Le programme emplois pour les jeunes : de la poudre aux yeux
Le gouvernement voudrait nous faire croire à sa volonté de lutter contre le chômage alors qu'il laisse faire tous les plans de licenciements, alors qu'il a approuvé des fermetures d'entreprises comme celle de Renault Vilvorde, alors qu'il orchestre les suppressions d'emplois dans la Fonction Publique. A côté de cela, que pèse le programme de création de 350 000 emplois pour les jeunes dans le secteur public lancé par Martine Aubry ? Il apparaît comme bien dérisoire en regard des cinq millions de chômeurs dans le pays.
Et comme si c'était encore trop, ils sont étalés dans le temps, sur trois ans. Martine Aubry s'est déclarée heureuse si elle obtient 10 milliards pour financer 100 à 150 000 emplois dans les entreprises publiques en 1998. Quant aux 350 000 autres à créer dans le secteur privé, cela est repoussé à la conférence sur les salaires et l'emploi fin septembre. Il n'est pas question pour le gouvernement bien sûr de demander un centime aux patrons, de les contraindre à investir pour créer des emplois, de leur interdire de licencier.
Non, c'est à l'Etat de payer, c'est à dire à nous les contribuables. Ces jeunes seront rémunérés au SMIC avec un financement de l'Etat de 80 %, charges comprises, les 20 % restant relevant des collectivités ou associations. Les moins de 26 ans pourront bénéficier d'emplois à durée déterminée ou indéterminée, même pas de garantie d'emploi fixe. La précarité continue : pas question pour eux de statut de fonctionnaires !
Les associations ou collectivités utilisent depuis longtemps toutes les possibilités d'emplois précaires. Combien d'emplois ont été supprimés dans les écoles, les cantines scolaires, les communes, les collèges, les hôpitaux pour les remplacer par des CES par exemple ? Et comme le déclarait le sénateur-maire socialiste, Gérard Delfau : " Je ne vois pas comment en tant que maire, je ferai cohabiter des postes de CES à mi-temps et donc rémunérés à un demi SMIC avec des emplois créés spécialement pour les jeunes de moins de 25 ans et qui percevront, eux, l'équivalent du SMIC... "
Dans le meilleur des cas, on assistera à un tour de passe-passe qui consistera à transformer des emplois précaires, sous contrats déjà existants en emplois déclarés nouvellement créés pour les jeunes, pour les besoins du communiqué.
Personne ne croit que de telles mesures dérisoires et démagogiques pourront résoudre le problème urgent et crucial du chômage. Les jeunes ne peuvent pas voir un espoir de ce côté-là.
S'ils veulent préparer leur avenir, ils doivent comme le reste des salariés préparer les luttes de demain.
Un budget contre les travailleurs
Les grandes lignes du budget 98 ont donc été arrêtées par Jospin cet été. Les dépenses budgétaires sont limitées au pourcentage prévu dinflation, cest à dire quelles naugmenteront pas en francs constants dune année sur lautre. Il sagit pour Jospin et son gouvernement de se situer dans la continuité des gouvernements précédents. " Des ministères vont découvrir laustérité socialiste " ironise " Le Figaro ".
Ne pas augmenter le budget de lEtat, cest faire en sorte que pas un sou de plus ne soit consacré au logement, à la santé, à lEducation, aux équipements collectifs, à la création de postes de fonctionnaires. Cest renoncer à prendre en compte les besoins de la collectivité. Cela veut dire que dans des secteurs où le manque de personnel est flagrant, comme les hôpitaux, la SNCF, la Poste, lEducation nationale, les budgets ministériels ne permettront pas de créer des emplois en plus, que les équipements et les infrastructures nécessaires ne seront pas créés.
Un budget véritablement destiné à améliorer la vie de la collectivité et notamment des travailleurs et des plus démunis, augmenterait les dépenses consacrées aux équipements collectifs, à la création demplois utiles pour la population, aux aides sociales. Pour financer de telles dépenses, il faudrait mettre fin au parasitisme de la bourgeoisie qui fait des intérêts payés par lEtat aux organismes financiers, le " service de la dette ", le deuxième poste de dépenses de lEtat. Il faudrait par le biais de la fiscalité faire rendre gorge aux actionnaires et aux grandes fortunes.
Le projet de budget de 98 prouve quon ne peut attendre de telles mesures dun gouvernement tout acquis à la défense des intérêts de la bourgeoisie et qui continuera à imposer austérité et sacrifices à lensemble des couches populaires.
Le rapport Weil : de nouvelles attaques contre les droits des immigrés
Durant la campagne électorale, le Parti Socialiste avait pris lengagement dabolir les lois Pasqua et Debré. Mais il semble que même cette promesse, Jospin ne la tiendra pas. Le rapport Weil se place dans la continuité de tous les projets de loi précédents. Debré ne sy est pas trompé : " ce rapport, à part le problème du droit dasile, va tout à fait dans le sens de la loi que jai fait voter en 1997 et qui a été critiquée par le PS ". En effet, le rapport Weil, sil remet en cause certains des aspects les plus réactionnaires des lois Pasqua-Debré, renforce larsenal répressif contre les immigrés dans dautres domaines.
Ainsi, le rapport Weil propose que la nationalité française soit accordée aux enfants nés en France de parents étrangers. Un titre de séjour pourrait être obtenu sur la base " du respect de la vie privée et familiale " - mais dans des conditions très restrictives. La venue en France " des élèves ayant étudié dans des lycées français à létranger " serait facilitée et le droit dasile élargi par la création de la catégorie de " combattant de la liberté " qui permettrait de prendre en compte les persécutions comme celles infligées par les intégristes en Algérie.
Mais ces assouplissements saccompagnent dun renforcement de la répression concernant les plus pauvres et notamment les " travailleurs non qualifiés " à qui " la porte de limmigration doit rester fermée ". Le rapport préconise que la chasse aux " clandestins " par les organismes de Sécurité sociale soit systématisée. Les délais de rétention pour les immigrés sans papiers - actuellement fixés à dix jours - seraient allongés à quinze jours. Et une " triple peine " serait mise en place. Non seulement, le condamné serait tenu deffectuer sa peine avant dêtre expulsé, mais pour rendre cette application effective, un délai de rétention supplémentaire dun mois serait institué. Pour obtenir un emploi, il ne serait plus seulement demandé à un travailleur immigré de fournir un titre de séjour mais également son passeport. Le rapport Weil accentue aussi le contrôle sur les mariages entre français et immigrés. Auparavant la carte de résident était délivrée un an après le mariage, ce délai serait doublé et des convocations à la préfecture des deux conjoints seraient instaurées pour juger de la réalité de leur vie commune.
Non seulement le rapport Weil ne préconise pas labrogation des lois Pasqua et Debré mais il accentue certaines dispositions répressives et en ajoute dautres ! Il sagit, à travers ces mesures, de présenter une nouvelle fois les émigrés comme boucs émissaires dune situation sociale dont les possédants ont lentière responsabilité.
Sur ce terrain, le gouvernement ne sera pas quitte aux yeux de la droite et de lextrême droite. Lune et lautre ne manqueront pas lors du débat parlementaire daccuser la gauche de " laxisme ". Et en se plaçant sur le terrain de la lutte contre limmigration, le gouvernement de gauche ne fera, une fois de plus, quamener de leau au moulin de Le Pen et des pires adversaires des travailleurs.
Marseille : le mal des cités ? Non, le mal d'un système qu'il faut supprimer
Mercredi 13 août, Yves Radion, 35 ans et père de quatre petites filles est mort sur le trottoir d'une cité des quartiers Nord de Marseille, tué par une bande d'adolescents de 15 à 17 ans. Il avait tenté de dissuader ces jeunes de brimer sans cesse son frère Lucien, qui est handicapé mental. Le fait est révélateur d'une situation qui s'est terriblement dégradée ces dernières années dans certaines banlieues populaires. Une amie d'enfance de la victime a déclaré au journal Libération qu'il y a 27 ans quand Yves Radion est arrivé dans cette cité " le quartier était calme ". " La plupart des gens qui habitaient là étaient des cheminots, comme le père d'Yves. Tout autour, c'était que des gens pas riches, mais on se respectait ".
Seulement depuis la crise de l'économie capitaliste a produit ses ravages, jetant nombre d'habitants au chômage, provoquant démoralisation et dégradation des relations avec les voisins et au sein des familles. La folie d'une économie expulsant toute une partie de la population de la possibilité d'exercer un emploi stable pour sauver les profits, cette folie a commencé à contaminer en profondeur la vie sociale des cités populaires où " on se respectait ", on s'entraidait et parfois on luttait ensemble. Aujourd'hui, face à des gestes d'une telle inconscience et d'une telle barbarie, on se demande quelle logique est à l'uvre. C'est une logique sociale, celle qui obéit à la loi de la jungle, la loi fondamentale du capitalisme, celle des plus forts contre les plus faibles et qui corrompt la conscience des opprimés.
A la dégradation de la vie quotidienne des travailleurs dans bien des banlieues s'ajoute un danger politique qui peut devenir mortel. Les politiciens du Front National rodent alléchés par tous les drames qui frappent les milieux populaires. A Marseille ils ont tenté d'exploiter la marche de protestation de la famille d'Yves Radion et de ses amis contre le malheur qui les a atteints. Cette fois les bourgeois du Front National n'ont pas pu caser leur camelote car ils ont été rejetés par des proches de la victime et on ne peut que s'en réjouir. Mais ils reviendront inlassablement pour exploiter les failles, les faiblesses de ceux qui, dans les calculs du Front National, finiront bien par être aveuglés par leur rage impuissante et basculer de leur côté. Face à ce danger, les travailleurs les plus conscients ne peuvent se contenter de haïr l'extrême-droite et de ne pas tolérer la présence de ces notables. Cela seul ne pourrait pas changer la situation ni le rapport des forces. Par contre ils doivent redonner espoir autour d'eux en définissant des objectifs conformes aux intérêts de la classe ouvrière, tout en construisant l'instrument politique pour imposer de tels objectifs.
" Mir " victime du délabrement de l'économie russe
La station russe " Mir " continue à connaître une série noire puisque le 18 août, cest lordinateur de bord qui est tombé en panne.
Depuis plusieurs mois, une accumulation dincidents, (incendie à bord, coupures délectricité, jusquà la collision avec un vaisseau de ravitaillement et la dépressurisation que cela a causé), focalisent lattention sur la station " Mir ".
Cela met en évidence que ce qui paraissait presque banal, depuis dix ans que cette station est lancée dans lespace, relève véritablement de lexploit scientifique et humain.
Quelques 65 000 orbites autour de la terre après son lancement, les cosmonautes arrivent à continuer le programme spatial malgré les avatars de ces derniers mois. Et les incidents sont plus la conséquence de ce qui se passe sur terre, en Russie, que de la responsabilité des cosmonautes. Létat de délabrement dans lequel sombre léconomie russe est dû à la mise en pièces de l'économie planifiée par la bureaucratie au pouvoir. Il nest en effet pas sans conséquence dans le domaine spatial. Car faute de moyens et de matériel, cest par des rafistolages permanents que la station " Mir " survit.
La conquête de lespace, qui a été le fleuron de la recherche soviétique, en paie les conséquences comme le souligne Tsibliev- le commandant de la station revenu sur terre le 14 août dernier : " Les accidents et les problèmes de " Mir " sont la conséquence de ce qui se passe sur terre, de notre économie, de notre corruption, de nos vies misérables. Il nest pas possible deffectuer des ravitaillements, de transporter des pièces de rechange. Même léquipement dont nous avons besoin à bord et que nous avons demandé, je ne parle pas simplement du café, du thé ou du lait, nexiste pas à terre. Les usines ne fonctionnent pas ou alors exigent des prix délirants ".
Le président de la Russie, Boris Eltsine, a beau jouer les matamores en accusant Tsibliev dêtre responsable des différents problèmes de la station " Mir ", cela ne peut masquer la réalité, il a besoin dun lampiste. Eltsine est dautant plus virulent que les enjeux économiques, stratégiques et militaires sont imbriqués.
LEtat russe a été obligé de fonder une nouvelle base " Svobodny " en Extrême-Orient russe car la célèbre base de Baïkonour se situe dans un territoire étranger maintenant au Kazakhstan, du fait de l'éclatement de l'URSS provoqué par la bureaucratie avec Eltsine à sa tête.
Eltsine tient à maintenir le domaine aérospatial à un niveau compétitif parce quayant hérité de la plus haute technologie, de lextrême fiabilité de lindustrie spatiale soviétique, il a en vue de les recycler dans le domaine civil : le lancement de satellites commerciaux par exemple, ce domaine civil qui est la proie des affairistes qui pillent délibérément les richesses de la Russie.