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Ocalan banni de son propre procès, menacé de mort : un simulacre de justice contre le peuple kurde, avec la complicité des grandes puissances

Alors qu’Abdullah Ocalan, le dirigeant du Parti des travailleurs du Kurdistan, est maintenu incarcéré dans un isolement total sur l’île-prison d’Imrali, en mer de Marmara, depuis son arrestation le 15 février dernier, la Cour de sûreté de l’Etat turc vient d’ouvrir son procès en son absence, vendredi 30 avril.

Les procureurs de cette juridiction d’exception ont d’ores et déjà requis contre lui la peine de mort pour " trahison et atteinte à l’intégrité territoriale ".

Ce simulacre de procès s’appuie sur un " acte d’accusation " de 139 pages monté de toutes pièces dans le but de condamner Ocalan à la pendaison, dans l’espoir de porter un coup fatal à la résistance et à la révolte de la population et de la jeunesse kurde opprimées. Mais l’Etat turc est si peu sûr de lui qu’il a refusé à Ocalan de pouvoir être présent à son procès pour des " raisons de sécurité ". De même, il a refusé la présence d’observateurs étrangers lors des audiences, y voyant " une forme d’ingérence intolérable ".

L’Etat turc mène depuis plus de 15 ans une guerre sans relâche contre le peuple kurde dans le sud du pays, faisant plus de 30 000 morts, déplaçant près de 3 millions de personnes, massacrant, emprisonnant, détruisant plus de 3000 villages et assassinant des centaines d’opposants et d’intellectuels kurdes, avec le silence complice de tous les pays impérialistes, dont la France.

Lors de la visite en France du chef de l’Etat turc, Chirac vient d’ailleurs de se déclarer " convaincu " que " nous finirons par éliminer les incompréhensions ou les difficultés qui peuvent demeurer entre la Turquie et l’Europe " et a " formé le vœu d’une relance des relations ".

Le nouveau premier ministre Bulent Ecevit qui vient d’être chargé de former le gouvernement à la suite des élections législatives, est bien décidé à obtenir la tête d’Ocalan. C’est lui qui a organisé et annoncé, " la voix tremblante d’émotion ", la capture d’Ocalan dont l’image, menotté devant un grand drapeau turc, a été largement diffusée par les télévisions en février dernier.

Ocalan, et l’ensemble du peuple kurde opprimé, ne peuvent compter que sur le soutien international de tous les militants ouvriers, démocrates, qui ne peuvent que dénoncer cette mascarade de procès qui vise à faire taire toute opposition.

Un jeune nigérian assassiné lors de son expulsion d’Autriche

Marcus O., un nigérian de 25 ans, est mort étouffé le 1er mai lors de son expulsion de Vienne vers Sofia dans un avion de Balkan Air. Enchaîné sur son siège, la bouche scotchée, les trois policiers qui l’accompagnaient ont prétendu avoir cru qu’il tentait de se dégager de son siège alors qu’il luttait contre la mort.

Face aux protestations de nombreuses associations et des Verts autrichiens, le ministre de l’Intérieur a déclaré qu’il n’avait " aucune responsabilité, directe ou indirecte " : " je jure que je ne savais pas que les expulsés étaient parfois bâillonnés " !

En septembre dernier, une jeune femme nigérianne, Semira Adamu, est morte à Bruxelles dans les mêmes conditions, étouffée par un coussin. En novembre, une jeune femme enceinte, Blandine K., a perdu son bébé lors de son expulsion violente de Belgique vers le pays où son mari venait d’être exécuté.

En France, Diawara et ses compagnons sont en prison pour s’être opposés à leur expulsion et avoir bénéficié du soutien des passagers qui refusaient d’embarquer dans l’avion où ils avaient été menottés et bâillonnés.

Dans un communiqué de presse, le MRAP dénonce : " Depuis 1992, plus de 900 personnes ont payé de leur vie sur des embarcations de fortune, dans des précipices ou sous les balles des polices des frontières, le " tort " d’avoir voulu échapper à la misère ou à la persécution en venant chercher refuge dans l’Union européenne ".

Une Europe dont les gouvernements bombardent aujourd’hui les peuples de Yougoslavie et qui mènent ici une guerre permanente aux plus pauvres et aux plus faibles en les traquant, les expulsant et parfois en assassinant.

6800 milliards de dollars

C’est le montant total de la valeur des actions de 8 principales bourses européennes qui viennent de signer un accord pour mettre en place une seule plate-forme électronique de cotation, avec une réglementation commune. Cela représente plus de trente fois le budget de l’Etat français.

L’objectif de ces 8 places boursières est de créer un marché unique des actions qui pourrait concurrencer Wall Street, la bourse américaine, pour attirer plus d’actionnaires… mais Wall Street reste loin devant, avec plus de 10 700 milliards de dollars d’actions !

La CSG premier impôt direct sur les ménages : l’Etat fait payer le monde du travail

En 1998, alors que l’impôt sur le revenu a fait rentrer 304 milliards de francs dans les caisses de l’Etat, la Contribution Sociale Généralisée a rapporté 316 milliards. On se souvient en effet que depuis le 1er janvier 98, le gouvernement de la " gauche plurielle " a porté la CSG de 3,4 % à 7,5 % sur les salaires. La CSG porte sur tous les revenus du monde du travail, chômeurs et retraités compris à l’exception du RMI. Le gouvernement Jospin, pour faire accepter la hausse de la CSG, l’avait présentée comme un impôt qui pesait aussi sur les revenus de la Bourse, mais on apprend que l’augmentation de la CSG rapporte 50 milliards provenant pour 34 milliards des salaires, pour 9 milliards des retraites et des allocations chômage… et 5 milliards des revenus du capital.

Corse : les " vérités officielles " s’écroulent les unes après les autres, mettant à nu les méthodes de l'" Etat de droit "

Jospin et Chevènement ont bonne mine. La semaine dernière, ils affirmaient leur confiance dans le préfet Bonnet, et celui-ci se retrouve mouillé jusqu’au cou dans une affaire qui éclabousse le gouvernement. Pour se dépêtrer de la crise politique qui s’ouvre, il ne leur suffit pas de faire sauter le fusible préfectoral, il leur faut trouver une nouvelle ligne de défense.

Cela ne va pas être facile. La première version, celle des gendarmes qui prétendaient être totalement étrangers à l’incendie de la paillote, était truffée d’invraisemblances. C’est alors qu’a été avancée par certains élus socialistes l’hypothèse d’une manipulation, d’un piège destiné à déstabiliser le préfet de région : l’action de Bernard Bonnet, décidé à mettre un terme à la corruption et aux méthodes maffieuses qui régneraient dans l’île, aurait heurté trop d’intérêts. C’était la version du complot, d’autant plus propre à rassurer l’opinion de gauche que ce sont des élus de droite qui sont impliqués dans la plupart des " affaires corses ", des affaires qui n’ont d’ailleurs rien de spécifiquement insulaires, puisqu’il s’agit de trafics d’influence et de prises illégales d’intérêts. Mais les preuves de la responsabilité des gendarmes dans l’incendie s’accumulant, il restait à établir à quel niveau avait été donné l’ordre. Les aveux du capitaine Ambrosse, qui avait commandé l’expédition et affirmait avoir agi sur l’ordre de son colonel, puis ceux du lieutenant-colonel Cavalier, indiquant que la décision avait été prise par le Préfet lui-même, puis les aveux même du préfet et de son chef de cabinet ont jeté à bas tout le dispositif de défense.

Le gouvernement est désormais contraint de trouver une nouvelle vérité d’Etat. Le Préfet de région et les chefs de la gendarmerie auraient été mus par une impatience légitime face aux difficultés de toutes sortes qu’ils rencontraient dans l’accomplissement de leur mission. Des chevaliers blancs en quelque sorte, qui se sont affranchis de la légalité pour mieux lutter contre le crime. Dans cette version, le gouvernement n’est pas trop malmené. Charge à lui de rappeler vigoureusement que, selon l’expression de François Hollande, " l’Etat de droit ne se divise pas " et que les défenseurs de l’ordre qui, même avec les meilleures intentions du monde, s’aventureraient à jouer les Rambo, seraient sévèrement sanctionnés.

Pourtant cette explication est à peine avancée que son incohérence est manifeste, tant les motifs qui auraient poussé le Préfet à engager une action de ce type apparaissent minces, même si la " méthode Bonnet " ressemblait à celle d’un gouverneur colonial venu maintenir l’ordre chez les " indigènes ". Au départ, il s’agit d’une simple affaire de constructions illégales : pour tirer davantage de profits du tourisme, nombre de restaurateurs se sont installés sur les plages ou ont agrandi leurs locaux sans trop se préoccuper du classement des zones littorales ni des permis de construire, et les autorités ont fermé les yeux. Le gouvernement a décidé de mettre un terme à ces infractions et d’obliger à la destruction des installations illicites. Les propriétaires ont protesté et quelques-uns, dont celui du restaurant " Chez Francis ", qui bénéficiaient d’appuis politiques, ont obtenu un sursis à exécution afin de profiter au moins de la prochaine saison estivale. Il ne s’agissait pas d’assassinats, ni d’escroqueries considérables, tout juste de petites combines juteuses couvertes par le clientélisme de certains élus : de quoi agacer le chef de la brigade de gendarmerie locale, pas de quoi transformer un Préfet en pyromane. La culpabilité de Bernard Bonnet étant avérée, il faut bien chercher un mobile plus crédible, et l’hypothèse d’une provocation destinée à faire monter les tensions et à justifier un renforcement des opérations de police devient la plus probable. Après tout les attentats non revendiqués n’ont pas manqué ces dernières années. Mais alors, comment croire que le préfet ait agi en franc-tireur ?

Une crise politique est ouverte. La droite monte au créneau, exige la démission du gouvernement. Mais Chirac n’a pas d’autre choix que de soutenir Jospin : ne s’entendent-ils pas comme larrons en foire dans l’aventure guerrière des Balkans ? Lors du conseil des ministres du 5 mai, le Président est intervenu pour appeler à " restaurer l’exemplarité et l’efficacité de l’Etat ", mais les gaullistes sont loin d’être des novices en matière de barbouzes, et Chirac était Premier ministre au moment de l’opération meurtrière des gendarmes contre les indépendantistes canaques à la grotte d’Ouvéa. Ils peuvent claironner que " l’enquête ira jusqu’au bout ", quand les uns comme les autres parlent " d’Etat de droit ", ils pensent aux droits que s’octroie l’Etat bourgeois pour maintenir son ordre, avec ses polices officielles mais aussi ses services spéciaux. La nomination de Jean Pierre Lacroix, spécialiste des Renseignements généraux et de la Nouvelle Calédonie, en remplacement de Bernard Bonnet, laisse prévoir peu de changements dans ce domaine.