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Clinton en Chine : un voyage pour associer le régime de Pékin au maintien de l’ordre capitaliste

Le voyage de Clinton en Chine a été l’occasion pour beaucoup de commentateurs de disserter sur le " dilemme " qui saisirait les dirigeants américains dans leurs relations avec la Chine : " droits de l’Homme ou commerce ? " Les Etats Unis ne se sont jamais posé cette question. Dans leur politique vis-à-vis de la Chine, les dirigeants américains ont toujours été guidés uniquement par leurs intérêts stratégiques, politiques et économiques.

Quand les Etats-Unis rompirent avec la Chine de Mao en 1949 et décidèrent d’exclure celle-ci de l’ONU, ce fut avant tout pour dissuader tout autre pays de basculer dans le camp de l’URSS. Mais lorsqu’ils reconnurent la Chine du même Mao en 1969, la répression massive de la révolution culturelle y battait son plein. Pour eux, il s’agissait de s’assurer dans la région la collaboration d’une puissance devenue anti-soviétique. En 1979 les Etats-Unis soutinrent avec la Chine les Khmers rouges du Cambodge contre le Vietnam réunifié. En 1989, comme tous les dirigeants occidentaux, ils " condamnèrent " le massacre des étudiants chinois sur la place Tien An Men, mais ils ne rompirent ni leurs relations politiques, ni leurs relations économiques avec la Chine.

L’intégration croissante depuis la fin des années 70 de la Chine dans le marché mondial ne s’est absolument pas accompagnée d’une démocratisation croissante. Les dirigeants présentés comme des " réformateurs " qui ont peu à peu desserré les structures étatiques et autarciques de l’économie chinoise ont toujours su, quand il le fallait, resserrer les boulons de la dictature. ça n’a jamais empêché les grandes puissances de faire des affaires avec la Chine.

Il ne faut donc pas s’étonner que Clinton se soit montré bien timide sur le terrain des " libertés ". Dans les débats publics Clinton n’a vraiment pas bousculé les dirigeants chinois. Son seul fait d’armes est d’avoir dit en face du président chinois, et en direct à la télévision, que le massacre de Tien An Men avait été une… " erreur ". Evidemment Jiang Zemin a tranquillement pu lui répondre que loin d’être une erreur, cela avait été nécessaire pour maintenir en Chine la " stabilité ". Il sait très bien que ce qui intéresse Clinton et les dirigeants impérialistes en Chine et dans toute l’Asie, c’est justement cela, la " stabilité ".

Clinton était là aussi pour décrocher des contrats pour les entreprises américaines. Il pourra repartir avec des commandes d’avions, de turbines nucléaires… etc. La somme sera rondelette, plus de 2 milliards de dollars, mais somme toute elle est assez faible (elle représente un peu plus de 1 % des importations annuelles de la Chine). Clinton aura aussi obtenu des assurances sur l’exportation de technologie nucléaire, la lutte contre les contrefaçons industrielles, et les missiles nucléaires chinois ne seront désormais plus pointés sur les Etats-Unis. Mais le plus important n’est pas là. Clinton, par sa visite, a consolidé les relations entre l’impérialisme le plus puissant et le pays le plus peuplé du monde. Un pays qui pèse de plus en plus économiquement et qui pour l’ordre impérialiste est plus que jamais un facteur de stabilité politique et économique dans cette région du monde. C’est de cette stabilité dont Clinton a besoin et qu’il voudrait essayer de garantir en intégrant toujours plus la Chine dans un système dominé par les Etats-Unis.

Aujourd’hui la Chine représente une puissance et surtout un potentiel économique qui attire bien des capitalistes occidentaux et japonais. Mais elle est loin d’être encore le " géant économique ", le " pôle de l’Asie " que certains décrivent un peu rapidement. Avec moins de 3 % de la production mondiale et à peine 3 % du commerce extérieur mondial, la Chine est encore très loin de la puissance du Japon et même de celle d’une puissance impérialiste moyenne comme la France. Son économie est fragile et de plus en plus dépendante des impérialismes. Son commerce extérieur est contrôlé à 47 % par des investissements étrangers.

L’ouverture sur le marché mondial et les restructurations économiques ont développé des déséquilibres sociaux qui se creusent à toute allure. Les villes, même les villes phares ouvertes au capitalisme comme Shangaï, regorgent de millions de chômeurs ou de ruraux qui ont quitté la campagne pour venir y trouver du travail. On estime à plus de 120 millions le nombre de chômeurs. Les grèves et les émeutes ne sont pas rares.

Alors si jusqu’ici la Chine s’est montrée un bon élève de l’école capitaliste, très " responsable " lors de la dernière crise financière, c’est sur le dos des travailleurs et de la population chinoise. La Chine est de moins en moins à l’abri d’une explosion sociale. Alors il ne fallait vraiment pas attendre de Clinton qu’il fasse quoi que ce soit pour déstabiliser les dirigeants chinois.

Les libertés, la défense de leurs droits, les travailleurs et les jeunes chinois ne peuvent l’attendre que d’eux-mêmes.

La crise financière en Asie prépare les conditions d’une crise en Europe

Alors que l’Europe se berce d’illusions au gré des statistiques sur le chômage ou la croissance, subjuguée par la perspective de l’euro, le yen lui, à travers des hauts et des bas, poursuit sa dégringolade. Clinton la main dans la main avec Jiang Zemin a répété que les USA et la Chine allaient "faire leur possible pour promouvoir la stabilité et soutenir au Japon une politique visant à rétablir la confiance dans l’économie, relancer l’investissement et la croissance " et de répéter aussi que la "clé " était de "réformer les institutions financières du Japon ". Clinton a beau répéter sans se lasser les quelques phrases que lui ont dictées les financiers américains, cela ne suffit pas à faire remonter le yen ni à faire obéir les financiers et l’Etat japonais. Dans cette guerre feutrée que se livrent les différentes bourgeoisies impérialistes, aucune ne veut céder ni se sacrifier pour les intérêts du plus fort, au risque de provoquer une crise financière internationale,

Actuellement, le seul souci du gouvernement japonais est d’éviter la faillite, ce qui signifie refuser de se plier aux exigences américaines. La réforme, cela voudrait dire ouvrir les frontières sans contrôle ni retenue aux capitaux. Cela veut dire abandonner le système financier japonais aux appétits des occidentaux auxquels il serait bien incapable de résister tellement il est endetté, fragilisé par les créances douteuses dont personne ne peut exactement dire le montant (566 milliards de dollars ? ). Le principal souci du gouvernement est d’éviter l’effondrement des banques qui entraînerait toute l’économie japonaise dans le krach et avec elle aussi peut-être l’économie mondiale.

Le gouvernement vient de sauver de la banqueroute le deuxième organisme de crédit du pays, en finançant sa fusion avec une autre banque. Parallèlement à cette opération de sauvetage, il a ébauché la mise en place d’un organisme financier public, qui aurait pour fonction d’éponger les dettes des banques privées, de récupérer et de gérer les créances douteuses afin d’éviter une ou des faillites qui pourraient provoquer dans la nervosité actuelle un mouvement de panique.

Le gouvernement japonais poursuit un double but : éviter les banqueroutes et mettre sur pied des banques "en mesure de livrer une concurrence équitable avec les institutions financières de premier plan du monde ". Loin de céder aux injonctions du FMI, il se prépare à se battre. Et tout naturellement laisse chuter le yen, ce qui lui permet de se battre pour exporter plus.

Il exporte ainsi sa propre crise sur les autres pays d’Asie, en particulier l’Indonésie, la Thaïlande et la Corée qui sont menacés d’une deuxième vague de faillites à peine un an après qu’ait commencé la première. Deuxième vague probablement inévitable quand on sait que le commerce parmi les pays du Sud-Est a chuté de prés de 40% depuis le début de l’année. C’est toute l’Asie qui rentre dans la récession.

La crise japonaise peut se transmettre de plusieurs façons au reste du monde. Que le gouvernement évite la faillite financière brutale ne résout pas la question.

Les capitaux qui se détournent du Japon et du reste de l’Asie vont venir s’investir aux USA, et aussi pour beaucoup dans une Europe qui semble promise à une forte croissance des profits. Croissance bien incertaine, et surtout qui sera sans rapport avec la masse des capitaux qui cherchent à s’investir. " La crise boursière sera d’autant plus forte que la période d’euphorie boursière obligée aura été longue " commente lucidement un spécialiste.

La crise asiatique donne un peu de répit à l’Europe. Pour combien de temps ? Et effectivement, plus l’euphorie boursière aura été longue, plus dure sera la chute, d’autant que la récession en Asie a déjà des répercussions en Europe et aux USA, répercussions qui vont s’amplifier. L’euro et tout l’échafaudage politico-économique brinquebalant construit autour aura bien du mal à y résister. S’ouvrira alors une période de lutte de classe acharnée. Les travailleurs n’ont aucune illusion à se faire. Les patrons s’y préparent dès maintenant, à nous d’être aussi lucides qu’eux, et de nous préparer.

Avec Chirac comme VRP, les trusts français sont à l’affût de nouveaux pillages en Afrique australe

Un petit bataillon d’une soixantaine de grands patrons français vient de participer à un voyage organisé dans quatre Etats d'Afrique australe – Namibie, Afrique du Sud, Mozambique et Angola. A la tête de cette équipée se trouvait un " gentil organisateur ", Chirac. Un représentant de l’Elysée avait cru devoir préciser : " Ce n’est pas un voyage fondé sur des contrats. Il s’agit de renforcer l’élan d’une pénétration psychologique dans cette région. ". Qui aurait pu penser l’inverse….

Ces propos hypocrites ne changent rien au fait que l'enjeu principal de ce voyage était financier. Et il est de taille : les industriels de l'armement, du pétrole, du béton ou de l'agro-alimentaire sont bien obligés de chercher hors du " pré carré " français en Afrique pour passer des contrats juteux ailleurs dans les ex-colonies portugaises ou anglaises. Au Mozambique, Chirac a ainsi expliqué que " les sphères d'influence " appartenaient au passé, tandis que la France " veut élargir sa sphère d'amitié " : après des années de guerre, Bouygues – qui était du voyage – et d'autres aimeraient participer à la reconstruction du Mozambique, tel est le sens véritable de cette " amitié " ! Pour Bouygues, elle s’est concrétisée par la concession d’un projet énorme de construction routière entre la capitale du Mozambique Maputo et Witbank en Afrique du Sud correspondant à un investissement de 2,3 milliards de francs. Alcatel et la Lyonnaise des eaux ont également décroché de gros contrats.

En Namibie, le VRP du patronat français a été plus direct en déclarant : " Nous serons présents là où la Namibie a des besoins et là où la France a des compétences, et notamment dans les secteurs de l'énergie, de l'eau, du dessalement de l'eau de mer, du transport, des communications et de l'industrie ".

En Afrique du Sud, Chirac se devait d’avoir un langage plus prudent. Ce pays, avec une production représentant un tiers de celle de toute l'Afrique, reste une puissance économique, politique et militaire importante sur le continent. Mais les effets de la crise qui frappe le Sud-Est asiatique ont commencé à atteindre l’Afrique du Sud dont la monnaie, le rand, vient de perdre 17 % en un mois par rapport au dollar, obligeant la Réserve fédérale américaine (FED) à intervenir pour la soutenir. Quoiqu’il en soit, les hommes d'affaires français ont réussi à passer des contrats dans l'armement : 30 milliards de francs devraient être consacrés à rééquiper l'armée sud-africaine, et Dassault n'est pas seul en lice. Les raisons diplomatiques n’étaient pas non plus absentes car l'impérialisme français voudrait faire oublier son rôle dans le génocide du Rwanda, ou encore son soutien indéfectible à Mobutu dans l'ex-Zaïre avant la prise du pouvoir par Kabila et être un intermédiaire obligé facilitant un accord de libre échange entre l’Europe et l’Afrique du Sud.

En Angola, Chirac est venu appuyer Elf et Total, déjà solidement implantés sur place, dans leurs négociations de nouvelles concessions. Elf est déjà le deuxième producteur du pays derrière l’américain Chevron. Les nouveaux gisements découverts loin des côtes angolaises ont ravivé la concurrence entre toutes les grandes compagnies pétrolières. Ils leur garantiraient une production pour au moins vingt ans.

Chirac a été plein de complaisance à l’égard du président angolais De Santos auquel il a apporté son soutien face à ses opposants de l’Unita qui depuis des années mènent une guerilla contre lui. Il n’a pas manqué de se faire le porte-parole du FMI, en bon commissionnaire des trusts y compris américains.

A voir : " géants " ou la lutte pour vivre…

Les géants, ce sont les 251 pylônes d’une ligne de haute tension de 24 km à repeindre durant l’été. Un groupe de chômeurs vivant à Sheffield obtient de la compagnie le chantier. Un chantier au noir, mal payé bien qu’à haut risque. Et tous les risques sont pour les cinq chômeurs dont le film nous raconte l’histoire. Le scénariste est l’auteur de " Full Monty " et l’acteur principal, Pete Postlethwaithe, était celui des " virtuoses ". Ray, qu’il incarne, fait de l’escalade dans les contreforts environnant Sheffield. C’est lui qui a l’idée de ce chantier et monte son équipe. Du matin tôt jusqu’à la tombée de la nuit, ou parfois la nuit si le vent était trop fort et dangereux ou si la pluie vient empêcher le travail, l’équipe de Ray s’attaque aux géants métalliques. Malgré les risques, les conditions de travail déplorables, la peinture qui se met partout et le manque d’argent, la solidarité donne au groupe sa cohésion qui lui permet de surmonter les conflits qui surgissent à chaque instant et crée les occasions de moments de fraternité.

Au milieu de la bande, il y a une fille, venue d’Australie, à la recherche de travail, elle aussi grimpeuse ; elle se fait " embaucher " par Ray et intègre la bande à laquelle elle apporte sa simplicité, son courage et son culot, forçant chacun à être plus attentif, plus humain. Gerry, la jeune affranchie, tombe amoureuse de Ray et réciproquement…L’un comme l’autre cherche ce qui lui manque et arriverait peut-être à transformer sa vie. C’est pour cela qu’ils se battent, sous les regards étonnés ou jaloux des autres. Regards qui compliquent tout, quête difficile quand tout va à la dérive, moments de joies qui se rompent sur les contraintes et la brutalité sociale laissant chacun reprendre sa route…Un épisode de la vie de travailleurs, de leur lutte pour vivre humainement dans une société inhumaine, à voir.