Editorial



BNP, SG, Paribas : nouvel épisode des concentrations financières encouragées par le gouvernement, au mépris des intérêts des travailleurs et de la population

Cette semaine, devait s'achever la bataille financière entre la BNP, la Société Générale et Paribas, dont la presse, les médias, et les publicitaires tiennent la chronique depuis des mois. La " démocratie des actionnaires " n'a rien réglé, en fait, tout juste un nouvel épisode du feuilleton.

Les banquiers, avec le soutien du gouvernement, voudraient nous persuader que leurs intérêts et les nôtres se confondent. Ils se fichent de nous. Cette bataille menée à coup de milliards gagnés sur le dos des travailleurs, ne sert que leurs intérêts et leurs ambitions à travers une lutte d'influence sans merci.

Elle est bien à l'image de l'anarchie du libéralisme, de l'économie de marché.

Il y a six mois, en février, la Société Générale et Paribas avaient annoncé leur fusion. Puis, à la mi-mars, la BNP faisait surenchère en déclarant son intention de racheter les deux précédentes, pour créer la plus grande banque française. Et Strauss-Kahn d'applaudir à chacune de ces annonces : enfin le capitalisme français allait jouer dans la cour des grands et être en mesure de faire face à ses concurrents allemands, anglais, et pourquoi pas japonais et américains. Enfin, on discutait finance sur la place publique, de quoi remplir d'aise nos ministres socialistes !

Aujourd'hui, la fusion Société Générale - Paribas a éclaté. C'est la BNP qui reprend le contrôle de Paribas, avec 65,1 % des actions. Mais celle-ci ne peut réaliser la fusion à trois, car elle ne possède que 36,8 % des actions de la Société Générale.

Comment croire que dans cette valse-hésitation des majorités financières, il y ait quoi que ce soit qui puisse représenter les intérêts des travailleurs comme de la population.

Le gouvernement sous couvert d'une commission de contrôle, devrait donner son arbitrage, arbitrage probablement favorable à la BNP afin, selon les propos de Strauss-Kahn, de créer un " secteur financier français fort et dynamique au cœur de l'euro ". Il ne semble pas pressé de trancher, soucieux de ménager ses amis banquiers dont il ne cherche qu'à défendre au mieux les intérêts.

L'objet de cette fusion, à deux ou à trois, est de concentrer les capitaux, parce qu'il faut sans cesse plus d'argent aux multinationales pour faire face à la mondialisation, racheter de nouveaux concurrents, préparer les fusions à l'échelle européenne, et surtout satisfaire leurs actionnaires, leur verser toujours plus de dividendes pour alimenter sans fin la chaudière des Bourses de la planète.

A écouter les apôtres du libéralisme, le marché devait créer ce nouveau fleuron de " notre " économie, aussi nécessaire que " les fonds de pension à la française " pour contrer ceux des Etats-Unis. Mais le marché aura besoin, une fois encore, d'un coup de pouce gouvernemental. Le marché ne sert aux bourgeois qu'à se disputer les profits qu'ils tirent de l'exploitation du monde du travail, avec l'aide de l'Etat sans lequel ils ne seraient rien.

L'objectif de ces grandes manœuvres capitalistes est de faire plus de profits, en supprimant des milliers d’emplois et en constituant des groupes de plus en plus gros pour faire face aux concurrents. C'est à la même logique qu'obéit la bataille boursière qui oppose Elf et Total-Fina. " Libérer les énergies " proclame le PDG d'Elf dans la presse sur des pages entières de publicité. Oui, libérer les énergies dévastatrices du capital, des appétits d'une petite minorité avide de puissance, jouet de la concurrence. Et cela contre les salariés.

La BNP et la Société Générale ont deux réseaux d'agences présents dans les mêmes villes et à l'étranger. Ils ont des services informatiques et financiers effectuant les mêmes tâches. Pour les directions de ces banques, fusionner c'est préparer les suppressions des emplois " en doublon " comme ils disent. Ainsi, pour le PDG de la BNP, ce serait huit milliards d'économies qui seraient réalisés en trois ans grâce à la fusion. Les salariés de la BNP savent bien comment, puisque depuis cinq ans, la banque a supprimé plus de 7000 emplois. C'est grâce à la même politique que la Société Générale a doublé son bénéfice sur le premier semestre 99. Elle fait en six mois plus de profits que sur toute l'année 98 ! Ceux de Paribas progressent de 56 %.

C'est cette politique que reprend pleinement à son compte le gouvernement.

D'ailleurs, de son côté, Martine Aubry, profitant des congés d'été, a fait valider la nouvelle convention du secteur bancaire, apportant son appui total au patronat du secteur, passant par-dessus la tête des syndicats, pour imposer de nouvelles attaques aux 200 000 salariés de la branche.

Pas plus l'arbitrage du gouvernement que la logique des marchés financiers ne sont démocratiques ou transparents. Les uns et les autres obéissent à la même logique du profit, aux mêmes intérêts de la minorité de privilégiés, contraires à ceux de la population.

Le seul contrôle qui pourrait être réellement démocratique serait le contrôle des travailleurs des banques eux-mêmes, associés à la population.

C'est à cette seule condition qu'une grande banque, voire une banque unique, serait un progrès utile. Elle permettrait de centraliser tous les capitaux, de coordonner leur utilisation. La population pourrait connaître à tout moment leur disponibilité, les situations réelles des comptes des entreprises, comme de ceux de l'Etat. Cette transparence serait un pas vers la maîtrise d'une économie libérée du fonctionnement aveugle du marché, d'une économie dans laquelle la population déciderait elle-même de l'organisation de la production et des services en fonction de ses besoins.

Utopique ? Bien moins que de croire les boniments de ceux qui prétendent que le marché, c'est la démocratie et le progrès.

 

Yaguine Koita et Fodé Tourkana, victimes d’un ordre mondial injuste et des politiques d’immigration des pays riches

La mort horrible de deux adolescents guinéens, victimes du froid alors qu’ils s’étaient dissimulés dans la soute du train d’atterrissage d’un avion à destination de Bruxelles, a suscité quelques réactions de compassion parmi les responsables politiques. Nicole Fontaine, la nouvelle présidente du Parlement européen, s’est déclarée bouleversée par cette tragédie. Mais si son émotion est sans doute réelle, accentuée par la jeunesse de Yaguine Koita et de Fodé Tourkana, elle ne semble pas l’avoir conduite à s’interroger sur les causes de ce drame.

Ce n’est pourtant pas la première fois que des immigrants clandestins meurent ou sont retrouvés dans un état physique lamentable pour s’être ainsi exposés aux températures très basses qui règnent dans les soutes d’un avion en vol. D’autres risquent leur vie dans de petites embarcations, en franchissant de nuit le détroit de Gibraltar, et chaque année plus d’une centaine s’y noient. De la même manière des centaines de Mexicains périssent en traversant à la nage le Rio Grande ou disparaissent dans le désert d’Arizona.

Capitaux et marchandises circulent de plus en plus librement et l’Organisation Mondiale du Commerce, créature des grandes puissances impérialistes, veille à lever toutes les entraves à des échanges qui se font au détriment des pays pauvres. En revanche les frontières demeurent hermétiquement fermées à celles et ceux qui veulent fuir la guerre et le sous-développement. Ceux qui sont responsables de " la misère du monde " se refusent à en assumer les conséquences mais, tant que perdurera un ordre mondial inégalitaire, des Yaguine et des Fodé risqueront leur vie pour gagner des contrées plus prospères.

Les discours hypocrites des dirigeants guinéens, mettant en garde la jeunesse contre les illusions de l'émigration, ne valent guère mieux que ceux des chefs d’Etat occidentaux. La lettre retrouvée auprès des deux jeunes victimes décrivait les conditions de vie en Afrique, la maladie, la malnutrition, le manque d’éducation, l’absence de loisirs. C’est aussi un acte d’accusation contre les potentats locaux, relais dociles des directives du F.M.I. et de la Banque mondiale, valets des grandes puissances et des multinationales, complices du pillage de leur pays.

Gianni Panini

Samedi 21 août à Paris : manifestation nationale des sans-papiers

Après la mort de deux adolescents guinéens dans un avion de la Sabena et le suicide d’un sans-papier polonais à Toulouse, la répression continue et s’accentue contre les sans-papiers. A Toulouse une grève de la faim est en cours et partout des comités de sans-papiers, malgré la répression et le silence de la presse, continuent la lutte pour la régularisation de tous les sans-papiers.

Trois ans après les coups de hache de la gendarmerie sur l’église Saint Bernard, montrons notre solidarité en participant à la manifestation à Paris, samedi prochain 21 août à 15 heures, de Couronnes à Saint Bernard.