Pour un front unique avec les travailleurs, électeurs, sympathisants ou militants du PC comme du PS
La préparation des élections européennes a remis au premier plan les relations entre le Parti communiste et l'extrême-gauche, la presse se complaisant à présenter la liste LCR-LO comme une liste destinée à faire pièce à la liste du Parti communiste. Liste du Parti communiste ou, plutôt et plus précisément, liste de Robert Hue ouverte vers le Parti socialiste.
Il nous faut d'abord remarquer que se livrer à ces petits jeux de savoir qui est contre qui, en se référant à la seule arithmétique des voix, arithmétique parlementaire, est pour la presse une façon d'intégrer la liste LCR-LO dans la sphère de ses préoccupations, c'est-à-dire politiciennes.
Pour les révolutionnaires, une campagne électorale n'a d'autres objectifs que de contribuer à préparer les travailleurs à la défense de leurs propres intérêts, c'est-à-dire de les amener à prendre conscience de la nécessité pour eux d'intervenir sur la scène politique et sociale, avec en filigrane et en conséquence de ce raisonnement, la nécessité de s'organiser. Avoir des élus n'a aussi d'autre objectif que de conquérir des positions afin d'agir pour accomplir cette tâche.
Cela signifie que pour nous, les électeurs sympathisants ou militants du Parti communiste ne sont pas des adversaires, mais bien au contraire des alliés. Des alliés que nous respectons, c'est-à-dire que nous n'avons nul besoin de ruses ni de détours pour nous adresser à eux. Nous nous adressons à eux comme nous nous adressons à l'ensemble des travailleurs de ce pays, comme nous nous adressons aussi à tout le milieu populaire qui reste sous l'influence de la politique du Parti socialiste.
Nous nous adressons à eux pour leur dire toute la vérité, rien que la vérité, c'est-à-dire que leur parti est passé avec armes et bagages du côté de l'ordre social dont ils sont à divers titres les victimes et pour leur proposer d'exprimer en toute clarté la condamnation de ce nouveau reniement en votant pour la liste LCR-LO.
Nous leur tendons aussi la main pour leur proposer ensemble de discuter les moyens de faire entendre nos intérêts, au-delà du terrain électoral, dans les entreprises, les bureaux et les cités, de regrouper nos forces pour imposer les exigences légitimes du monde du travail.
C'est quotidiennement que nous devons tout faire pour créer les conditions d'une saine discussion et collaboration entre les militants d'extrême-gauche et ceux du Parti communiste qui entendent rester fidèles aux intérêts de leur classe, c'est-à-dire qui se battent pour que leur parti quitte le gouvernement.
Il serait certes possible, il est plus juste de dire il sera possible à l'extrême-gauche, de rechercher des alliances avec le Parti communiste lui-même, mais ces alliances supposeraient que le Parti communiste rompe avec la politique gouvernementale. Mais surtout la condition d'une telle politique est que l'ensemble de l'extrême-gauche soit d'abord capable d'unir ses propres forces en un seul grand parti lui donnant les moyens de peser réellement dans le combat politique bien plus largement que sur le simple terrain électoral.
Proposer une politique de front unique non seulement à la base en direction des sympathisants, électeurs ou militants du Parti communiste, mais en s'adressant directement à la direction du Parti communiste, à Robert Hue, sans mettre au premier plan du combat politique le combat pour l'unification des forces révolutionnaires, devient alors une petite manuvre électorale destinée à gagner les voix du Parti communiste
Au-delà de cette nécessité d'avoir en permanence le souci de collaborer avec le milieu influencé par le Parti communiste, c'est aussi vers l'ensemble du milieu de gauche, y compris celui qui est resté fidèle souvent malgré lui-même au Parti socialiste, que nous devons nous tourner.
Mais là encore, il n'est pas concevable d'avoir une telle politique ouverte à l'ensemble des milieux ouvriers et populaires sans rompre avec toute forme de sectarisme dans les relations entre différentes tendances d'extrême-gauche. Sinon, l'ouverture devient une manuvre opportuniste qui se protège de l'autre main par le sectarisme.
La défense des intérêts de l'ensemble du mouvement ouvrier ne peut se faire que dans le cadre d'une démocratie pleine et entière, non seulement entre tendances qui se réclament de ce mouvement, mais aussi à l'égard de l'ensemble des travailleurs.
PCF : des opposants contre Hue mais qui noffrent pas de perspectives aux travailleurs
350 opposants au sein du PCF à la direction de Robert Hue se sont réunis dimanche 14 février en région parisienne pour tenir leurs états généraux. Les différentes composantes de cette opposition sont disparates puisque certaines regardent avec nostalgie le passé stalinien du PCF et sont résolument hostiles à l'extrême-gauche tandis que le courant de la Gauche communiste n'hésite pas à débattre avec des organisations trotskystes.
Mais ce qui les rassemble n'augure rien de très positif, si on se place du point de vue des intérêts des travailleurs. Leur rejet de la dérive social-démocrate de Robert Hue et de son équipe et de la participation du PCF au gouvernement Jospin ne les amènent pas à défendre clairement et ouvertement un programme de lutte de classe susceptible de rallier et de redonner confiance aux militants communistes qui sont écoeurés par l'évolution et la politique de Hue. Certes, ils ont mis en place " un comité permanent de liaison " entre eux, chargé d'élaborer " une plate-forme communiste alternative ". Mais à part le fait qu'ils ont affiché des symboles du communisme comme les drapeaux rouges et la faucille et le marteau, ils en ont aussi mis en avant d'autres, comme un drapeau tricolore et des citations de Thorez, qui montrent leur attachement au temps où le PC était fort sur la base d'une politique tout aussi contraire aux intérêts de la classe ouvrière que celle de Hue actuellement. C'est tromper les travailleurs et les jeunes que de leur présenter Thorez comme un bon communiste, lui qui, dans l'après-guerre, était dans un gouvernement qui a commis le massacre de Sétif en Algérie, démarré la guerre d'Indochine et noyé dans le sang la révolte du peuple malgache, tandis qu'en France il demandait aux travailleurs de " retrousser leurs manches " pour le compte du patronat.
Jusqu'à preuve du contraire, ces opposants-là au sein du PCF reprochent surtout à Hue d'être " euroconstructif " et de ne plus être " anti-maastrichien ", continuant à jouer sur la fibre nationaliste au lieu de proposer aux militants communistes une politique offensive sur un terrain de classe, affirmant la nécessité de faire converger les luttes à l'échelle européenne et de construire une Europe des travailleurs, une Europe des Etats-Unis démocratiques et socialistes d'Europe. Il apparaît que nombre de ces opposants à la ligne de Hue, qui ont des qualificatifs virulents contre lui, n'ont pas pour autant une politique radicale ni une bien grande audace puisqu'ils ont décidé de ne surtout pas constituer une autre liste aux européennes. Un délégué du Pas-de-Calais aurait d'ailleurs dit selon " le Monde " que ce serait " se couper de la bataille du 30ème congrès ". On ne peut mieux révéler ses soucis et ses calculs d'appareil. Car pour ce type d'opposants, il s'agit avant tout de drainer le mécontentement des militants pour renforcer leurs positions au sein du PCF, et non d'aider les travailleurs à y voir clair sur l'évolution de leur parti et à élaborer avec eux un programme conforme aux intérêts du monde du travail. Les militants communistes dépourvus de tels calculs et sincèrement préoccupés par cela n'ont rien à attendre de tels opposants. C'est avec d'autres militants, en premier lieu les révolutionnaires, qu'ils pourront débattre d'un tel programme et construire les instruments politiques pour le faire passer dans la réalité.
Discussions autour du projet de programme : à propos du fétichisme des formules
Bien des camarades souvent d'autres tendances nous ont interpellés à propos de notre projet de programme et de statuts en nous reprochant de ne pas faire référence à la " dictature du prolétariat " ou au " centralisme démocratique ". La première formule date du " Manifeste du parti communiste ", elle indique la nécessité pour les opprimés d'imposer leur volonté révolutionnaire, leur dictature révolutionnaire aux classes dominantes parasitaires. Cette dictature contre les oppresseurs exige la plus large démocratie pour les opprimés, elle est même, du point de vue de Marx, la condition indispensable de cette démocratie. Cette formule de Marx, écrite en 1847, a gardé du point de vue du raisonnement théorique toute sa valeur, mais cela ne signifie pas que nous devions la reprendre telle quelle, indépendamment du sens que l'histoire lui a donné. Les idées politiques comme les formules qui servent à les résumer, souvent d'ailleurs de manière unilatérale et arbitraire, n'ont pas une signification indépendante des conditions historiques. Bien au contraire même, elles n'ont toute leur portée, leur signification, qu'en fonction des conditions historiques du combat politique qui les a forgées. Que tout révolutionnaire considère aujourd'hui le " Manifeste du Parti communiste " comme une uvre fondamentale qu'il nous faut largement populariser dans le monde du travail, ne signifie pas que nous le reprenions intégralement tel qu'il fut écrit il y a plus d'un siècle. L'histoire nous impose de donner une forme adaptée aux nouvelles conditions du combat politique.
Aujourd'hui, la formule de dictature a été trop marquée par l'usage qu'en a fait le stalinisme pour que nous puissions la reprendre telle quelle. Ceci dit, il serait faux d'en conclure que le contenu théorique de cette formule est erroné, pire, de la rendre responsable de la dictature stalinienne. Une formule politique aussi juste soit-elle est bien impuissante à faire l'histoire et ce serait un raisonnement parfaitement idéaliste que de rendre responsable la formule du " Manifeste du Parti communiste " de la dictature stalinienne, faux et superficiel au sens où il y a bien d'autres formules de Marx ou de Lénine dont Staline s'est emparé pour masquer sa dictature alors qu'elles en étaient la plus radicale condamnation.
Il arrive la même aventure à la notion de " centralisme démocratique ", formulée par Lénine au début de ce siècle dans son combat pour construire en Russie un parti ouvrier prêt à lutter pour la prise du pouvoir par les masses opprimées pour leur propre émancipation. Cette formule a été galvaudée, déformée, elle a servi de justification à toutes sortes de formes organisationnelles dont la pire a été la dictature de Staline sur l'ancien Parti bolchévik brisé. Il serait tout aussi faux de rendre responsable cette formule de Lénine de l'imposture et de l'usurpation staliniennes que de la reprendre à notre compte aujourd'hui telle quelle. Par contre, il nous appartient d'en actualiser le contenu et de trouver, à travers le combat, la forme moderne d'un parti visant la prise du pouvoir par les travailleurs pour leur propre émancipation, c'est-à-dire alliant l'efficacité et la discipline à la plus large liberté comme à la plus large démocratie.
Le parti que nous voulons construire préfigure, ou tend à préfigurer, la société que nous voulons construire, une société libre et fraternelle où l'épanouissement de chacun sera la condition de l'épanouissement de tous. Rêve utopique diront les sceptiques, ou tout simplement choix et conscience révolutionnaires, qui deviendra une réalité par le travail concret, et non simplement par la vertu de quelques formules.
Pour être libres, menons la lutte de classe aux côtés du monde du travail
Voix de la jeunesse révolutionnaire n°5 - 8 février 99
Certaines personnes nous disent que la lutte des classes nexiste plus, que cest un vieux souvenir du XIXème siècle et que depuis, les choses ont changé. On serait aujourdhui dans une véritable démocratie où tous auraient les mêmes droits, les mêmes devoirs et surtout les mêmes intérêts. Voilà bien une idée fausse de ce quest notre société.
La réalité, cest que nous sommes dans une société de classe. Ceux qui prétendent le contraire et qui essaient de nous en convaincre y ont tout intérêt : ce sont les idéologues de la classe dominante, la bourgeoisie qui mène bel et bien la lutte de classe. En effet, la bourgeoisie, les financiers, forment une classe sociale qui trouve sa cohésion dans des intérêts liés à la propriété privée, grâce à laquelle ils s'approprient le produit du travail de la collectivité. Il sagit pour eux davoir un système et un Etat qui leur assurent la protection de leur propriété privée et qui leur permettent de faire fructifier leurs capitaux. Avec l'aide de lEtat, ils mènent une lutte contre limmense majorité de la population, le monde du travail.
Ils lexploitent, se servent de son travail pour faire leurs profits, nhésitant pas à condamner de larges couches de la population au chômage ou au travail précaire, dans le mépris le plus total de toute liberté et de toute dignité.
Le monde du travail, lui, na rien à perdre : ses adversaires, les financiers, ne lui laissent rien. Cest pourtant lui qui produit tout et qui fait fonctionner intégralement léconomie. Cette classe, cest le camp que nous avons choisi. Pas parce que les travailleurs ont de quelconques vertus morales mais parce que ce camp est celui de la majorité, celle qui n'exploite personne et qui représente le progrès face à larchaïsme du capitalisme. C'est le seul qui puisse, par sa lutte, débarrasser la société des rapports de domination, de la violence, du chômage et de la crise.
Cest pour nous la seule manière dêtre vraiment libres. Alors, à la jeunesse, à tous ceux qui ont soif de liberté, de rejoindre ce camp social et ses idées, les idées socialistes et communistes, pour mener la lutte de classe contre le parasitisme du monde de la finance, et pour construire la société de demain, une société sans exploitation ni oppression.