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Les grandes manœuvres des ennemis du peuple algérien

Ces dernières semaines, l'Algérie connaît une escalade dans l'horreur : les massacres de civils se succèdent, visant à chaque fois des travailleurs, des femmes et des enfants des quartiers populaires ou des villages pauvres. Deux cents personnes ont été massacrées à Benthala, dans la banlieue d’Alger dans la nuit du lundi 22 septembre, massacre revendiqué depuis par les islamistes du GIA. Le quartier Benthala fait partie de ces quartiers sous haute surveillance de l’armée depuis que ses habitants ont presque tous voté pour le FIS en 1991. Les intégristes massacrent sans état d’âme ceux qui dans les classes populaires se sont laissés attirer par leur démagogie. Les routes qui mènent à ce quartier sont barrées par des soldats, appuyés par un blindé ; on ne peut y rentrer ou en sortir sans être contrôlé ; un campement militaire y est même installé. Et pourtant, c’est bien dans ce quartier que plusieurs dizaines d’assassins, arrivés en camions, ont pu agir impunément durant toute une nuit. L’armée a laissé faire délibérément les massacres par les intégristes parce que ceux-ci ne peuvent que renforcer la terreur de la population nécessaire à toute dictature. Ce week-end encore, plusieurs dizaines de personnes, dont onze institutrices devant leur classe et des ouvriers du bâtiment, ont été égorgées dans le sud du pays. Pour les masses pauvres algériennes, c'est la continuité dans l'horreur.

Ce n'est pas l'annonce par les dirigeants islamistes de l’AIS (Armée Islamique du Salut, bras armé du FIS) d'un cessez-le-feu à partir du 1er octobre qui peut changer quoi que ce soit au sort de la population algérienne. Les tractations entamées depuis plusieurs semaines entre l’état-major de l’armée algérienne et les dirigeants de l’AIS semblent donc avoir abouti. En position de force, l’armée algérienne propose à l’AIS de stopper ses attaques contre elle en échange d’une part, d’une probable intégration des groupes armés de l’AIS dans son sein et d’autre part d’un partage des rôles pour soumettre la population. A la dictature militaire viendrait se rajouter, comme c’était de fait déjà le cas sous la dictature du FLN, l’encadrement de la population par les intégristes, bénéficiant désormais de l’appui de l’appareil d’Etat.

Cela n’étonnera que ceux qui disent hypocritement que l’armée algérienne est le seul rempart contre les intégristes, comme si l’armée avait pour but de protéger la population, alors qu'elle est par nature l’ennemie des masses pauvres algériennes qu’elle maintient sous une féroce dictature.

Si les dirigeants intégristes ont toujours comme objectif d'accéder au pouvoir, il est de plus en plus évident que les groupes armés qui se disent intégristes se transforment en groupes mafieux commettant des massacres pour leur propre compte. Ainsi, le projet de privatisation des terres agricoles détenues jusqu'alors par l'Etat aiguise les appétits des gros importateurs, de leurs mandataires et des grossistes. Ils ont l'intention de faire main basse sur les terres les plus fertiles du centre et de l'ouest du pays. C'est précisément dans ces régions, celles de la Mitidja et de Blida que les commandos intégristes payés par eux ont commis les tueries les plus importantes ces derniers temps pour faire fuir la population et l'empêcher d'acheter des lopins de terre. Les chefs de l'armée n'ont aucune raison de rester à l'écart de ces opérations fructueuses.

La même logique de profit explique que les seules zones vraiment protégées par l'armée soient les zones de production de pétrole et de gaz, que d'ailleurs les intégristes se sont bien gardés d'attaquer jusque là. C'est la même connivence pour défendre les intérêts des trusts d'hydrocarbures et en faire payer le prix à la population.

La bourgeoisie française, qui a des intérêts dans le pétrole et le gaz algérien, se moque éperdument du sort de la population algérienne. Son représentant, Jospin, a montré tout son mépris à l'égard des victimes algériennes lors de son passage à la télévision le lundi 29 septembre : "là où je suis, je dois penser aussi aux Français". Ce mépris se traduit dans les faits pour les Algériens fuyant les massacres par de grandes difficultés à obtenir un visa pour la France. Le peuple algérien ne peut attendre aucune trêve de ses ennemis qu'ils soient militaires, intégristes, capitalistes français ou gouvernants français.

Il y a urgence à se donner les moyens politiques de combattre le Front national

Dimanche dernier, le candidat du Front National à l’élection cantonale partielle de Mulhouse a été élu avec 53,6 % des voix, battant au second tour son adversaire du Parti Socialiste de plus de 420 voix. Ce nouveau point marqué par l’extrême-droite montre avec quelle rapidité le Front National peut récupérer le mécontentement suscité par la politique du gouvernement, dans une situation où n’apparaît aucune force s’opposant clairement à sa politique dans le camp ouvrier. C’est bien ce que ses dirigeants ont compris en lançant une offensive sur tous les terrains pour attirer à eux non seulement l’électorat traditionnel de la droite, mais aussi celui populaire et même ouvrier des partis de gauche qui ne peut que se sentir trahi une fois de plus. Ils savent que la voie est libre devant eux, qu’il n’y a pas pour l’instant d’autre alternative à la politique du gouvernement et de la droite, et ils comptent profiter du désespoir d’une grande partie de la population qui pourrait se dire, comme le fait leur slogan de campagne préparatoire aux élections régionales : " et si on essayait le FN", et prendre de vitesse les militants de la classe ouvrière.

Dimanche dernier, Le Pen a fustigé tout ensemble Jospin et Juppé, les emplois-jeunes créés par Martine Aubry, la privatisation de France-Télécom. On a même vu Mégret distribuer des tracts devant la direction régionale Paris-Nord de l'entreprise, disant à ce propos qu’il s’agissait d'une " opération emblématique de l'action que nous avons commencé à développer en direction du monde du travail ". Il sait quel parti il peut tirer d’une position d’opposition radicale en apparence aux politiciens du gouvernement et de la droite.

Cette démagogie, quand bien même elle s’en prend au " grand capital " (" apatride "), au gouvernement, est dirigée contre le monde du travail, ses militants et ses organisations politiques et syndicales. C’est aux " socialo-communistes " que Le Pen s’en est pris dimanche dernier, " à la gauche ", " au parti des camarades ", et tous ses propos respirent l’hostilité et la haine des idées et militants de la classe ouvrière et jamais, bien sûr, Le Pen ou Mégret ne s’en prendront aux capitalistes français, dont ils sont les serviteurs.

Mais aujourd’hui, ils n’hésitent pas à s’adresser aux militants et sympathisants du PC, dont ils dénoncent les retournements à propos de Maastricht et des privatisations. " Le parti des camarades se rallie au grand capital apatride " a ironisé dimanche Le Pen à propos des encarts publicitaires parus dans l’Humanité vantant la privatisation de France-Télécom. Quand Le Pen accuse le gouvernement de " passer sous les fourches caudines de Maastricht ", il sait bien que cette propagande peut toucher des militants du PC dont les dirigeants se donnent depuis des années un aspect radical en dénonçant le marché commun puis Maastricht, sans risquer de mettre en cause réellement les capitalistes français.

C’est contre ce danger que tous ceux qui ont répondu aux appels des organisations de gauche à la manifestation du samedi 27 septembre se sont mobilisés. Mais les dirigeants de la " majorité plurielle " eux, ont d’autres calculs en tête. Ils se servent de l’inquiétude suscitée par la montée de l’extrême-droite pour faire que tous les milieux de gauche serrent les rangs autour du gouvernement, taisent leurs critiques, acceptent la politique anti-ouvrière qu’il mène.

Alors manifester ne peut suffire à combattre le Front National, et si nous le faisions derrière les partis au gouvernement, en renonçant à défendre nos intérêts de travailleurs, nous aboutirions au contraire de ce que nous voulons. Ce réflexe de solidarité vis-à-vis du gouvernement parce qu’il est attaqué par la droite et l’extrême-droite, conduit à oublier qu’il a une politique aussi anti-ouvrière et réactionnaire, et donc à paralyser les militants et les travailleurs.

Indonésie : le capitalisme flambe et la forêt brûle

Depuis plusieurs jours, les médias nous montrent des images provenant des gigantesques incendies qui ravagent les forêts indonésiennes. Les autorités de ce pays se déclarent impuissantes devant l’ampleur de la catastrophe, et 800 000 hectares auraient déjà brûlé depuis 3 semaines. Vendredi 26 septembre, un avion des lignes extérieures s’est écrasé sur l’île de Sumatra (plusieurs centaines de morts) où se trouve le foyer le plus important. Le manque de visibilité (moins de 50m) et les épaisses fumées expliqueraient aussi la collision entre deux cargos (plusieurs dizaines de victimes) dans le détroit de Malacca séparant l’Indonésie et la Malaisie. Dans la capitale de la Malaisie, Kuala Lumpur, la population doit sortir dans la rue avec des serviettes humides sur le visage pour se protéger. L’air est devenu irrespirable et dans les rues, c’est l’obscurité permanente. En une semaine, plus de 15 000 personnes ont été hospitalisées d’urgence, en majorité des personnes âgées et des enfants victimes de crises d’asthme et d’irritations oculaires. Seules quelques rares pluies d’orage arrivent à éclaircir le ciel. A part l’envoi de quelques spécialistes dont les pompiers, les autorités des principaux pays occidentaux n’ont mis aucun moyen sérieux pour lutter contre le feu ou pour aider la population.

Alors pour expliquer cette catastrophe et cette pollution qui fait suffoquer toute la région, les médias évoquent la sécheresse exceptionnelle de cette année, due à un réchauffement anormal de l’Océan Pacifique ; un phénomène climatique qui se traduit par une saison sèche plus longue qu’à l’accoutumée. C’était donc prévisible grâce aux connaissances météorologiques. La cause essentielle de ce " smog " tropical, c’est que depuis 30 ans, les forêts de l’Asie du sud-est sont victimes du déboisement et du défrichage à grande échelle.

Ces huit cent milles hectares partis en fumée sont révélateurs de l'aberration du système capitaliste. L’essentiel de la déforestation est le fait des grandes compagnies forestières indonésiennes et japonaises qui en tirent des profits substantiels. Les coupes sombres dans la forêt tropicale favorisent la pousse de l’herbe, et à la saison des pluies l’eau, au lieu d’être retenue par les arbres, glisse sur des terrains rabotés pour se déverser directement dans la mer. Les lacs et les rivières sont menacés d’assèchement diminuant d’autant les réserves d’eau potable.

En 1966, 82 % des terres indonésiennes étaient recouvertes de forêts. En 1982, le pourcentage était tombé à 68 % et de récents relevés par satellite ne l’estiment plus qu’à 55 %. C’est ainsi que l’Indonésie est devenue le 1er exportateur mondial de contre-plaqué. Les tribus qui vivaient dans les forêts de l’île de Bornéo ont été déplacées de force vers des baraquements construits à la hâte à l’orée des concessions. Pour imposer cela, le gouvernement du général Suharto et son armée prêtent main forte aux compagnies forestières. Les principales concessions appartiennent à des membres ou des proches de la famille de Suharto, dont la propre fille du dictateur qui est au pouvoir depuis le coup d’état de 1965.

Cette minorité de privilégiés qui pille en toute impunité les ressources naturelles de l’Indonésie est la principale responsable de cette exploitation à outrance de la forêt tropicale et des catastrophes humaines et écologiques qui en découlent.

Tony Blair, lutter contre le chômage, c’est baisser les salaires des jeunes...

Après avoir envisagé de voter une augmentation de son propre salaire de 40 %, Tony Blair, tout soucieux de cultiver la merveilleuse idylle qu’il connaît avec le monde de l’industrie et de la finance, vient de décider d’exclure les jeunes de moins de 25 ans du salaire minimum qu’il souhaite instaurer. Devant la baisse des salaires sous la pression du chômage, les travaillistes ne peuvent pas faire moins que de… promettre un salaire minimum pour… pas avant le printemps 98. Et afin de rassurer ses amis, Tony Blair leur assure de pouvoir rajeunir les effectifs en bénéficiant de bas salaires garantis. Pour le socialiste Tony Blair qui ne connaît que de bonnes intentions, c’est pour lutter contre le chômage des jeunes… Avec en justification de bons vieux préjugés réactionnaires digne d’une vieille lady : " le nouvel Etat-providence doit encourager le travail et non l’assistanat ". Que les saintes Nitouche du parti travailliste commencent par supprimer l’assistanat… aux financiers. On ne leur demande même pas de les faire travailler !

Conflit Total-Washington, des rivalités de brigands

Nous n’étions pas au bord de la guerre, mais c’était tout juste. Les Etats Unis menaçaient Total de représailles, Jospin avait pris fait et cause pour le trust français s’indignant que les USA veuillent imposer leur loi au monde. Quelle prestance trouve Jospin dans le rôle du petit coq chauvin… Et puis tout semble être rentré dans l’ordre, l’ordre des affaires impérialistes…

La cause de cette scène de ménage internationale ? Total vient de passer avec l’Iran un contrat sur l’exploitation d’un gisement de gaz dont la production devrait représenter en 2001 l’équivalent des deux tiers de la consommation française. Or, les Etats Unis, en froid avec l’Iran, ont adopté une loi menaçant de sanction toute entreprise y compris non américaine qui investirait dans le secteur du pétrole ou du gaz sous prétexte que l’Iran est un " Etat terroriste ". Il s’agit en fait de protéger les intérêts américains en empêchant les autres d’occuper la place…

Les Etats Unis ne sont pas si regardants à l’égard des autres pays du Golfe dont le terrorisme à l’égard des masses ne fait de doute pour personne. Quant à Jospin qui prétend soutenir Total pour défendre les progrès de la démocratie en Iran, quel hypocrite.