éditorial



Notre profession de foi

Travailleuses, travailleurs,

ces élections anticipées convoquées à la hâte pour tenter de forcer l’opinion ne changeront rien pour nous. Chirac et Juppé craignent le mécontentement croissant de la grande majorité de l’opinion. Ils voudraient par leurs petites manœuvres politiciennes tenter de masquer leur discrédit. Ils voudraient faire approuver leur politique passée et avoir les mains libres pour cinq ans afin de continuer leurs mauvais coups. Profitons-en pour leur dire ce que nous pensons d’eux et de leur démocratie truquée.

Tous prêts à cohabiter pour servir les intérêts des riches

Dans cette campagne, les politiciens de droite et de gauche essaient de nous faire croire qu’ils défendent des politiques différentes. Juppé prétend lutter contre le chômage en réduisant les impôts et les charges patronales, Jospin prétend relancer la consommation. Mais en fait l’un comme l’autre feront ce que les patrons leur diront de faire. Tous ces politiciens se moquent de nous. Ils nous expliquent que demain ils s’attaqueront au chômage et qu’ils résoudront tous nos problèmes. Mais que ne l’ont-ils fait, les uns et les autres, lorsqu’ils étaient au gouvernement ? Qui peut encore les croire ? Leur démagogie électorale exprime tout leur mépris pour le monde du travail.

Toujours moins pour la collectivité, toujours plus pour les intérêts privés !

Juppé a fait du " moins d’état " son cheval de bataille. C’est une démagogie réactionnaire que de prétendre lutter contre le déficit budgétaire en licenciant les travailleurs de l’Etat, en réduisant la part qui revient aux services publics utiles à l’ensemble de la population alors que de l’autre main on subventionne à fonds perdus les profits. C’est s’en prendre aux intérêts de la majorité de la population pour défendre les intérêts privés des privilégiés. Et quoiqu’il en dise, Jospin, s’il venait au pouvoir dans l’ombre de Chirac, n’aurait pas d’autre politique puisqu’il refuse de s’en prendre aux classes privilégiés.

Les profits s’envolent parce que le chômage et la misère s’aggravent.

Cette politique des uns et des autres au service du patronat, plonge la société dans une véritable catastrophe. Douze millions de personnes n’ont que 3300 F par mois pour survivre. Le chômage et la misère ne cessent de croître entraînant des millions d’hommes, de femmes, de jeunes dans le dénuement, la détresse matérielle et morale, le désespoir et son inévitable cortège de violence.

C’est de cette misère comme de la dégradation des conditions d’existence de l’ensemble des travailleurs que se nourrissent les profits des capitalistes : en un an, les 25 plus grandes entreprises françaises ont multiplié leurs bénéfices par cinq ! Et ceux qui laissent croire qu’il est possible de s’attaquer à la lèpre du chômage et de la misère sans s’attaquer aux intérêts des actionnaires et des riches, des financiers, veulent nous tromper comme ceux qui prétendent qu’il suffirait d’abroger le traité de Maastricht pour que les choses changent.

Le recul de toute la société crée le terrain pour les pires aventures réactionnaires.

Le désespoir créé par le chômage et la misère est utilisé par les démagogues d’extrême-droite comme Le Pen pour tenter de dresser les victimes de cette politique les uns contre les autres, pour les détourner des vrais responsables de cette situation, les patrons et ceux qui les servent. Ils flattent les préjugés nationalistes et racistes, l’individualisme et le mépris des plus faibles. Mais ne soyons pas dupes ! C’est à tous les travailleurs qu’ils s’attaquent pour servir les intérêts des forts, des puissants, des riches !

Tous les politiciens prêts à cohabiter pour défendre les intérêts des patrons, préparent le terrain à Le Pen.

Ne soyons pas dupes non plus des déclarations des Juppé et Jospin qui se prétendent tous adversaires de Le Pen. S’ils critiquent Le Pen c’est parce qu’il est un concurrent politique pour eux. Mais ce sont de fieffés hypocrites de prétendre combattre Le Pen sans s’attaquer au chômage et à la misère, c’est-à-dire à la politique du patronat.

Nous nous adressons aux travailleurs, aux électeurs socialistes et communistes,

à vous qui aspirez à en finir avec cette politique révoltante de la droite comme avec tous les renoncements et capitulations de vos propres dirigeants qui ont par le passé mené la même politique qu’elle, comme ils s’apprêtent à le refaire s’ils viennent au gouvernement. Vous qui sincèrement voulez vous opposer au recul de toute la société dont vous êtes victimes, vous qui voulez faire barrage à la montée des idées réactionnaires défendues par Le Pen, vous ne pouvez plus faire confiance à ceux qui prétendent vous représenter.

Ils vous ont menti et trompés, ils recommenceront demain.

Ils dévoient vos aspirations comme votre dévouement aux intérêts collectifs pour mener leurs carrières de politiciens. Ils ne sont pas solidaires de vous, ne soyez pas solidaires de leur politique.

Nous nous adressons aux jeunes,

à vous à qui le seul avenir qu’offre cette société, est le chômage ou la galère des petits boulots, à qui l’on n’offre comme modèle que la réussite individuelle et l’égoïsme, vous avez une place à prendre pour agir afin d’inverser le cours des choses. Toute votre vie en dépend. Vous vous méfiez de la politique, mais c’est des politiciens dont il faut vous méfier car faire de la politique, c’est autre chose : c’est refuser que quiconque décide de votre sort sans vous donner les moyens de dire votre opinion. Faire de la politique, c’est prendre sa vie en main. Ce ne sont pas non plus les idées du socialisme et du communisme qui ont failli mais les hommes et les partis qui prétendaient les défendre !

Alors, ne soyez ni sceptiques ni cyniques, ni indifférents, prenez votre place pleine et entière dans la lutte du monde du travail. Face à la montée des idées réactionnaires, apportez votre énergie et votre enthousiasme dans le combat pour les idées de progrès.

Faisons entendre la voix des travailleurs,

celle qui correspond aux intérêts de la collectivité, de l’ensemble de la société. A la politique des patrons qui plonge la société dans une catastrophe sociale, nous devons opposer notre politique, mettre en avant la défense de nos intérêts.

Il faut s’en prendre aux profits des riches, à leur propriété privée.

Pour mettre un coup d’arrêt à la politique des patrons, il faut imposer notre contrôle sur l’économie, sur les comptes des entreprises et des banques, sur les fortunes des bourgeois. Contre le chômage, il n’y a pas d’autre solution que de s’en prendre aux financiers et aux riches, interdire les licenciements, contraindre l’Etat à consacrer les milliards de subventions donnés aux patrons à embaucher dans les services publics et imposer la répartition du travail entre tous, sans diminution de salaire.

La démocratie, c’est le contrôle !

La véritable démocratie, c’est que nous puissions contrôler le fonctionnement de la société, de l’économie, des banques, des entreprises. Cette démocratie-là, les politiciens en ont peur et les patrons n’en veulent pas parce qu’ils veulent cacher la vérité sur le fonctionnement de leur système.

Préparer l’avenir, c’est préparer nos luttes !

Aucun parlement, aucun gouvernement ne pourra réaliser ce programme là; seules les luttes et l’organisation de la population permettront de changer les choses. Les préparer aujourd’hui, c’est défendre les revendications de ce plan de défense que nous devrons imposer aux patrons.

Au delà de ces élections, si nous voulons peser sur la vie politique et sociale, il faut nous en donner les moyens. Que tous ceux qui veulent agir dans le sens des intérêts des travailleurs, rassemblent leurs forces pour constituer un véritable parti des travailleurs, des chômeurs, des exclus, des jeunes autour des idées du socialisme et du communisme. Ce parti qu’Arlette Laguiller avait appelé à construire au soir du premier tour des élections présidentielles de 1995, il naîtra inévitablement de la situation sociale et politique nouvelle qui est en train de se créer, à condition bien sûr que nous nous en donnions les moyens. C’est pour avoir défendu cette perspective que les militants qui se regroupent autour de " VOIX DES TRAVAILLEURS " ont été exclus de LUTTE OUVRIERE, leur organisation, par une direction qui ne va pas jusqu’au bout de ses idées et se replie sur elle-même dans une politique sectaire. Tout au contraire, nous pensons que la construction de ce parti est une urgence pour mener nos luttes, qu’elle ne pourra se faire que dans l’esprit de la plus large démocratie et de la plus totale transparence.

Travailleuses, travailleurs,

servez-vous de votre bulletin de vote, dites ce que vous pensez, faites-le savoir,

dites que vous n’acceptez pas le mépris de tous les politiciens pour le monde du travail,

dites que vous n’acceptez pas que votre vie soit soumise aux intérêts des financiers et des riches,

dites que vous n’attendez rien de ces politiciens arrivistes qui les servent,

dites votre confiance dans le monde du travail qui construira une société nouvelle à travers ses luttes et son organisation,

et si nous sommes nombreux à nous exprimer ainsi, cela sera le meilleur encouragement pour les luttes à venir.

Faites entendre votre voix, votez pour les candidats de

"Voix des travailleurs"

Leur programme, celui des patrons et des financiers, le notre, celui des travailleurs et des luttes

Une campagne courte, la plus courte possible, voilà ce que souhaitaient Chirac comme tous les politiciens. Tous sont pressés, pressés d'en finir, pressés de ne plus avoir de compte à rendre à l'opinion publique, y compris celle qui leur est favorable, à gauche comme à droite. Pressés de ne pas s'expliquer sur leur politique passée, sur les promesses reniées, les engagements trahis, de pouvoir faire ce qu'ils veulent comme ils l'entendent, en bon serviteurs des possédants, ce qu'ils appellent la France, leur France.

LEUR PROGRAMME, CE SONT LES PROFITS QUI L'ECRIVENT...

Tout le monde fait dans le flou se contentant de généralités indigentes. Il y a ceux qui vantent le libéralisme et ceux qui condamnent l'ultra-libéralisme et chacun comprendra qu'entre les deux la différence est bien mince, aussi mince que la différence entre Juppé-Jospin et Jospin-Juppé.

Les créations d'emploi ? Les uns comme les autres n'ont aucune réponse. La gauche veut créer des emplois en continuant d'innover dans la série des petits boulots, multipliant les formes d'emplois précaires, la droite veut alléger encore les charges des entreprises. Dans tous les cas de figure, tous ne savent que proposer une main d’œuvre bon marché. Cela ne résoudra rien puisqu’il n'y a pas de redémarrage de l'économie. Chacun a sa façon se propose de faire de nouveaux cadeaux au patronat. Le coût du travail continue de baisser pour la santé des profits.

Il ne coûte rien à Jospin de promettre "des services publics de qualité" ou autre généralité, puisqu' il ne prend aucun engagement clair concernant l'embauche. Cela suffit peut-être à lui donner un ton moderne face à la démagogie des Juppé et autres Madelin qui pour faire des cadeaux aux patrons et aux riches sous forme de diminution des charges ou des impôts veulent diminuer les dépenses publiques donc continuer de licencier des fonctionnaires.

NOTRE PROGRAMME, CELUI DES TRAVAILLEURS...

Pour enrayer le chômage et la misère, il suffirait pourtant de mesures simples dans l'intérêt collectif. Il est de l'intérêt de chacun comme de la collectivité d'inverser la répartition des richesses en faveur des classes populaires par une augmentation générale des salaires et des retraites. Au lieu de financer des spéculations financières qui exigent toujours plus de profits tirés de l'exploitation du travail, l'argent ainsi réparti entraînerait un redémarrage de la consommation donc de l'ensemble de l'activité.

Il est de l'intérêt de tous que chaque femme, chaque homme puisse trouver un emploi afin que le drame de l'exclusion ne brise pas des vies en engendrant désespoir et violence. Il suffirait pour cela d'abord d'interdire les licenciements et aussi d'organiser la répartition du travail existant entre tous les salariés sous le contrôle des syndicats et de représentants élus des travailleurs. Cela mettrait fin au drame de l'exclusion et permettrait de diminuer le temps de travail. Souvenons-nous qu'en Juin 36, les grévistes revendiquaient la journée de 40 heures. Nous en sommes loin aujourd'hui dans bien des branches alors que la productivité du travail a considérablement augmenté.

Il faudrait aussi imposer que l'argent des banques et des capitalistes soient investis dans la production pour satisfaire les besoins sociaux. Cela veut dire que les salariés puissent mettre leur nez dans les comptes des banques et des entreprises comme dans ceux de l'Etat et des collectivités locales.

Bien sûr cela veut dire ne pas respecter la propriété privée des capitalistes, c'est à dire leur droit à sacrifier les intérêts collectifs aux intérêts privés d'une minorité.

UN SEUL MOYEN, NOTRE MOBILISATION ET NOTRE ORGANISATION

Tous ceux qui laissent croire qu'il est possible par le bulletin de vote de transformer le rapport de force au point d'infléchir la politique des partis qui postulent à aller au gouvernement, mentent. Ils entretiennent des illusions qui détournent les travailleurs de la prise de conscience de la nécessité de s'organiser, de se mobiliser pour exercer notre pression de classe, par nos armes de classe. Et quand le Parti Communiste ou du moins ses dirigeants font mine de défendre face au PS les revendications minimum comme l'augmentation du SMIC, Il n'y a là que des surenchères électorales pour faire monter les prix, mais ces maquignonnages ne concernent pas les intérêts des travailleurs. Une fois au gouvernement, si on voulait d'eux, les futurs ministres communistes, feraient, comme leur prédécesseurs, ce qu'on leur dirait de faire contre la population laborieuse.

Pour faire pression, il faut que les travailleurs prennent conscience de la nécessité de s'organiser à la base, dans les entreprises et les quartiers. C'est là que peut se construire l'unité, de façon pratique et agissante.

En Angleterre comme en France l'alternance pour mieux nous tromper

Le raz-de-marée de députés travaillistes, le premier mai en Angleterre, a balayé John Major, le fils politique mal aimé de Thatcher, et sanctionné ainsi 18 ans d’une politique réactionnaire, anti-ouvrière.

Mais que penser de Tony Blair, le travailliste, comme s’appellent en Angleterre les socialistes ? Il n’est pas l’élu des classes populaires, même si celles-ci ont voté pour lui, mais il est d’abord l’élu des gens de la " City " comme on appelle à Londres le quartier de la finance. " Les milieux d’affaires ont joué Tony Blair gagnant " titrait le journal financier français " les Echos ". Ils ont fait plus que cela. Ils ont fait gagner Tony Blair en faveur duquel la plupart des journaux, même conservateurs, entre les mains des magnats de la finance, ont mené campagne.

Les milieux de la finance espèrent ainsi gagner du temps en agitant un faux espoir de changement.

En Angleterre, depuis plus de 10 ans, la machine à fabriquer des centaines de millionnaires d'un côté et des millions de chômeurs de l'autre, a fonctionné à plein régime. L'an dernier, la richesse des 500 plus grosses fortunes a encore grimpé de 23%. Pendant ce temps, le chômage frappe près de 5 millions de britanniques, 15% de la population, selon les critères du Bureau international du Travail. Les " jeunes loups " de la "City" empochent des centaines de millions de francs par mois, pendant que les jeunes des quartiers ouvriers, quand ils ont un emploi, sont payés moins de 20F de l'heure.

Dans ces conditions, pour les capitalistes anglais, il peut être utile de renouveler le personnel politique. Ils jouent donc la carte de la gauche.

C’est à ça que sert l’alternance, en Angleterre comme en France. On vend l’illusion du changement pour masquer la continuité politique au service du patronat et de la finance.

D'ailleurs, une des premières mesures annoncées par le nouveau gouvernement de Tony Blair est révélatrice. Il a menacé de supprimer les aides sociales aux jeunes chômeurs qui n’accepteraient pas n’importe quel petit boulot pour un salaire de misère. Voilà pour les travailleurs. Et dans le même temps était annoncée une hausse des taux d’intérêt, c’est à dire une meilleure rémunération des revenus du capital, voilà pour les patrons et les riches.

Dans l’opposition, ces politiciens qui se disent de gauche sont incapables d’exercer la moindre pression dans le sens de la défense des intérêts populaires sur le gouvernement en place, et pour cause, ils n’ont pas d’autre politique à proposer. Et quand ils arrivent au gouvernement, ils font bien évidemment la même politique que leurs prédécesseurs. On change les tapisseries, mais tout reste pareil.

Ils savent se reconnaître entre eux. Ici, le succès de Tony Blair a suscité la même adhésion de Juppé que de Jospin. L’un se félicite de ce "socialiste tourné vers l’avenir", l’autre rêve qu’il pourrait lui arriver la même chose. Et la droite d’ironiser sur la preuve par Tony Blair qu’il n’y a pas d’autre politique possible que la sienne. Elle a raison. Du point de vue des intérêts de la bourgeoisie, il n’y a pas d’autre politique que celle qui consiste à prendre toujours plus sur la part des richesses qui revient aux salariés pour alimenter les profits.

A l’opposé, du point de vue des intérêts de toute la population, il n’y a qu’une autre politique possible, réellement différente, capable de mettre fin au chômage : c'est de prendre sur leurs profits.