Contre la " politique de fermeté républicaine " de Chevènement et Jospin, la lutte pour la régularisation de tous les sans-papiers continue
La " procédure de régularisation " des sans-papiers, close depuis le 31 décembre, laisse dans la clandestinité et la précarité 63 000 déboutés désormais fichés et connus des préfectures. Des dizaines de milliers de travailleurs immigrés qui navaient pas déposé de dossier et ceux qui avaient obtenu une régularisation temporaire arrivée aujourdhui à expiration se retrouvent dans la même situation. Le comité Diawara estime à " 100 000 les étrangers qui resteront en France sans papiers, à la merci dun patronat avide de surexploitation ".
Chevènement, " miraculé de la République " revenu de " lautre rive ", a réaffirmé dimanche " la continuité dune politique de fermeté républicaine " vis-à-vis des sans-papiers. Fidèle à lui-même, il sen est pris à " la gauche bien-pensante qui, sans le mesurer, fait le lit dune situation dégradée dans nos villes, de ghettoïsation de certains de nos quartiers... et alimente bien évidemment le Front National ". Propos dun spécialiste en démagogie réactionnaire agitant la peur de létranger qui, il y a quelques mois, avait vu la main de " trotskistes anglais " dans les manifestations contre des expulsions à Roissy et qui, ce week-end, reprochait aux Verts dêtre allés chercher Cohn-Bendit... " en Allemagne ".
Jospin, lui, avait déclaré il y a quelques jours : " jai le plus grand respect pour les minorités agissantes mais elles ne peuvent pas lemporter sur les majorités démocratiques ". Un " respect " apprécié par tous ceux que le gouvernement réprime parce quils sopposent à sa politique et se battent pour les droits minimum pour tous. Sirine Diawara a été condamné à un an de prison ferme et ses camarades à plusieurs mois. Plusieurs autres sans-papiers " débarqués " des avions après les protestations des passagers repassent en procès le 28 janvier et risquent le même sort. Et, dans le cadre de la loi Chevènement, des militants ayant pris fait et cause pour les sans-papiers sont poursuivis à Paris, Clermont-Ferrand et Strasbourg.
Chevènement " veut croire que les sans-papiers accepteront dêtre rapatriés ". Nen étant pas tout à fait sûr, il multiplie les lieux de détention, ces prisons spéciales réservées aux étrangers en attente dexpulsion forcée où ils peuvent être enfermés sur simple décision dun préfet ou dun policier, lautorisation du juge -quasi automatique- nétant nécessaire quà posteriori, et où ils subissent lhumiliation et des violences fréquentes en toute impunité.
Les Collectifs Anti Expulsion dénoncent " ce processus concentrationnaire [qui] rencontre cependant quelques résistances... De manifestations en occupations déglises, de grèves de la faim en pétitions, le mouvement des sans-papiers a permis aux milliers de clandestins de sortir de lobscurité, de récolter quelques régularisations et dentraîner avec lui un vaste mouvement de soutien ".
Les Collectifs des sans-papiers, les Collectifs Anti Expulsion, le Comité Diawara appellent à des manifestations dans plusieurs villes pour la régularisation globale de tous avec une carte de 10 ans, larrêt immédiat des expulsions et le retour des expulsés, la fermeture des centres de rétention, labolition de la double peine (prison et expulsion), la libération des sans-papiers incarcérés et labrogation des lois Pasqua-Debré-Méhaignerie-Chevènement.
A Paris, rendez-vous mercredi 20 janvier à 18h 30 métro Odéon et samedi 23 janvier à 13h place du Châtelet. Une manifestation européenne est également prévue le 27 mars à Paris.
Rhône-Alpes : la gauche plurielle agite l'épouvantail du Front national pour justifier son vote à droite, des manuvres politiciennes qui nourrissent le Front national
Le grand cirque de l'élection à la présidence de la région Rhône-Alpes s'est terminé le samedi 9 janvier à trois heures du matin par la victoire de la candidate UDF, Anne-Marie Comparini. Au troisième tour, cette dernière a bénéficié des 60 voix de la " gauche plurielle ", alors qu'elle n'en trouvait que 15 dans son propre camp. Le RPR a finalement choisi de soutenir Pierre Gascon, doyen d'âge de l'assemblée régionale et proche de Charles Millon, qui n'a obtenu que 56 voix. Tandis que les dirigeants des partis de droite s'accusent mutuellement de trahison, ceux de la " gauche plurielle " crient victoire : le front républicain aurait barré la route au péril fasciste représenté par l'alliance de Millon et du Front National.
Pourtant, outre le fait qu'il est totalement illusoire de prétendre lutter contre le fascisme par des combinaisons électorales, le prétendu péril avait perdu toute crédibilité. Charles Millon, qui n'avait pas hésité à s'appuyer sur le FN pour satisfaire ses ambitions, avait été lâché par les états-majors nationaux de la droite et n'avait aucune chance d'obtenir la majorité. N'ayant obtenu que 38 voix au premier tour, il en a tiré les conclusions et s'est retiré. Dans le même temps, la déchirure du Front national se manifestait par la présentation de deux candidats. Les partisans de Bruno Mégret, accusés par Le Pen de rouler pour l'Elysée, et voulant se laver de tout soupçon à quelques jours du congrès qu'ils ont convoqué, se sentaient obligés d'adresser à Millon des exigences inacceptables. L'axe entre le FN et Millon était bien mort.
Le Parti socialiste n'en a pas moins maintenu sa stratégie, retirant la candidature de Jean-Jack Queyranne alors même que celui-ci avait une chance d'être élu, et choisissant de remettre en selle la droite. Il est clair que ce choix n'était pas déterminé par la situation réelle de la région Rhône-Alpes, mais par la perspective d'autres échéances électorales. Il s'agissait de semer la zizanie entre le RPR, Démocratie Libérale et les centristes de l'UDF, afin d'éviter si possible qu'ils ne présentent une liste commune aux européennes. Si ce dernier point n'est pas acquis, les divisions de la droite se sont effectivement étalées au grand jour.
Si les Verts locaux ont suivi sans difficulté une orientation qu'ils préconisaient depuis le début, puisqu'ils proposaient même de soutenir dès le premier tour une candidature de la " droite républicaine ", le PCF s'est trouvé dans une situation plus difficile. Jusqu'au vendredi matin, il se déclarait opposé à un " arc républicain " et convaincu que Jean-Jack Queyranne pouvait l'emporter. Son ralliement à la stratégie de ses alliés montre à quel point il est désormais lié par sa participation au gouvernement. Ce revirement ne passe pas cependant sans difficulté, et nombre de militants et d'élus locaux, dont le député maire de Vénissieux, ont exprimé leur stupéfaction : des critiques qui ont donné quelques pudeurs hypocrites au PCF qui s'est abstenu lors de l'élection des vice-présidents.
L'alliance de Charles Millon et de son équipe avec le Front national avait provoqué une légitime indignation parmi les travailleurs et la jeunesse. Chacun de leurs déplacements dans la région était l'occasion de manifestations. Son invalidation avait été accueillie avec une satisfaction bien normale par les militants ouvriers et tous les démocrates, et cela d'autant que Millon semblait préfigurer une nouvelle stratégie nationale de la droite.
Le Parti socialiste a utilisé au mieux de ses intérêts cette saine réaction, se servant de l'épouvantail fasciste pour faire oublier la politique réactionnaire du gouvernement. Mais la manuvre a ses limites. Aujourd'hui l'épouvantail est en lambeaux et, grâce à la " gauche plurielle ", l'UDF est installée aux commandes de la région. Une position moins précaire qu'il n'y paraît : la nouvelle présidente a le soutien de Raymond Barre, maire de Lyon, et nombre d'élus RPR qui avaient soutenu Millon, puis Gascon, se rapprocheront sans doute de la mangeoire dans les mois qui viennent. Mais le pire est sans doute que le spectacle offert par ces combines politiciennes qui ne visent qu'à gagner ou à conserver des postes rémunérateurs alimente la démagogie des chefs des deux factions du Front National, ceux-là même que la " gauche plurielle " prétend combattre.
Pour lan 2000, Allègre et Royal veulent rentabiliser l'école.
Allègre poursuit un travail, commencé avant lui, de démantèlement du service public : comment adapter lécole aux besoins du. capital, et ceci dès que l'enfant entre dans le système scolaire ? De la réforme des lycées et l'allégement des programmes lourd de conséquence, en passant par la baisse du salaire des profs Allègre et Royal sortent " la Charte pour bâtir l'école du XXIème siècle ". Fondé sur la défense de "lécole de la République" et faisant référence à cette nouvelle donnée quest la mondialisation, les deux ministres posent d' " une manière nouvelle le problème de savoirs fondamentaux ", et s'appliquent à définir ce qu'il est nécessaire de faire pour que l'école réponde "à ce nouveau défi ". La Charte sarticule autour de trois idées :
Enfin, pour être sûr du résultat, la Charte engage l'INRP (Institut National de Recherche Pédagogique), non pas à évaluer le bien fondé d'un tel dispositif mais à abonder dans le sens de ce que disent les ministres en dégageant " les principales modalités d'organisation pédagogique et éducative ainsi que les formes de partenariat susceptibles de garantir les apprentissages scolaires et le développement de chaque enfant ". Dans l'idée première, la Charte du XXIèrne siècle devait contenir une expérimentation " d'innovation pédagogique ", celle-ci devait concerner 2000 écoles, cette expérimentation a été retirée du projet car, comme l'écrivait le Figaro du 15.11.97 : " la crainte du gouvernement (est) que lexpérimentation ne débouche automatiquement sur une demande d'embauche dinstituteurs". Alors que S. Royal s'exprimait en ces termes devant la presse : " tout se fera à moyens constants, car il ne s'agit pas dun guichet ouvert pour des moyens supplémentaires " ! Aujourd'hui, seules les écoles volontaires participent à la Charte sur la base d'un projet, après consultation du conseil des maîtres et du conseil décole. Certains enseignants n'ont pas eu connaissance de ce texte. Pour d'autres, il est flou, et ceux qui se sont réunis pour une lecture collective en conseil des maîtres nont toujours pas compris les finalités du projet. Un tel projet ne répond évidement pas à leurs attentes, en moyens supplémentaires tant matériels qu'humains, ni aux revendications du 93, mobilisé l'année dernière, où chacun se reconnaissait parce qu'il était porteur des revendications sur un plan national. La charte pourtant rédigée en novembre 1998, n'a pas fait l'objet dans la presse du SNUIpp (syndicat majoritaire des enseignants du primaire) dune analyse précise qui aurait permis à chacun de se situer. Quant à la FSU, son seul regret est l'abandon de l'expérimentation d'innovation pédagogique.
Il revient donc aux personnels des écoles, et aux parents de se mobiliser, non pas pour défendre l'école de la république, qui ne fait que reproduire en son sein les inégalités sociales, mais pour revendiquer, face à cette société, vecteur du chômage et de la violence, des moyens supplémentaires pour construire lécole que nous voulons.
Les patrons ne supportent pas les inégalités entre eux
A loccasion de la fusion du groupe allemand Daimler avec le groupe américain Chrysler, en mai dernier, sest posé le problème dégaliser les salaires des patrons des deux groupes. Car Robert Eaton, patron de lex-Chrysler, était habitué à recevoir un salaire de 6 millions de dollars par an (plus de 30 millions de francs). Or, son nouveau collègue, patron de lex-Daimler, Jürgen Schrempp, gagnait moitié moins. Schrempp a proposé, pour remédier à cette scandaleuse inégalité sociale, de garder son ancien salaire, mais de sattribuer un bonus annuel qui rattrape lécart. Eaton, bon prince, a accepté, dautant quil venait personnellement de se mettre dans la poche 70 millions de dollars (plus de 350 millions de francs) au cours de lopération de fusion.