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Crise financière chronique : la drogue du capital fictif dévore l’économie réelle…

Alors que les bourses comme les monnaies continuent d’hésiter entre la panique et l’euphorie, la crise financière inquiète nos politiciens. Soucieux de garder une confiance bien fragile, ils bluffent, reprenant à leur compte les idées à la mode sur la " claire distinction, selon les propos de Jospin, entre l’économie réelle et les phénomènes financiers qui l’entourent ". Ils voudraient entretenir l’illusion que les pertes des capitalistes en bourse n’auraient pas de conséquences sur la marche de " l’économie réelle ". Vrai mensonge.

L’existence de deux économies qui vivraient deux vies parallèles est une vue de l’imagination ou de la… propagande. Il n’y a qu’une économie, l’économie dirigée de façon totalement irresponsable par la classe capitaliste, en fonction de ses seuls intérêts.

La production de biens réels, des valeurs d’usage, est soumise aux lois des marchés capitalistes qui en font des valeurs d’échange, des marchandises dont la vente permet de réaliser le profit. La production de biens réels est entièrement soumise aux intérêts du capital qui détermine la marche de cette production. L’ensemble est un tout interdépendant.

Le profit naît au cœur de la production, il représente du travail non payé. Quand les capitalistes payent à l’ouvrier un salaire, ils achètent le droit d’utiliser sa force de travail. Cette force de travail a la propriété d’être capable de produire plus de richesses qu’elle n’en coûte. C’est cette différence entre le salaire et la nouvelle richesse produite qui crée la plus-value, le travail non payé, le profit. Seule raison d’être du capital, qui, en mettant en mouvement machines, matières premières et travail humain, se grossit de la plus-value.

L’économie n’est pas soumise à la " tyrannie des marchés ", mais à la tyrannie du profit.

La marche de l’économie exige des masses de capitaux croissantes d’autant que les capitalistes qui sont des gens avides et impatients, n’attendent pas pour encaisser les profits que les marchandises soient vendues. D’où le développement du crédit qui permet d’anticiper la réalisation de ces profits. Ces capitaux créés par le crédit, sous toutes ses formes, c’est ce que Marx appelait le capital fictif quand il n’est pas directement investi dans la production et ne crée pas de richesse nouvelle, de plus-value. Capital fictif qui est cependant un titre de propriété ou un droit sur un revenu bien réel.

Tant que la production se développe comme c’était le cas dans les années cinquante ou soixante, pas trop de problème, mais à partir du moment où la croissance s’est ralentie, a commencé à se poser la question de trouver des sources de profits nouveaux pour les profits réalisés qu’il faut pour l’essentiel réinvestir pour qu’ils accomplissent leur tâche, engendrer de nouveaux profits… Tous les capitaux qui ne peuvent se réinvestir dans la production cherchent des profits dans des opérations financières, le crédit s’enfle avec démesure, les emprunts nouveaux ne sont garantis que par d’autres emprunts… C’est l’économie à crédit, l’endettement généralisé, le gonflement du capital fictif, de la bulle financière, cadre de mille et une spéculations.

Mais en dernier ressort, la machine à faire des profits doit être alimentée par des richesses bien réelles. Il y a pour cela deux voies, l’une renforcer l’exploitation des travailleurs, l’autre drainer vers les grands groupes capitalistes l’argent des classes moyennes ou de tous ceux qui peuvent épargner.

La conjugaison de ces deux politiques, c’est le libéralisme triomphant, une offensive contre la classe ouvrière et les peuples pour dégager plus de profits de la production et attirer l’argent des gogos sur les marchés financiers en leur faisant miroiter des revenus importants.

Aujourd’hui, les bénéfices, qui ont tendance à moins progresser, ne suffisent pas à rémunérer tous les capitaux. Il y a pénurie de profits pour satisfaire les besoins de capitaux dont l’importance et l’impérieuse exigence de prélever leur part de richesse exercent une véritable tyrannie sur la production.

Et l’on se trouve devant ce paradoxe : alors que la planète étouffe sous la masse des capitaux, il y a pénurie d’argent ! Au regard du capital non productif, fictif, il n’y a pas assez de plus-value, pas assez d’argent frais, sa drogue sans laquelle il s’effondre.

A partir du moment où la diminution ou la simple stagnation des bénéfices atteint toute la production mondiale, il n’y a pas d’autre issue que la dépréciation du capital, la dépression, la ruine d’une fraction des financiers les plus faibles avec en conséquence une concentration croissante des richesses.

Ce n’est pas sans conséquence sur la marche de la production. Cette dépréciation, qu’elle prenne la forme d’un krach brutal ou rampant, cela veut dire des revenus en moins, donc de la consommation en moins, cela veut dire des capitaux détruits qui ne pourront plus s’investir, cela veut dire des fermetures d’usines, des licenciements, une détérioration des conditions d’existence des travailleurs et des peuples.

Exproprier le capital financier, placer les banques comme les groupes industriels et financiers, sous le contrôle des travailleurs, pour investir le capital dans la consommation en augmentant les salaires, dans la production pour satisfaire les besoins de toute la société, ce dont le capitalisme n’est plus capable depuis longtemps, est la seule issue.

 

Russie : malgré l’absence d’une direction pour leurs luttes, les travailleurs sont une force incontournable face aux bourgeois maffieux, aux bureaucrates et à leur Etat

Mercredi 7 octobre, avait lieu en Russie une journée de manifestations et de grèves, appelée de longue date par le Parti communiste et les syndicats, pour exiger le versement des arriérés de salaires et de retraites et réclamer la démission de Eltsine.

L’Etat doit plus de 84 milliards de roubles aux salariés de l’industrie, des travaux publics, de l’agriculture, de la Fonction publique et de l’armée. Beaucoup de travailleurs ne sont pas payés depuis 3 ou 6 mois, certains même depuis plus d’un an. Mais leur situation s’est encore aggravée depuis la dévaluation du rouble le 17 août dernier. Les prix ont augmenté de plus de 67 %, et la Banque Centrale Russe a déjà annoncé qu’ils allaient sans doute tripler d’ici la fin de l’année. Du fait de l’interruption de toutes les transactions commerciales, il y a pénurie des produits de consommation les plus courants, dont la nourriture, qui étaient importés à plus de 50 % l’an dernier. Le pain même pourrait manquer cet hiver, car la récolte de blé ne dépassera pas 50 à 60 millions de tonnes, quand la Russie produisait encore en 1992 plus de 106 millions de tonnes. Depuis le début de la crise financière, des centaines de milliers d’employés des banques, magasins, succursales étrangères, ceux dont on disait qu’ils formaient une nouvelle classe moyenne, ont été licenciés, 200 à 300 000 rien qu’à Moscou. La plus grande partie de la population ne survit que grâce à la culture de pommes de terre et autres légumes sur de petits lopins de terre à la campagne ou dans les environs des grandes villes.

Eltsine et son nouveau gouvernement avaient toutes les raisons de redouter cette journée de protestations. Le nouveau premier ministre Primakov a annoncé que les arriérés de salaires seraient payés jusqu’au dernier kopeck, mais sans les indexer sur l’inflation : même si l’Etat - supposition tout à fait improbable - en payait la totalité dans ces conditions, les 84 milliards de roubles dus aux salariés, qui équivalaient à 16 milliards de dollars début août, n’en valent plus aujourd’hui que 6,25 milliards, et le gouvernement n’a pas caché qu’il ferait marcher la planche à billets pour s’acquitter de ses dettes, les remboursant donc en monnaie de singe. Le gouvernement a aussi payé en catastrophe une partie des soldes en retard des militaires, pour calmer la colère, grande aussi dans l’armée, avant la manifestation. Eltsine, qui est resté toute la journée en liaison avec les ministres de l’Intérieur et de la Défense, avait organisé un énorme déploiement policier de plus de 15 000 hommes pour la seule Moscou.

La mobilisation du 7 octobre, a dit la presse, n’a pas été aussi forte que prévue par les organisateurs. Les dirigeants du Parti communiste avaient annoncé, dans un bluff qui fait partie de leurs marchandages avec le pouvoir, 40 millions de grévistes et 10 millions de manifestants, ceux des syndicats avaient annoncé 28 millions de participants à cette journée. Les candidats au pouvoir, comme l’apprenti-dictateur Lebed, et les caciques locaux, ont marché en tête des manifestations dans leur région. Et les travailleurs, qui connaissent aussi bien tous ces ex-bureaucrates convertis aujourd’hui au capitalisme et postulants au pouvoir que les brigands qui y sont actuellement, n’ont, semble-t-il, aucune confiance en eux. Malgré cela, des centaines de milliers de travailleurs ont fait grève, et manifesté dans toutes les régions de Russie, et partout s’est exprimée la haine du régime. Mais cette journée n’est qu’une parmi les innombrables protestations et manifestations qui se multiplient en Russie depuis la mi-août : mineurs et ouvriers qui ont barré les voies du Transsibérien, et séquestré dans certains endroits leurs directeurs, étudiants qui avaient soutenu la réélection de Eltsine en 96 et qui ont manifesté à plusieurs dizaines de milliers il y a quinze jours, enseignants qui, outre leurs propres salaires, exigent la gratuité de l’enseignement et que les enfants mangent à leur faim.

Des mille mobilisations locales, ponctuelles, ou nationales renaîtra le mouvement ouvrier russe, les travailleurs organisant et unifiant leurs forces.

 

Citation : Engels, lettre du 18 décembre 1889 à Gerson Trier

La vie et la croissance de tout parti impliquent le développement en son sein de tendances plus modérées et plus extrêmes qui se combattent, et quiconque exclut purement et simplement la plus extrême ne fait qu’accélérer le développement de celle-ci. Le mouvement ouvrier se fonde sur la critique la plus radicale de la réalité existante. Cette critique est son élément vital : comment pourrait-il, dans ces conditions, s’abstraire lui-même de la critique et chercher à interdire la discussion ? Demandons-nous donc simplement aux autres la liberté de parole à notre profit… pour l’abolir de nouveau dans nos propres rangs ? "

 

Naufrage de Banyoles : 20 morts victimes de la rapacité d'exploitants du tourisme

Jeudi dernier, 20 retraités français en vacances en Espagne sont morts noyés et 44 autres ont été blessés dans le naufrage d'un bateau de tourisme qui effectuait des croisières sur le lac de Banyoles. Le drame s'est déroulé à quelques mètres du bord, le bateau s'étant littéralement coupé en deux au cours d'une manœuvre, projetant à l'eau les passagers restés sur le pont, les autres restant pris au piège à l'intérieur de la cabine.

Ce drame n'a rien d'un " drame absurde " comme l'ont déclaré les radios et la télévision espagnoles, il est le fruit de la rapacité criminelle du propriétaire qui avait entassé à bord 141 personnes alors que la capacité maximum était de 80. Pour transporter davantage de passagers, le bateau avait été modifié, des moteurs plus puissants installés et, pour les ventiler, deux ouvertures latérales avaient été pratiquées au mépris de toute norme de sécurité.

Tout le monde était au courant des conditions dans lesquelles s'effectuaient ces promenades, y compris la municipalité, prévenue du danger, et dont quatre agents étaient affectés à la surveillance du lac. Ne se sentant peut-être pas exempte de toute responsabilité, elle a lancé sa propre enquête sur le drame, s'empressant de rejeter dès le lendemain l'entière responsabilité sur le propriétaire, en dénonçant les transformations apportées au bateau. De son côté, la justice a inculpé le propriétaire, petit notable local possédant hôtel, restaurants, salles de jeu... et le capitaine, qui ont été laissés en liberté sous caution, et qui, pour le moment ne sont pas inquiétés. Mais d’ici à ce qu’elle mette à jour le réseau de complicités de ceux qui ont fermé les yeux, il y a loin !

 

Sans papiers de Bordeaux : un premier recul de la préfecture

Au 36ème jour de leur grève de la faim, les 20 grévistes de Saint-Paul sont toujours aussi déterminés et solidaires. Lors de l’entrevue à la Préfecture de jeudi dernier, à l’issue de la manifestation, les représentants du Préfet ont proposé la régularisation ferme de 4 grévistes et se sont engagés à en régulariser 6 autres en janvier avec permis de séjour provisoire en attendant.

La Préfecture est donc contrainte à un premier recul, et ce qui était déclaré impossible il y a quelques jours est soudain devenu possible. Mais 10 régularisations, ça ne fait pas le compte. Et nos camarades ont refusé même de connaître les noms des régularisables : " on a commencé à 20, on ira jusqu’au bout à 20 ! "

Le Front National ayant publié dans le journal " Sud-Ouest " un article crapuleux demandant l’expulsion immédiate des grévistes, une délégation du Comité de Soutien s’est rendue sur place au journal pour exiger un droit de réponse. Il a été décidé de faire appel par tract à la solidarité de la jeunesse lycéenne en lutte.

Les manifestations de soutien continuent :

jeudi 15 octobre A 18 h, devant la préfecture.

samedi 17 octobre à 15 h à la Victoire.

et, vendredi 23 octobre A 20 h, meeting de soutien à l’Athénée Saint-Christoly avec Madjiguene Cisse.