Page 3 



Fusions bancaires : l’argent coule à flot

Plusieurs banques américaines ont annoncé leur regroupement pour constituer des empires financiers dominant le monde. Le but de l’opération est dicté par une concurrence de plus en plus acharnée pour s’approprier des richesses qui n’augmentent pas, loin s’en faut, au même rythme que les masses de capitaux avides de profit. Ce que reconnaît clairement un économiste : “ les dirigeants des groupes bancaires dont les actions s’échangent très cher en Bourse à leur valeur dépassant 20 fois leur bénéfice, sont sous pression. En fusionnant, ils s’achètent encore quelques années de croissance ”. Cette course aux concentrations ne supprime pas la concurrence - au contraire celle-ci se fait à un niveau bien supérieur dans tous les pays qui se lancent dans la même politique de fusions pour servir leurs capitalistes.

Aux Etats-Unis, en premier ce sont Citicorp et Travelers Group Inc qui ont consommé leur mariage pour 70 milliards de dollars. La semaine suivante, la Bank One Corp et la First Chicago Corp, pour 29 milliards de dollars, et quelques heures après la BankAmerica Corp et la Nations Bank Corp, en fusionnant, devenaient la première banque américaine avec 570 milliards de dollars d’actifs. Cette tendance est à l’origine aussi de l’offre publique d’achat qu’a lancée la Bank of New-York sur la Mellon Bank en attirant les actionnaires de la banque convoitée en leur offrant une prime de 28 %, sur la base du cours des actions en bourse. “ Ces fusions sortent du champ d’un esprit rationnel ”, commentait un économiste. Le gigantisme des nouveaux empires financiers a entraîné, comme chaque fois que de nouveaux profits s’annoncent, la hausse des cours des actions des banques concernées. Ce qui a fait dire à un banquier : “ chaque fois que le marché paraît un peu vulnérable, on a quelque chose d’énorme. C’est sacrément d’argent qui coule dans les mains des investisseurs. Le spectacle continue ”. Spectacle euphorique qui, pour les salariés des banques, prend l’allure d’un drame : d’ores et déjà, le président de la BankAmerica a annoncé 8 000 suppressions d’emplois sur un total de 180 000 salariés, ce qui va permettre d’économiser 2 milliards de dollars et la fusion de la Banc One et de la First Chicago doit se traduire par 10 000 suppressions d’emplois.

Pour les banquiers, conquérir de nouvelles parts de marché à l’échelle internationale est la seule façon de continuer à accroître les profits financiers et pour cela, il leur faut augmenter toujours plus la productivité. La course à l’enrichissement est d’autant plus âpre que les banques américaines considèrent qu’elles ont un retard à rattraper du fait de la législation mise en place dans les années de crise de 1929 qui les obligeait à différencier les activités commerciales et d’affaires et à exercer dans le cadre de l’Etat où était leur siège. Aujourd’hui, ces contraintes, qui déjà s’étaient considérablement assouplies, volent en éclats et les banques en profitent pour se tailler des empires financiers plus larges.

En France, Strauss-Kahn a annoncé la fusion du CIC avec le Crédit Mutuel dans l’objectif de gagner des parts du marché européen. La vente au Crédit Mutuel de 67 % des parts que l’Etat détenait dans le CIC va rapporter au gouvernement près de 14 milliards de francs. Le nouveau groupe se situera au 5ème rang des banques françaises et s’il a été annoncé qu’il y aurait 3000 créations de postes, ce qui reste à voir, le CIC a précisé qu’il n’y aurait pas de baisse des effectifs jusqu’en 2003, date butoir pour ne pas effectuer un nouveau regroupement bancaire. Après avoir parrainé ce nouveau groupe, le gouvernement continue sa politique au service des banquiers avec la privatisation du GAN et du Crédit Foncier de France.

A l’échelle du monde entier, cette concentration croissante des capitaux et du pouvoir économique se traduit à l’autre pôle par un appauvrissement croissant des peuples et des travailleurs.

Trois jours de mobilisation non stop des travailleurs de Ralston à Elbeuf et à Rouen

Jeudi 30 avril, nous sommes venus manifester à une cinquantaine de l’usine de piles Ralston menacée de 334 licenciements, accompagnés par des chômeurs de l’ADEBE, lors de la réunion annuelle des patrons, artisans, commerçants, élus locaux et diverses autorités galonnées d’Elbeuf et de son agglomération. Nous les avons “ accueillis ” à l’entrée par quelques slogans du genre “ Les patrons licencient, licencions les patrons ” ou “ Du fric pour l’emploi, pas pour les patrons ”. Un camarade a pu intervenir au début de leur grand-messe, au nom de l’intersyndicale CGT/CFDT et du Comité d’organisation contre les licenciements à Ralston. Après avoir décrit la situation sociale catastrophique de l’agglomération (700 licenciements et suppressions de postes annoncés en 3 semaines à Ralston, Renault Cléon, Teeds... ), et rappelé les conséquences indirectes du chômage sur les familles et les petits commerçants locaux, il a présenté les revendications des salariés : interdiction des licenciements, ouverture des livres de comptes des groupes et de leurs dirigeants, arrêt des subventions aux entreprises qui licencient et utilisation de l’argent économisé pour la création d’emplois par l’État dans les hôpitaux, transports, enseignement... Son intervention n’a rencontré aucun succès parmi les 150 notables présents, mais par contre il a été chaleureusement applaudi dans nos rangs !

Vendredi 1er mai, la manifestation dans les rues d’Elbeuf a rassemblé 400 personnes, dont une bonne moitié en ciré jaune. C’est la tenue de ralliement des Ralston pendant leurs actions, un ciré avec les slogans : “ Energizer, la pile qui crée des chômeurs. Interdiction des licenciements à Ralston comme ailleurs. 

Ces slogans étaient repris par tout le monde, ainsi que l’Internationale. A la fin de la manifestation, nous nous sommes tous donné rendez-vous pour le lendemain samedi.

Samedi 2 mai, nous nous sommes retrouvés à 150 devant l’usine où nous attendaient 3 cars qui nous ont conduit à Rouen, aux 24 heures motonautiques, une épreuve sportive qui attire des milliers de spectateurs. Parmi nous, il y avait aussi des chômeurs et deux ouvrières de Teeds, déjà venus à la manifestation du 1er mai. Nous avons manifesté à 200, avec détermination et bonne humeur, jusqu’à l’Ile Lacroix où avait lieu le départ de la course. Nous ne sommes pas passés inaperçus avec nos ballons, autocollants, tracts, banderoles, sifflets et bien-sûr nos cirés (et nos casquettes) jaunes ! Plusieurs camarades du Comité d’organisation se sont adressés, via la sono de la CGT, au public qui attendait pour expliquer la situation à Ralston et dans l’agglomération. Au moment du départ des bateaux, nous avons lâché comme prévu nos ballons et nous sommes repartis en chantant “ Ce n’est qu’un début, continuons le combat ”.

Locatrans : cynisme patronal

Huit salariés de Locatrans, une entreprise de transport et de manutention, sont depuis quatorze mois dans une situation insupportable. La société pour laquelle ils travaillaient, Locatrans, a perdu le marché qu’elle avait depuis plus de dix ans à la SOGERMA au profit des sociétés Cégélec et TMG. Dans ce cas, la loi prévoit que les salariés doivent être réembauchés par les sociétés qui ont repris les marchés.

Mais les salariés n’ont pas été repris par TMG : Locatrans disait qu’ils n’étaient plus salariés dans leur entreprise et la SOGERMA, principale responsable puisque c’est elle qui fixe les conditions auxquelles elle accorde les marchés, disait qu’elle n’était pas concernée par ce problème. Depuis quatorze mois, ces huit salariés sont donc ainsi renvoyés de patron en patron et sans ressources. Depuis le début, ils ont refusé le sort qui leur était réservé, s’installant devant Locatrans et entamant des poursuites devant les tribunaux contre toutes les sociétés. Le 1er mars dernier, le tribunal des prud’hommes leur a donné satisfaction et a ordonné leur embauche à TMG, et le 10 mars que des indemnités leur soient versées. Mais depuis rien. Une manifestation de solidarité a eu lieu devant le siège de TMG mercredi dernier. Alors qu’un accord était en vue, la société TMG a demandé en référé l’expulsion des grévistes des locaux de TMG. La loi est plus rapide pour satisfaire les patrons que pour faire respecter les droits des travailleurs.

Echo du bulletin “Front des Travailleurs” SNCF Rouen rédigé par des militants de l’ART et de Voix des Travailleurs

Non aux transferts de tâches

La direction du dépôt de Sotteville n’a qu’un seul mot à la bouche : productivité.

Après avoir pendant plusieurs années resserré les roulements, la direction s’attache aujourd’hui aux transferts de tâches. C’est d’abord le transfert des vacations Quatre-Mares effectuées d’habitude par des conducteurs qui seraient remplacés par des agents du Service Intérieur. C’est aussi transférer des trains, assurés par des conducteurs de ligne qui seraient remplacés par des conducteurs de manoeuvre, notamment Sotteville-Etrepagny et Sotteville-Louviers.

Tout cela pour les mêmes raisons : “ réduction des coûts ”, c’est-à-dire faire faire le travail par des agents payés moins cher. Même si les arguments de la direction paraissent attirants (diversification du travail, augmentation des primes), ne soyons pas dupes : même travail, même salaire.

Partout à la SNCF c’est la même chose : ne nous laissons pas faire.

Ford-Blanquefort (33) : promesses non tenues et chantage à l’emploi

Il y a deux ans, la direction avait fait passer des tests à plusieurs dizaines de jeunes camarades qui étaient en CDD pour leur proposer de faire un contrat-qualification. Quarante avaient été retenus et la direction leur avait demandé de rompre leur CDD en prenant soin de leur faire signer une déclaration par laquelle ils s’engageaient à ne pas demander d’indemnités de rupture de contrat. Une promesse d’embauche leur avait été faite - le coefficient d’embauche, 170, leur avait même été précisé - ainsi que toutes les possibilités de déroulement de carrière s’ils réussissaient leur examen.

Cette année le contrat arrive à terme. Mais plus question d’embauche, même en ayant réussi l’examen. La direction est revenue sur ses engagements et tous ont été mis à la porte, la veille du week-end du 1er mai.

Dans une lettre leur annonçant le licenciement, le chef du personnel écrit : “ la situation très changeante de notre volume de production nous empêche une vision claire et stable de l’avenir, et ne permet pas de vous assurer à tous, une embauche définitive systématique et à court terme. ” 

La direction a le cynisme d’écrire aussi que leur embauche ne dépend pas d’elle mais des travailleurs susceptibles de partir dans le cadre de l’ARPE. Elle multiplie en effet les pressions pour contraindre ceux d’entre nous qui sont susceptibles de partir dans le cadre de l’ARPE, de quitter l’usine. Mais beaucoup refusent, non parce qu’ils ont envie de rester à Ford mais parce qu’avec 81 % de leur salaire, ils estiment qu’ils n’y arriveront pas ( un salarié qui touche 8000 F partirait avec 6400 F mensuels).

Non seulement la direction a renié toutes les promesse faites aux jeunes en contrat de qualification mais elle a le culot de tenter de reporter sur d’autres camarades la responsabilité de leur licenciement. Mais tout le monde sait bien que la direction ment lorsqu’elle prétend qu’elle ne peut pas embaucher parce qu’il n’y a pas de travail : lundi dernier, elle a rappelé une partie des 170 intérimaires qu’elle avait licenciés il y a plusieurs mois.

Les expulsions continuent, manifestons notre solidarité

Après les expulsions de ces dernières semaines qui ont fait scandale car elles ont été rendues publiques par la résistance des sans-papiers eux-mêmes et des comités qui les soutiennent, aujourd’hui, plus discrètement, la police de Chevènement continue son sale travail. Beaucoup de sans-papiers préfèrent se cacher plutôt que faire appel aux associations de soutien ; et c’est ainsi que l’on apprend, après coup, que certains immigrés ont été expulsés. Et pour un cas connu, combien après plusieurs jours d’enfermement au centre de rétention sont expulsés dans l’anonymat. Plusieurs dizaines sans doute chaque jour dans le pays…

C’est pour protester contre ces expulsions et pour exprimer notre solidarité que des manifestations seront organisées à Paris et dans plusieurs autres villes le 16 mai prochain.

 

La lutte des chômeurs continue

Après des semaines de lutte et d'occupations menées par les militants d'AC ! Bordeaux, dont 15 sont sans logement, les seules réponses à leur exigence d'un toit ont été les brutalités policières et “ des réunions où on nous a menés en bateau. Des copains à la rue, des jeunes sans boulot et sans avenir, ils s'en foutent... ”

La dernière expulsion de la clinique Wilson, occupée 12 jours, avait provoqué un coup au moral, poussant 4 militants à entamer une grève de la faim dans l'église Saint-Michel.

Mais le moral et la détermination sont revenus. A l'AG du mardi 28 avril, plusieurs organisations sont venues nous soutenir et nous avons décidé de participer à la manifesta­tion du 1er mai. Nous y avons distribué un tract et pris la parole pour appeler à un rassemblement lundi 4 mai, jour où une délégation était reçue à la préfecture.

Lundi, nous nous sommes retrouvés une centaine, militants chômeurs et salariés d'AC, de l'APEIS ou de la CGT, regonflés d'être tous ensemble au coude à coude, attendant sans aucune illusion l'issue de la réunion à la préfecture. Nos camarades de la délégation nous ont très vite rejoints : “ Aucune proposition... alors, nous avons claqué la porte ! ”

Un gréviste de la faim a annoncé la fin de la grève, décla­rant que “ s'ils s'imaginent qu'on va se laisser mourir de faim dans notre coin, ils se trompent. ”

Mardi, à une trentaine, plus que jamais déterminés, nous avons appliqué la loi de réquisition au 307, boulevard Wilson, dans une pension privée pour retraités, fermée depuis des mois, que nous sommes décidés à occuper. On connaît maintenant le quartier et les voisins pour avoir occupé la clinique... au 311 !

Comme a dit une camarade, “ il y a 12 000 logements inoccupés à Bordeaux, alors s'ils nous expulsent une nouvelle fois, il n'y a pas de problème, on les fera tous ! ”