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Le P.C.F. règle ses comptes avec son passé pour mériter de gérer les affaires de la bourgeoisie aux cotés du P.S.

L’incident déclenché la semaine dernière à l’Assemblée Nationale par le zèle anticommuniste des députés de l’UDF a été l’occasion pour Hue de faire faire à son parti un pas de plus dans le sens de ce qu’il appelle sa " mutation ", c’est-à-dire de sa rupture avec un passé lié à la classe ouvrière et à l’URSS qui l’empêche d’être considéré comme un parti gouvernemental comme les autres.

Ce ne sont pas les crimes du stalinisme qui gênent Jospin et Hue dans le passé du PCF...

Oh bien sûr les choses ne se sont pas dites comme cela. Hue n’a d’ailleurs lui-même pas dit grand-chose puisque c’est Jospin qui, se lançant dans un vibrant hommage au Parti Communiste, a déclaré : " Il n’a lui-même jamais porté la main sur les libertés, même s’il n’a pas pris ses distances assez tôt avec les phénomènes du stalinisme. Le Parti Communiste a tiré des leçons de son histoire ". En bon écolier, Hue a répété après Jospin que le Parti Communiste avait " trop tardé " pour dénoncer le stalinisme : " Le Parti Communiste aurait pu dès 1956 prendre ses distances avec le modèle de pensée soviétique. Il ne l’a pas fait, il l’a payé lourdement ensuite. "

Qu’en termes fleuris ces choses sont dites : " les phénomènes du stalinisme ", " le modèle de pensée soviétique " quand il s’agit de la dictature et des crimes de Staline pour défendre contre la classe ouvrière les intérêts de la caste privilégiée qu’il représentait, ou de la sanglante répression de la révolution hongroise par les chars soviétiques à laquelle le PCF applaudit en 56. Parce que précisément, ce n’est pas son rôle contre-révolutionnaire et anti-ouvrier qui les gêne dans le stalinisme, mais ses liens avec la révolution russe et la classe ouvrière, quand bien même le stalinisme en représente la trahison et le reniement.

... mais son origine révolutionnaire et ses liens avec la classe ouvrière

Il n’y a qu’à voir d’ailleurs quelles périodes dans le passé du PCF trouvent grâce aux yeux de Jospin : " le Front Populaire... le combat de la Résistance... le gouvernement tripartite de la gauche en 1945 ", autrement dit celles où l’appareil du PCF, devenu un instrument docile entre les mains de Staline, soutenait un gouvernement bourgeois, ou y participait. Au passage Jospin réécrit l’histoire lorsqu’il dit que " le PC s’inscrit dans le Cartel des Gauches ", alors que celui-ci à l’époque, en 1924, n’ayant pas encore troqué " l’Internationale " contre la " Marseillaise ", était dans une opposition résolue à ce gouvernement, ou bien lorsqu’il fait du gouvernement de De Gaulle un gouvernement de gauche. Il réécrit aussi l’histoire quand il affirme que le PC " n’a lui-même jamais porté la main sur les libertés " intéressé à taire, plus que les crimes du stalinisme, ceux de la bourgeoisie française contre les peuples coloniaux, telle la répression sanglante de la population algérienne en 1945 à Sétif, à l’époque où le PC et le PS étaient au gouvernement.

Ses dirigeants veulent faire du parti communiste un vrai parti gouvernemental...

En réglant ses comptes avec son passé stalinien, c’est un pas de plus dans sa transformation en parti social-démocrate que fait le PCF, c’est à dire un parti pleinement intégré à la vie parlementaire, ne rendant des comptes qu’à la bourgeoisie. Jusqu'à présent, bien qu’ayant rompu depuis longtemps avec les idées communistes et internationalistes, bien qu’ayant fait à deux reprises, en 45 et 81, le sale boulot au gouvernement contre les travailleurs, il n’avait pas encore fait le choix de se dégager entièrement de ses liens avec la classe ouvrière, et de devenir un vrai parti gouvernemental. De 44 à 47, c’est autant pour servir les intérêts de Staline que pour être reconnu par la bourgeoisie française qu’il participa au gouvernement, et c’est à cause de ses liens avec Moscou qu’il en fut chassé au début de la guerre froide. En 84, c’est lui-même qui fit le choix de quitter le gouvernement, craignant de perdre, en se discréditant davantage auprès des travailleurs, trop de postes à l’Assemblée ou dans les municipalités.

A travers cet épisode à l’Assemblée la semaine dernière, le PCF donne un nouveau gage de sa volonté d’être responsable vis-à-vis de la bourgeoisie et du PS, d’aller jusqu’au bout de sa participation gouvernementale, même s’il doit perdre nombre de ses militants et le crédit qui lui reste parmi les travailleurs.

Construisons ensemble avec tous les militants et sympathisants de gauche et d’extrême-gauche un vrai parti communiste et socialiste

Les dirigeants du Parti Communiste ont beau dire encore que tout dépend " du mouvement social ", on a vu ce qu’il en était pendant la grève des routiers : la " pression " des grèvistes n’a pas empêché le gouvernement de leur envoyer les CRS et de donner de nouveaux cadeaux à leurs patrons. Demain, il est très probable que même les discours des dirigeants du PC changeront, et que c’est contre ceux qui voudront faire grève ou contester la politique du gouvernement, qu’ils feront pression. Il faudra faire taire la " cacophonie ". Aujourd’hui, on laisse s’exprimer les mécontentements, le temps de les isoler, de les circonscrire pour mieux les réduire voire les exclure. Le Parti Socialiste ne leur laissera de toute façon pas le choix, il faudra qu’aux élections régionales toute la gauche gouvernementale parle d’une seule voix. Robert Hue vient de dire qu’il y est prêt.

L'itinéraire d’un chef stalinien au service de la bourgeoisie

Les politiciens de droite comme de gauche ont rendu un hommage à Georges Marchais. Malgré les ambiguïtés des propos tenus, rien d'étonnant car il a bien mérité des intérêts de la bourgeoisie française. Et c’est à ce titre-là que tous lui reconnaissent aujourd’hui des qualités. Jusqu’à Jospin qui se fait un plaisir de souligner : " Georges Marchais fut également l’homme des transitions du P.C.F. " ou Chirac qui renchérit : " C’est une vraie figure qui s’efface ".

Entré au P.C.F. en 1947, il a gravi tous les échelons de l'appareil sans sortir de l’ombre en stalinien zélé, applaudissant notamment à l’écrasement de la révolution hongroise en 1956. Nommé secrétaire général en 1972, il va continuer à faire évoluer le P.C.F. dans le sens de la social-démocratie.

C’est au 22ème congrès du P.C.F. en 1976 qu’officiellement est abandonnée toute référence à la dictature du prolétariat pour se revendiquer selon les termes de Marchais d’un " socialisme aux couleurs de la France ", mettant aux oubliettes des références certes vides de tout contenu pour le PC mais dont Marchais et ses semblables voulaient se débarrasser pour faciliter une éventuelle participation gouvernementale du PCF. Conséquence de quoi, Marchais s’est fait l’apôtre de l’Union de la Gauche avec le Parti Socialiste de Mitterrand, mettant le P.C.F. à la remorque du P.S.. L’union est " une constante, un principe de notre politique " écrit-il à cette époque. La constante qui en résultera sera le déclin électoral permanent du P.C.F. dans les vingt années suivantes. Il ne faudrait pas croire que c’est sa gouaille, son aplomb à la télévision qui ont suffi à le rendre populaire, mais le fait qu’il représentait, indépendamment de ses objectifs politiques, une forme d’opposition ouvrière à la bourgeoisie comme au Parti Socialiste. Le style même de Marchais a servi tout à fait le processus enclenché, c’est-à-dire de vendre l’influence du Parti Communiste au sein de la classe ouvrière pour un plat de lentilles : celui d’une participation à un gouvernement bourgeois, celui de Mitterrand, achèvement de la politique commencée avec l’Union de la gauche. Ce que peut lui reprocher la bourgeoisie, c’est de ne pas avoir intégré le PCF à la société bourgeoise assez vite à son goût. Il a été obligé de temps à autre de marquer le pas à cause des liens du PCF avec la bureaucratie soviétique, en approuvant par exemple l’intervention en Afghanistan tout en défendant au fil des années une indépendance de plus en plus grande de son parti à l’égard de l'Etat soviétique.

Et là aussi Marchais a donné des gages à la bourgeoisie. Après l'écroulement du bloc soviétique, le PCF avait tissé suffisamment de liens avec la société bourgeoise pour ne pas se retrouver orphelin. Et c'est tout naturellement que Marchais a pu transmettre le relais à Robert Hue en 1994 pour parachever la transformation du PCF en un parti social-démocrate de bonne compagnie parlementaire, de plus en plus détaché de ses liens avec la classe ouvrière.

Citation : Rosa Luxembourg, La révolution russe, 1918.

" Nous sommes tous soumis à la loi de l’histoire et on ne peut introduire l’ordre socialiste qu’à l’échelle internationale. Les bolchéviks ont montré qu’ils pouvaient faire tout ce qu’un parti vraiment révolutionnaire est capable d’accomplir dans les limites des possibilités historiques. Qu’ils ne cherchent pas à faire des miracles ! Car une révolution prolétarienne exemplaire et parfaite, dans un pays isolé, épuisé par la guerre mondiale, écrasé par l’impérialisme, trahi par le prolétariat international, serait un miracle. Ce qui importe, c’est de distinguer, dans la politique des bolchéviks, l’essentiel de l’accessoire, la substance du fruit. En cette dernière période où les luttes finales décisives nous attendent dans le monde entier, le problème le plus important du socialisme a été et est encore précisément la question brûlante de l’actualité, non pas telle ou telle question de détail de la tactique, mais la combativité du prolétariat, l’énergie des masses, la volonté du socialisme de prendre le pouvoir en général. A cet égard, Lénine, Trotsky et leurs amis, ont les premiers, par leur exemple, ouvert la voie au prolétariat mondial, ils sont jusqu’à présent encore les seuls qui puissent s’écrier comme Hutten : " j’ai osé ! "

Emploi des handicapés : les patrons contournent la loi

Un récent rapport de l’AGEFIPH (association nationale pour l’emploi des handicapés) constate le fait que sur 86 200 établissements normalement assujettis à l’obligation de réserver 6 % des postes à des travailleurs handicapés, 51% des établissements concernés biaisent et ont choisi de verser une contribution à cette association.

A Rhône Poulenc, un " accord handicapé " a été signé par l’ensemble des organisations syndicales. Il prévoit, sur trois ans à compter de 1997, l’embauche de 80 salariés dont 52 en CDI et 28 par le biais de contrats en alternance, qualification, etc. Pas de quoi crier victoire, loin de là, car si on fait le calcul par rapport aux 57 sociétés RP concernées par cet accord, 1,4 emploi est ainsi créé en moyenne par société. Rhône Poulenc écrit sans vergogne dans l’article 4 de l’accord : " le recrutement et l’insertion des personnes handicapées est une priorité que se donne le groupe RP en matière d’emploi ". Les chiffres parlent d’eux-mêmes.

Et sur les quelques embauches que fera RP, il n’hésitera pas à recourir aux multiples aides financières (entre autres celles de l’AGEFIPH) afin que ça lui coûte le moins cher possible. Cette image " sociale " que le cinquième groupe industriel français veut se donner est un bluff de mauvais goût.

A l'ASSEDIC, mesquineries sur le dos des chômeurs et des travailleurs

A l’ASSEDIC de Mériadeck, à Bordeaux, la direction a envoyé une partie du personnel en formation. Petit détail, elle ne l’a pas remplacé. De ce fait, les dossiers ne sont pas traités et prennent du retard. Un chômeur qui, " en temps normal ", devait attendre trois semaines pour percevoir ses allocations à l’ouverture d’un dossier, voit ce temps se rallonger jusqu’à deux mois.

Dans sa grande magnanimité, la direction consent à verser des avances, mais uniquement à ceux qui viennent voir pourquoi ils ne touchent rien. Bien sûr, la gestion informatique de ces avances donne un surcroît de travail au personnel de l’accueil qui a déjà fort à faire. Quant aux dossiers en retard qui s’accumulent, le personnel en formation aujourd’hui sait qu’ils les attendent pour leur retour.

Ils nous englobent tous dans le même mépris, chômeurs en butte à l’arbitraire de leurs décisions et employés sur qui retombent les surcharges de travail et la détérioration du service. Derrière leurs belles paroles sur " le traitement social du chômage ", ils ne peuvent cacher que leur seule logique, c’est la recherche des économies.

Le patronat continue à sinistrer la ville d'Elbeuf

A Saint-Aubin-les-Elbeuf (Seine-Maritime), l'usine qui produit les crayons Conté va fermer pour être transférée à Boulogne-sur-Mer. Résultat : 55 ouvriers, dont 5 intérimaires, renvoyés. A Saint-Pierre, WITCO est rachetée par une autre entreprise. Les effectifs doivent baisser de 70 personnes. A Saint-Aubin toujours, l'usine Spiragaine (30 personnes) risque de fermer début janvier 1998.

En un an, le taux de chômage à Elbeuf a augmenté de 22 %, et dans l'agglomération, il est de plus de 18 %. La moyenne des RMIstes y est deux fois plus importante que la moyenne nationale.

Toute cette agglomération est devenue une véritable zone sinistrée. Le principal employeur de la région, Renault Cléon a embauché un peu ces dernières années, ce qui n'empêche pas qu'en quinze ans ses effectifs sont passés de 9400 à 5400 aujourd'hui. Et de nombreuses petites entreprises ferment leurs portes chaque mois. Comme il s'agit d'entreprises parfois toutes petites, les salariés y ont peu de droits ou bien leurs droits élémentaires ne sont même pas respectés par leur patron.

Il n’y à qu’une explosion de colère qui pourra inverser le cours des choses.