éditorial



L’euro, c’est l’Europe de la finance, de la guerre économique et du chômage
Vive l’Europe socialiste et démocratique des peuples

Nous venons de vivre un étrange 1er janvier, jour paraît-il d'une grande naissance, véritable révolution nous a-t-on dit, " journée historique ", " naissance d'un continent "… Il serait long et fastidieux d'énumérer tous les qualificatifs dont on a pu nous rebattre les oreilles ces derniers jours. C'est tout juste si certains ne se sont pas mis à chanter " il est né le divin euro "… Cette europhorie qui atteint toute la presse et la plupart des hommes politiques a laissé la grande majorité d'entre nous plutôt sceptiques, méfiants et inquiets, même s'il ne nous est pas venu à l'idée de regretter notre quasi défunte monnaie nationale, le franc. Et la joie manifestée par les bourses et les marchés financiers légitime notre inquiétude.

Nous avons bien raison de ne pas être dupes de tous ces discours qui nous promettent la paix, la croissance, le recul du chômage, la démocratie et sans doute en oublions-nous. Oh, bien sûr, il serait mal venu d'avoir la nostalgie de ces vieilles frontières qui depuis des siècles dressent les peuples d'Europe les uns contre les autres pour les seuls intérêts, d'abord des aristocrates de la terre, puis ensuite des aristocrates de la finance. Nous ne pourrions même que nous réjouir de les voir disparaître pour laisser la place à un continent unifié. Mais il ne s'agit même pas de cela.

Cette Europe que chefs d'Etats et grands financiers construisent péniblement ne vise nullement à assurer la coopération des peuples pour satisfaire et garantir le bien-être de tous. Leur construction européenne n'est que le pénible effort des vieilles bourgeoisies européennes dépassées pour faire face à la concurrence des Etats-Unis et de l'Asie. Comme le dit le ministre de l'économie et des finances Strauss-Kahn, cette monnaie unique " fait de l'Europe aujourd'hui la grande puissance économique qui est susceptible de faire le pendant à la puissance américaine ". Pour ces vieilles classes dominantes, c'était s'unir ou céder la place. Elles s'unissent péniblement mais certainement pas pour faire plus aujourd'hui notre bonheur qu'elles ne l'ont fait par le passé. Cette machine de guerre économique qu'est l'euro signifiera une concurrence accrue contre le dollar ou le yen, c'est-à-dire plus de chômage, encore des licenciements, des régions entières désertifiées pour que se concentrent toujours plus de richesses entre les mains de quelques grands trusts de l'économie et de la finance européennes.

Leur Europe est une Europe sans unité, bancale, qui n'a comme ciment que les appétits de profits de ces banquiers et industriels ou la soif de pouvoir des politiciens qui se disputent la gloire d'avoir les premiers rôles. Mais comment pourrions-nous croire que cette monnaie unique sans Etat unifié pourrait nous garantir prospérité et équilibre alors qu'elle a comme garant de vieux Etats aux intérêts rivaux, dépossédés de leur propre monnaie. Une monnaie sans Etat, des Etats sans monnaie, quelle construction étrange les équilibristes du capitalisme voudraient-ils nous faire prendre pour un modèle d'équilibre et de démocratie !

Ils nous présentent leur Euroland comme s'il s'agissait de Disneyland, un monde d'illusions, de faux semblants aux charmes vite oubliés devant la réalité de l'Europe capitaliste, celle du chômage, de la précarité et de la misère, celle où les parlements laissent la place à la banque centrale européenne.

Oui, nous n'avons rien à attendre, ni de l'euro ni de l'Europe. Leur mise en place signifie à très court terme une aggravation de l'offensive que la bourgeoisie, son Etat avec la complicité du gouvernement de la gauche plurielle mènent contre les salariés et tous ceux qui vivent de leur travail.

Mais il serait encore plus dangereux de nous laisser tromper par tous les vieux esprits réactionnaires qui voudraient dévoyer la légitime inquiétude de la population, son mécontentement, pour défendre des valeurs dépassées, celles qui ont ensanglanté l'Europe, et continuent de semer discordes, divisions, chauvinisme et racisme pour les seuls intérêts de politiciens démagogues. Toute une partie de la droite derrière Pasqua et autres De Villiers préparant leur alliance avec l'extrême-droite en pleine décomposition, rêvent de corrompre une partie de l'opinion dans leur croisade nationaliste et chauvine. C'est un piège dangereux.

Les travailleurs n'ont pas à craindre le progrès et les évolutions qu'il impose à la bourgeoisie elle-même. C'est cette bourgeoisie qu'ils ont à craindre et à combattre. Oui, d'une certaine façon, la naissance de l'euro représente un " tournant historique ". Face à la convergence de l'offensive des bourgeoisies européennes contre les travailleurs, c'est au niveau de tout un continent que la classe des salariés, celle qui représente l'avenir, aura à se battre pour construire une véritable Europe de paix et de bien-être, qui loin de faire la guerre ne serait-ce qu'économique aux autres peuples, leur tendra la main, pour coopérer au bien-être de tous.

Les Etats-Unis impatients du retour de Cuba sous leur coupe

Alors que la révolution cubaine a fêté son quarantième anniversaire, les Etats-Unis viennent d’annoncer " de nouvelles mesures de soutien à la population cubaine ". Il faut " traduire " que l’aire de diffusion de la radio anti-castriste émettant de Miami va être élargie, que les liaisons postales et aériennes avec l’île seront facilitées, que les échanges sportifs seront encouragés… Quant à l’embargo qui étrangle Cuba depuis 38 ans, il n’est pas question de l’assouplir. Bien au contraire, d’autres mesures plus déterminantes, celles-là, sont envisagées, dans la droite ligne de la politique de l’impérialisme américain vis-à-vis de Cuba depuis 1959. Véritable défi à quelques kilomètres des USA, la révolution cubaine a payé le prix fort pour avoir débarrassé le pays de la dictature corrompue de Batista et permis à tout un peuple de sortir de la misère, en l’émancipant de l’exploitation des trusts nords-américains et des propriétaires fonciers. L’embargo a mis le pays à genou, entraînant une pénurie sur une série de produits de première nécessité. Isolée depuis la fin des années 80 et la chute de l’URSS et des pays de l’Est, Cuba survit. Et malgré tout son courage, la population n’en peut plus.

Alors, se délectant à l’avance d’une fin qu’ils sentent proche, les Etats-Unis parachèvent l’œuvre de l’embargo. Le retour de Cuba dans le " marché mondial " se fera au rang qui lui sera dévolu, celui d’un pays pauvre surexploité et à qui l’on fera payer par un surcroît d’humiliations ses décennies d’indépendance. En autorisant désormais n’importe quel Américain à envoyer des dollars à des Cubains, en permettant à des restaurateurs privés vivant du tourisme de s’approvisionner en denrées américaines, il s’agit de corrompre la société de l’intérieur. Si le dollar, seule monnaie qui permet déjà depuis deux ans de s’acheter quelque chose hors des rations de l’Etat, se niche dans toute l’économie, c’est le moyen le plus efficace pour balayer tout ce qui reste de la révolution cubaine. Avec le dollar-roi, c’est le retour des trafics en tout genre, de la corruption, de la prostitution, des tripots, bref c’est le Cuba de Batista qui renaît. Seul moyen pour Cuba de faire rentrer des devises, le tourisme de luxe qui se développe est un véritable cheval de Troie qui accélère un peu plus le délabrement des relations sociales issues de la révolution.

Sans doute poussé par la fraction la plus riche de l’immigration cubaine, qui a hâte de rentrer pour reconstituer des fiefs à ses richesses, l’impérialisme américain, sûr de sa force, prépare l’après-Castro. L’impatience le guette, et encore une fois, il est obligé de ne pas lésiner sur les moyens. Cela est une preuve supplémentaire de la profondeur du mouvement révolutionnaire cubain, porté par les paysans pauvres et les travailleurs, qui 40 ans après, est toujours à abattre.