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Irak : La fuite en avant de l’impérialisme dans l’intensification des bombardements !

Depuis 8 mois, les bombardements sont devenus quotidiens en Irak. Officiellement, du côté américain, " les bombardements sont des opérations d’autodéfense, en riposte aux provocations irakiennes, et n’ont pas d’objectifs politiques ", mais derrière ce cynisme c’est une véritable guerre, " guerre intense mais peu médiatisée " comme le souligne la presse américaine, que l’impérialisme mène contre l’Irak. Et, comme toujours, les agresseurs se font passer pour les victimes.

Depuis la guerre du Golfe de 91, les grandes puissances ont imposé à l’Irak, en plus du blocus économique qui l’asphyxie, deux zones d’exclusion aérienne interdite à l’aviation irakienne mais survolées quotidiennement par des avions militaires américains, anglais ou français, soi-disant pour protéger les populations kurdes au nord et chiites au sud. Saddam Hussein a toujours refusé de reconnaître ces zones et c’est ce refus qui est considéré comme une provocation par les grandes puissances.

Depuis décembre dernier, 1 100 missiles ont été tirés et 11 000 sorties aériennes ont été effectuées par l’aviation américaine et anglaise contre plus de 360 cibles irakiennes. Cette guerre mobilise 200 avions de combat, 19 navires de guerre et plus de 20 000 GI’s, son coût est estimé à un milliard de dollars par an. Cela représente le triple des objectifs visés au cours de l’opération " Renard du désert " de décembre 1998 et, en nombre, les deux tiers des missions que les avions de l’Otan ont effectuées en Yougoslavie dans les 78 jours de la guerre du Kosovo. 134 civils irakiens auraient été tués en plus des militaires depuis le début de l’année dans les zones d’exclusion, donc parmi les populations que ce découpage est censé défendre, mais aussi au centre de l’Irak, comme mardi 17 août où les bombardements ont tué 20 personnes dont 12 membres d’une même famille.

Ces bombardements se rajoutent aux destructions de la guerre de 1991 et aux privations liées au blocus économique, avec des conséquences dramatiques pour les populations civiles. Ainsi, une enquête récente de l’UNICEF a révélé que " le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans a plus que doublé en dix ans ", en concluant qu’" il y a urgence humanitaire en Irak ".

" Nous continuerons tant que ce sera nécessaire " a déclaré le secrétaire à la Défense américain. Le but non avoué des grandes puissances serait de déclencher des troubles au sein de l’armée irakienne pour se débarrasser de Saddam Hussein, mais les bombardements ont eu jusque là plutôt l’effet contraire, en permettant à la dictature de resserrer les rangs autour d’elle.

Alors, cette politique de terreur de l’impérialisme est dans l’impasse à tel point que certains politiciens américains ont demandé avec cynisme… l’intensification des frappes et plus seulement contre des cibles militaires, pour hâter la déstabilisation du régime irakien.

C’est bien dans cette folle logique de terreur que l’impérialisme est engagé en Irak, mais avec la crainte qu’une telle intensification ne provoque des explosions de colère en Irak comme dans l’ensemble du monde arabe. Car les populations qui supportent des régimes de dictature soutenus par les grandes puissances savent aussi qu’elles n’ont rien à attendre de l’impérialisme quand il cherche à remettre au pas un dictateur devenu incontrôlable.

Charles Meno

 

Le pillage de l'Afrique

Fodé et Yaguine, les deux jeunes guinéens morts pour avoir voulu entrer clandestinement en Europe avaient écrit une lettre, véritable dénonciation de la politique de l’impérialisme en Afrique. Comme le souligne Madjiguène Cissé, porte-parole des sans-papiers, " s’ils se sont adressés à la Communauté Européenne, ce n’est pas le fait du hasard. Le continent européen est celui qui par le passé a eu le plus de liens avec l’Afrique ". Mais le contenu de ces liens, c’est le pillage systématique. Commencé par la traite des Noirs, la bourgeoisie européenne a accumulé une partie de son capital par la déportation de millions d’Africains réduits en esclavage sur le continent américain et aux Antilles, ce pillage s’est poursuivi au XIXème siècle par la colonisation pour permettre aux bourgeoisies européennes de mettre la main sur des matières premières et créer un marché d’exportation protégé pour leurs marchandises et leurs capitaux. Et aujourd’hui ce pillage continue, enfonçant l’Afrique dans la misère. Ainsi, l’Afrique représente 5 % du commerce extérieur de la France mais ces échanges rapportent 21,5 milliards de francs soit 16 % de l’excédent commercial français. Globalement, l’Afrique est un continent peu à peu laissé à l’abandon. Seuls 5 % des capitaux privés mondiaux sont investis en Afrique, et 96 % d’entre eux sont concentrés sur 5 pays : Angola, Afrique du Sud, Namibie, Ghana et Nigéria. Le résultat c’est par exemple que 40 % des Guinéens survivent avec moins de 6 F par jour, alors que la Guinée est un pays riche en bauxite, fer ou diamant, matières premières qui ne trouvent pas preneur sur le marché mondial, ce pays se retrouve parmi les pays les plus pauvres de la planète.

Face à la débâcle économique, conséquence de la mise en coupe réglée de la planète par les bourgeoisies européennes et américaine, les dirigeants des Etats africains sont réduits à mendier l’aide de ces mêmes bourgeoisies en utilisant les arguments qui leur restent. Ainsi Kofi Anam, qui doit son titre décoratif de secrétaire général impuissant de l’ONU à la démagogie des grandes puissances qui se paient le luxe de nommer un Africain à ce poste, s’est adressé la semaine dernière à ses maîtres pour réclamer une augmentation de l’aide des grandes puissances à l’Afrique. " Une aide appropriée, soigneusement orientée vers ceux qui sont le plus en état de l’utiliser pourrait être largement récompensée " a-t-il expliqué pour tenter de démontrer que l’Afrique pourrait encore rapporter. Et il a aussi fait valoir le chantage à l’émigration africaine vers l’Europe : " beaucoup d’Africains, sans attendre leurs dirigeants agissent par eux-mêmes pour affronter et résoudre leurs problèmes ", que les Etats européens combattent. Enfin, il a tenté de jouer sur la démagogie : " si des personnes comme ces émigrés recevaient le soutien international dont bénéficie le peuple du Kosovo, l’Afrique aurait une véritable chance de marquer le pas " ; visant la division des victimes du pillage et des guerres impérialistes, il fait semblant de croire que les grandes puissances sont en train de reconstruire ce qu’elles ont détruit au Kosovo. Ces déclarations montrent la servilité et l’impuissance des dirigeants africains que dénonçait aussi la lettre de Fodé et Yaguine. Car la politique des grandes puissances est à l’inverse de ce qui leur est demandé par les Kofi Anam. Ainsi l’aide publique française à l’Afrique ne cesse de diminuer, passant de 0,64 à 0,45 % du produit national brut. Alors, la population d’Afrique n’a rien à attendre de ces dirigeants. Comme le dit ce travailleur immigré malien, " chez nous ce n’est pas le travail qui manque mais les moyens de travailler. Sans eau courante, ni électricité, sans système d’irrigation… Sans rien on ne fait pas grand chose ". Seuls les travailleurs peuvent apporter leurs solutions avec la solidarité des travailleurs des pays européens.

I.C.

  

Sans-papiers  trois ans après, la lutte continue

Samedi 21 août, à l’occasion du troisième anniversaire de l’expulsion policière musclée des occupants de l’église Saint-Bernard, près de 1 500 manifestants se sont retrouvés dans les rues de Paris pour exiger à nouveau, dans une manifestation dynamique et combative, la régularisation de tous les sans-papiers.

La situation de ce secteur le plus exploité de la classe ouvrière est un concentré des formes barbares que prend la domination du capital. La plupart des 80 000 régularisés ne disposent que de titres de séjour précaires, d’un an renouvelable. 63 000 travailleuses et travailleurs qui avaient déposé un dossier de régularisation et se sont vus opposer un refus, ont été rejetés dans la clandestinité et le non-droit. Parmi eux, Bogdan Wzedebyl, polonais de 46 ans qui vivait en France depuis 10 ans, et qui s’est suicidé par désespoir le 30 juillet dernier à Toulouse. Le gouvernement continue dans le même temps à expulser et à réprimer, en particulier ceux qui luttent – comme Romain Binazon, membre de la coordination nationale des sans-papiers, toujours emprisonné.

Ce gouvernement qui perpétue la politique de Juppé-Pasqua, c’est bien évidemment celui de Jospin et de la gauche plurielle. Sur ce terrain comme sur tous les autres, il montre en pratique qu’il défend les intérêts des exploiteurs contre ceux du monde du travail.

C’est la raison pour laquelle de nombreuses personnalités " de gauche " qui avaient défendu il y a trois ans la cause des sans-papiers se font maintenant discrètes ou ont carrément disparu. Arlette Laguiller et Alain Krivine, qui étaient samedi dernier les seuls responsables politiques nationaux présents dans la manifestation, l’ont signalé à juste titre. Mais de là à dresser un tableau négatif et assez défaitiste de la situation de la mobilisation comme s'est complu à le faire la presse, il y a un pas qui n’est pas justifié. Au contraire, ce qui est remarquable est le fait que la mobilisation des sans-papiers parvienne à se maintenir contre vents et marées, et demeure à ce point une épine dans le pied du gouvernement et de la bourgeoisie. Comme tous les travailleurs, les sans-papiers peuvent aujourd’hui voir concrètement, dans leur lutte, qui sont leurs vrais soutiens, où est le camp de la " vraie gauche ".

La prochaine échéance nationale de mobilisation sera l’arrivée, prévue pour le 30 septembre à Paris, de la marche partie ce même samedi de Toulouse après la mort de Bogdan Wzedebyl. Plus que jamais, il faut poursuivre et amplifier la solidarité avec les sans-papiers, jusqu’à arracher au gouvernement Jospin " des papiers pour tous ! ".