation nouvelle du fait de leffondrement du stalinisme, de loffensive libérale de la bourgeoise et, ici, de lintégration du Parti socialiste et du Parti communiste à la défense de cette politique hostile au monde du travail avec en corollaire, une soumission des organisations syndicales.
Mais il y a dans cette situation nouvelle un élément que personne navait prévu, le rapport de force change en faveur des travailleurs.
Loffensive libérale a dépassé ses propres objectifs, les inégalités se creusent chaque jour un peu plus, les profits ne savent plus où sinvestir si ce nest dans la folie du casino boursier. Le déficit budgétaire de lEtat sest transformé en " cagnotte " dont le gouvernement ne sait quoi faire de crainte de linvestir au profit de la population, des services publics et de lemploi en mécontentant un patronat dont lavidité ne connaît pas de limite.
Aujourdhui, léconomie tourne à plein, les travailleurs sont en position dexiger leur dû. Ce qui jusqualors les paralysait est en train de se rompre, la solidarité avec les partis de gauche dont il est clair quils nont rien à attendre.
Cependant, au moment où lheure est à loffensive, les travailleurs se retrouvent, pour une part, désarmés, sans politique ni direction, le plus souvent isolés.
La révolte des travailleurs de Givet lillustre, mais elle illustre aussi la capacité des travailleurs à rompre leur isolement, à vaincre les passivités syndicales, à défier patronat et gouvernement.
Il y a là une force capable de déjouer tous les calculs des uns et des autres.
Les travailleurs sont devant une contradiction, le rapport de force économique devient favorable à la généralisation des luttes, mais les directions des vieilles organisations, passées de lautre côté, au service de lordre bourgeois, isolent les luttes quand elles ne les combattent pas pour préserver leur dialogue avec le patronat. Le dépassement de cette contradiction est dans nos luttes et notre travail militant. Poussée par ses propres besoins, une nouvelle génération de militants va chercher des réponses, des armes politiques. Ces armes, cest lexpérience des luttes de classes passées, la capacité de comprendre la politique de son adversaire comme de ceux qui le soutiennent, afin de mener sa propre politique, en toute conscience et indépendance de classe.
Dans cette évolution, lextrême-gauche a un rôle déterminant à jouer. Nous sommes les seuls à posséder ce capital politique dont les travailleurs ont besoin, il nous faut le mettre à leur service et pour cela, nous situer sans réserve du côté des luttes les plus radicales, cest-à-dire celles qui ont clairement conscience que ce gouvernement est dans le camp de ladversaire, soumis à la défense de ses intérêts.
Jouer des contradictions des partis de la gauche plurielle, loin de signifier entretenir des illusions sur leur compte, exige, au contraire, de les mettre devant les conséquences de leur propre politique en exprimant la volonté et les droits des travailleurs.
Oui, il nous faut construire le parti des luttes.
La nouvelle force politique qui sest affirmée sur le plan électoral depuis 1995 est en train de devenir la force motrice des luttes en cours ou qui sont en gestation.
Les consciences des travailleurs évoluent bien plus vite que, souvent, les militants ne le croient. Les illusions réformistes seffondrent sous les coups de loffensive libérale, la confiance dans les partis de gauche se ruine sous les effets de leur duplicité, de leur suffisance comme de la cohabitation, une lucidité nouvelle arme la révolte, nourrit une volonté de lutte, voire une aspiration militante.
Cette force nouvelle deviendra une réalité militante par la fusion de lextrême-gauche et du mouvement social à travers les luttes tant sociales que politiques. Son programme sera celui de la nécessité du contrôle démocratique de la population sur léconomie et la marche de la société pour en finir avec les méfaits du capitalisme, cest-à-dire pour labolition de la propriété bourgeoise, le programme de la démocratie révolutionnaire.
Cette naissance saccomplira à travers la prise de conscience par les travailleurs de leur unité, de leur force comme de leurs droits, de leur légitimité à affirmer leur droit à exercer leur contrôle, à travers aussi la prise de conscience par chaque travailleur que sa propre émancipation, son propre épanouissement a pour condition son dévouement à sa classe et à la collectivité, seule voie pour en finir avec la dépossession de lui-même par les capitalistes comme par les politiciens ou professionnels du syndicalisme qui lui vantent, pour mieux le dominer, les mérites de lindividualisme, cest-à-dire la morale bourgeoise.
Notre tâche est daider à cette naissance.