Sécu : cadeaux pour les uns, restrictions pour les autres
Le gouvernement lavait promis, il tient ses promesses. Trois arrêtés sont sortis le 11 août confirmant les cadeaux supplémentaires aux médecins, pharmaciens et kinésithérapeutes dans le cadre de la mise en place de la carte Vitale.
Tous ces professionnels de la Santé qui utiliseront le télétraitement avec les caisses de Sécu seront récompensés. Les médecins toucheront 1 F par feuille de soins traitée avec un plafond de 3 750 F pour 1999, ramené à 3 000 F à partir du premier janvier 2000, il en sera de même pour les spécialistes. Les pharmaciens auront, eux, 30 centimes par feuille de soins transmise. Quant aux kinés, ils auront droit à une aide forfaitaire de 1 000 F en 1999 et de 1 800 F dans les années suivantes à condition de télétransmettre une certaine proportion de feuilles de soins (au moins 20 en 1999, ce nest pas trop demander !).
Tout cela sajoute aux primes à linformatisation de 9 000 F déjà perçues par au moins 54 % des médecins libéraux.
Avec ces cadeaux, la CNAM pense économiser un milliard de francs déconomies par an. Pas difficile de trouver doù viendront ces économies : des suppressions de postes que la Sécu espère réaliser avec ce système.
Ne sarrêtant pas en chemin pour faire des économies sur le dos des employés et des assurés sociaux, un autre décret est en préparation. Il a pour but délargir le nombre de médicaments remboursés à 35 % au lieu de 70 en moyenne ainsi que de retirer de la liste des remboursables dautres qui ne seraient pas efficaces. Bien évidemment, cela nempêchera pas les laboratoires pharmaceutiques de continuer à les produire et les médecins pas trop regardants sur le porte-monnaie des assurés, à les prescrire.
Gilles Luca
LEtat français organise des rafles contre les réfugiés sans-papiers
Le 17 août, la préfecture du Pas de Calais a lancé une rafle contre les réfugiés sans-papiers. 210 personnes ont été arrêtées, au moins 18 arrêtés dexpulsions ont été pris dans les deux jours qui ont suivi, et plusieurs dizaines dhommes ont été internés en camp de rétention pudiquement rebaptisé " centre dhébergement ". Le sous-préfet de Calais justifie cette opération : " Calais est devenu le goulot de lEurope vers lAngleterre historiquement perçue comme un eldorado pour les réfugiés ". Ils sont en effet des centaines de réfugiés des républiques dex-Yougoslavie, de Turquie, dIrak, dAlbanie ou d'Afghanistan qui, cherchant à atteindre lAngleterre, ont échoué à Calais, comme une famille kurde qui a payé 4 000 dollars à un passeur qui les a abandonnés sur le parking des ferries en prétendant quils étaient en Angleterre. Depuis cet hiver, ils se sont entassés successivement à la gare maritime, puis dans un hangar, chaque fois chassés par la police, traqués dun endroit à lautre car beaucoup dentre eux, réfugiés de pays en guerre, sont certes considérés comme inexpulsables, mais toujours indésirables pour les autorités européennes qui sefforcent de les convaincre quil ny a pas de place pour eux. Depuis le mois de juin, environ deux cents réfugiés occupaient un jardin public de Calais afin de sortir de lombre et doù ils tentaient dorganiser leur passage en Angleterre, véritables proies pour des arnaqueurs en tous genres qui leur extorquent 4 000 F par personne pour traverser la Manche dans la remorque dun camion ou le coffre dune voiture. Les autorités publiques avaient abandonné aux organisations humanitaires la charge de subvenir aux besoins les plus élémentaires de ces réfugiés qui se sont retrouvés exposés début août aux violents orages qui se sont abattus sur la région. Mais à la mi-août, à Douvres, des jeunes Anglais sen sont pris aux réfugiés, déclenchant une campagne de presse démagogique contre la France accusée dêtre une " passoire " et de se servir de la Grande-Bretagne " comme dune poubelle ". Cest ce qui a servi de justification à la préfecture pour démanteler le camp du jardin public qualifié par la presse locale de " petit bidonville ", et interner les réfugiés. Femmes et enfants ont été cantonnés dans un hôpital désaffecté, tandis que les hommes sont parqués dans un " centre dhéberge-ment ", à 10 km de Calais, dans des baraquements entourés de barbelés et gardés par des CRS. Nombreux sont les réfugiés qui ne veulent pas se laisser enfermer, ils ne peuvent alors compter que sur la solidarité de la population. Mais la préfecture tente aussi dempêcher cette solidarité. Un ouvrier raconte " Jai reçu un coup de fil. On ma expliqué que je risquais trois mois de prison si je continuais à aider ceux qui ne veulent pas aller dans les centres ". Cest la guerre contre les pauvres.
Isabelle Cazeaux
Solidarité avec José Bové, militant de la Confédération paysanne emprisonné !
Mardi 24 août, sest tenue, à Bordeaux, une réunion unitaire contre la répression qui frappe des militants de la Confédération paysanne. Cest pour avoir manifesté à 300 devant un Mac-Do en construction dans lAveyron contre leffondrement des prix de leur production, et avoir, sans aucune violence, transporté des matériaux devant la Préfecture que 5 militants ont été arrêtés, traités comme des gangsters, menottes aux poignets, et placés en garde à vue. Si 4 dentre eux ont été relâchés, José Bové, militant syndical connu de longue date, reste aujourdhui en prison, sur plainte de la société McDonalds (qui déclare 875 000 francs de dégâts, alors quil y en a eu, au plus, 75 000 francs) et, pour alourdir le dossier, la justice vient de ressortir contre lui une plainte datant doctobre 98. Un militant de cette organisation comparait cette attitude avec la mansuétude de la police et de la justice lors de certaines actions récentes de gros agriculteurs comme le saccage des bureaux du ministère de lEnvironnement.
Ce que dénonce la Confédération paysanne, cest le vol commis par les grosses sociétés de distribution contre les petits producteurs de fruits et légumes. Et le choix de sattaquer à McDonalds ne relève pas dun anti- américanisme primaire mais désigne la mondialisation, le libéralisme sauvage qui, partout dans le monde, au Brésil, en Afrique tout comme en France, pousse la petite paysannerie vers la pauvreté et la misère cependant quils imposent aux consommateurs, à toute la population, des produits hors de prix, de mauvaise qualité ou transgéniques. Dailleurs, comme le disait ce camarade, ce sont bien souvent des sociétés françaises ou européennes qui sont visées, comme récemment une société de semences transgéniques à Nérac.
Par leurs interventions, les paysans en colère visent un double but : faire connaître la dégradation de leur situation, mais aussi, en offrant des produits agricoles à bas prix, faire comprendre à tous que nous pourrions avoir une nourriture de qualité à des prix accessibles.
Ce camarade dénonçait ce gouvernement, qui se dit de gauche, mais est vendu à la mondialisation avec un digne représentant tel que Strauss-Kahn et, interpellant le camarade du PC présent, sétonnait que son parti reste encore au gouvernement.
Au sujet du double étiquetage, la Confédération paysanne considère que tout ce qui peut permettre aux consommateurs de voir la différence entre les prix à la production et ceux à la consommation est souhaitable mais cela ne changera rien pour les petits producteurs, car ce sont les chaînes de distribution avec les gros producteurs qui font la loi. Car ce quil faudrait imposer, cest une maîtrise de la production, en qualité et en volume, cest-à-dire faire entrave à la fameuse libre entreprise, et ça, pour les gros il nen est pas question. Car ils sont engagés dans des contrats avec les sociétés de distribution et ils doivent produire toujours plus, toujours plus, quimporte la qualité. Et de citer le cas dun gros producteur de la Gironde qui veut passer sa production de 400 à 1 130 porcs, alors que le sol à lendroit de ses installations est réputé hyper filtrant aux lisiers.
" Et ce sont ceux-là qui demandent sans cesse la manne de largent public ! "
A lissue de cette réunion, il a été décidé, par toutes les organisations présentes, dappeler samedi prochain, 28 août, à un rassemblement, place de la Victoire à Bordeaux, pour exiger la libération de José Bové. Au cours de ce rassemblement, entre 11 heures et 15 heures, nous pourrons déguster quelques produits du terroir " non mac donaldisés ".
Contre le mensonge dune surproduction de produits agricoles, contre lenrichissement de lindustrie agro-alimentaire et des réseaux de distribution sur leur dos et sur celui des consommateurs, les agriculteurs en lutte
Ce mercredi matin, vers 4 heures, une vingtaine d'agriculteurs du Vaucluse ont déversé trois tonnes de melons, pommes et pommes de terre devant l'Hôtel des impôts de Cavaillon. Ils ont continué par un supermarché Leclerc où ils ont enflammé les caddies avec des pneus. Enfin, ils ont bombardé la façade du McDonald's du coin avec des pommes et des tomates.
Les cibles sont claires : lEtat, la grande distribution et un symbole, celui des Etats-Unis, qui vient daugmenter les taxes douanières sur les produits agricoles européens.
Depuis quelques jours, les actions des agriculteurs se multiplient. Et cette semaine, les producteurs de fruits et légumes doivent être rejoints par les producteurs de lait qui ont annoncé une semaine dactions. Tous protestent contre la baisse des cours de leurs produits qui les met dans des situations de plus en plus difficiles. Ces baisses, bien sûr, les consommateurs des villes ne les retrouvent pas sur les étalages, et pour cause.
Elles sont imposées par les industriels de lagro-alimentaire, et par les réseaux de distribution, centrales dachat et supermarchés. Eux continuent à pratiquer des prix largement au-dessus des coûts de production et à imposer la baisse des prix dachat aux agriculteurs, en évoquant les difficultés pour écouler la marchandise, une prétendue surproduction de produits agricoles.
Surproduction ? Mensonge cynique de grands commerçants, quand des millions de familles ne peuvent se nourrir convenablement.
Comme lexprime à sa façon un représentant des producteurs de légumes : " Nous contestons lidée dune crise de surproduction. Il sagit dune crise de murs commerciales ", une sous-consommation, plutôt, conséquence directe de lappauvrissement des classes populaires. Elle se répercute sur les producteurs et les consommateurs par lintermédiaire des groupes capitalistes qui, pour augmenter leurs profits alors que les ventes ne progressent pas assez, accroissent leurs marges en baissant le prix à lachat et en laugmentant à la vente.
Face à la colère des agriculteurs, le pouvoir joue de la carotte et du bâton.
Dun côté, lEtat a emprisonné José Bové, un militant de la Confédération paysanne de lAveyron qui doit comparaître devant la chambre daccusation le 31 août, pour avoir participé au " saccage " dun chantier de McDonalds. Et le ministre de lAgriculture, Glavany déclare que " la colère ne justifie pas les violences ".
Mais dans le même temps, Glavany reçoit les responsables syndicaux et dit comprendre " la colère des agriculteurs contre les mesures américaines de rétorsion commerciale ( ) qui sont du chantage ".
Ce nest pas du côté de lEtat, entièrement au service des grands groupes financiers, que les producteurs agricoles trouveront des alliés, ni du côté des démagogues qui tentent de se concilier les agriculteurs en les flattant sur le terrain du protectionnisme et du chauvinisme, ou par des mesures qui ne règlent rien, comme le double étiquetage de neuf fruits et légumes.
Ce nest pas non plus du côté des patrons de lindustrie et de la distribution, comme lespèrent les responsables syndicaux les plus " responsables " qui souhaiteraient les convaincre de " limiter la concurrence entre eux en période de crise ", car " en baissant les prix (aux producteurs), ils naugmenteront pas pour autant la consommation de lait ". Parce quil ny a pas dentente possible entre ceux qui vivent de leur propre travail, et ceux qui senrichissent de lexploitation du travail des autres.
La seule entente possible sera celle des producteurs des campagnes avec les travailleurs des villes, lunion de lensemble du monde du travail qui, en imposant son contrôle, pourrait déterminer les conditions de production, les quantités comme la qualité. Ce sera la seule façon den finir avec les apprentis sorciers de la filière qui mettent en danger la santé des consommateurs en nourrissant les animaux délevages de farines à la dioxine, et autres boues de station dépuration. Ce contrôle assuré par tous, un pas vers lélimination du parasitisme des capitalistes de lagro-alimentaire et de la distribution, sera la seule façon aussi dassurer aux agriculteurs un revenu décent en même temps quaux consommateurs les prix les plus bas possibles.
Franck Coleman