éditorial



Le talon de fer des états riches sur la nuque des peuples qu’ils ont réduits à la misère

Samedi dernier, la plus grande puissance du monde, les Etats-Unis, avait mis en mouvement de formidables moyens matériels avec l’assentiment d’autres Etats riches tels que la France et la Grande-Bretagne. Les Etats-Unis avaient commencé à envoyer des navires et une escadrille vers un pays où la population commence à manquer de tout et où les enfants meurent de malnutrition et de diverses maladies, faute de traitements et de médicaments.

S’agissait-il, enfin, après des jours et des jours d’attente passive et véritablement criminelle de leur part, d’une vaste opération humanitaire pour venir en aide aux peuples du Honduras ou du Nicaragua ? Non. Le but était d’écraser la population irakienne sous un tapis de bombes. Les navires et les hélicoptères qui font cruellement défaut pour apporter une aide efficace aux peuples d’Amérique centrale se trouvaient en surabondance et en état d’alerte dans la région du Golfe persique.

Le massacre en Irak a finalement été reporté à plus tard. Les bombardiers B-52 sont rentrés au bercail avec leurs missiles de croisière. Les politiciens et les gradés américains, tous les " va-t-en-guerre " (avec la peau des autres) sont déçus. Et peut-être bien Clinton le premier. Il se serait bien offert la stature d’un homme d’Etat à poigne, entrant par la grande porte dans les annales de l’histoire en provoquant un nouveau bain de sang en Irak. Spécialiste des petites aventures personnelles les plus grotesques, il n’a pas su mener à terme, pour l’instant, la grande aventure militaire qui l’aurait pleinement racheté aux yeux de l’opinion réactionnaire.

C’est partie remise. Au-delà des airs de Matamore de Clinton et des subtilités diplomatiques qui le dépassent, les Etats-Unis ne lâcheront pas leur proie irakienne si facilement. Ce n’est pas Saddam Hussein qu’ils veulent abattre, c’est son attitude de défi face à leur prétention à la toute-puissance. Ce dictateur leur a toujours servi et il leur sert encore à maintenir un ordre impitoyable sur les peuples de la région aspirant à leur indépendance, à la démocratie et à une vie plus digne. Mais près de huit ans après la guerre du Golfe, les grandes puissances ne lui pardonnent toujours pas d’avoir secoué leur joug en refusant l’étouffement de l’économie irakienne par le Koweit à leur solde. Ils n’admettent pas qu’il refuse de se mettre totalement à genoux devant eux.

Pour parvenir à leurs fins, les grandes puissances sanctionnent depuis près de huit ans la population irakienne en la privant de pièces détachées, de nourriture et de médicaments. A leur gré, elles desserrent ou resserrent l’étau que constitue l’embargo commercial contre l’Irak ; en n’oubliant pas au passage de s’emparer de ses richesses pétrolières.

A l’autre bout du monde, en Amérique centrale, leur comportement est tout aussi odieux. Le Honduras et le Nicaragua n’ont pas été ravagés uniquement par un cyclone mais aussi par la surexploitation de leurs ouvriers et de leurs paysans, par un pillage en règle de leurs ressources agricoles au profit des banques et des grandes compagnies occidentales. Ces dernières n’ont été généreuses que pour payer grassement les dictatures militaires préservant leurs intérêts sur place pendant des décennies.

A cela vient s’ajouter le mépris des grandes puissances à l’égard des peuples dans la détresse. Leur refusant une aide efficace, elles leur envoient Hillary Clinton pour jouer les dames patronnesses le temps d’être filmée par les chaînes télévisées. Elles leur envoient Chirac qui, derrière ses phrases humanitaires ronflantes et purement hypocrites, flanqué des ministres des Transports, de la Coopération et de quelques patrons, renifle en bon VRP quelles bonnes affaires il pourrait conclure. La promesse de supprimer la dette de ces pays à l’égard de la France n’a pas d’autre but que de permettre aux patrons français de décrocher des contrats aux dépens de leurs concurrents.

Pour les mêmes raisons, Jospin, tout en s’alignant sur Clinton face à l’Irak, use d’un langage plus modéré pour permettre aux patrons français de tirer leur épingle du jeu en accédant directement ou indirectement à la manne pétrolière irakienne.

Tels sont les " humanistes ", les " démocrates ", les " défenseurs du droit " qui dirigent les Etats les plus puissants du monde : de plats serviteurs des banques et des trusts, prêts à déclencher n’importe quelle guerre qui pourrait consolider les intérêts financiers et politiques de leurs maîtres.

Bien des peuples vont se lever contre un ordre économique et social aussi absurde qu’intolérable. Des travailleurs et des jeunes dans tous les pays vont découvrir les idées révolutionnaires, socialistes et communistes. Ils trouveront ainsi les moyens de briser tous les pouvoirs, toutes les chaînes du profit qui emprisonnent l’humanité. Ils construiront un monde nouveau, sans pauvreté, sans guerre, sans exploitation.

 

Les travailleurs de la Seita refusent d'être les victimes de la course aux profits et de la concurrence

La semaine dernière, la direction de la Seita a annoncé la fermeture de ses deux usines de cigares à Morlaix et de tabac brun à Tonneins. Au total, 564 postes seront supprimés, c'est-à-dire 10 % des effectifs. La direction envisage aussi de fermer une usine d'allumettes dans l'Oise, et une plate-forme de distribution à Nantes.

Elle prend prétexte de la baisse de ses ventes de tabac brun et de cigares pour restructurer, sous prétexte d'une trop faible compétitivité et son objectif serait de " retrouver un niveau de rentabilité satisfaisant ", en augmentant de 50 % son " résultat d'exploitation " d'ici l'an 2001. Pour cela, elle n'hésite pas à fermer des usines et à jeter à la rue des centaines de travailleurs, au nom de la concurrence. La Seita affiche des bénéfices en hausse, - 19,5 % pour le premier semestre de cette année - et elle avait réalisé 827 millions de bénéfices en 1997.

Pour les travailleurs de Morlaix et de Tonneins, le plan social de la direction se traduira par des départs à la retraite, des préretraites, des reconversions, des mutations et... des licenciements pour ceux qui n'accepteront pas d'être mutés à l'autre bout de la France. A Morlaix, 87 reclassements sur 184 salariés, en majorité des femmes dont les maris ont un emploi sur place, sont prévus sur Strasbourg où la production sera transférée... Quant à retrouver du travail dans la région, récemment touchée par la restructuration de Thomson, l'autre gros employeur, et qui atteint 12 % de chômage, personne n'y croit. 4 000 travailleurs ont envahi les rues de Morlaix, mardi, pour dire leur refus d'une politique qui sacrifie les hommes au profit, ouvriers d'autres branches, retraités, lycéens et enseignants venus apporter leur soutien et leur solidarité aux ouvriers de la Seita.

A Tonneins, ils étaient 1 500 dans les rues de la ville déclarée " ville morte ". Parmi eux, certains, mutés à Tonneins après la fermeture de Chateauroux, l'an dernier, menacés de nouvelles mutations, refusent qu'on les traite " comme des chiens ".

Mardi, les 30 usines du groupe étaient en grève, solidaires de leurs camarades touchés par les restructurations, et refusant que des travailleurs soient jetés à la rue : " Nous ne pouvons pas accepter que 600 personnes soient sacrifiées pour satisfaire l'appétit de quelques actionnaires " expliquaient des syndicalistes de l'usine de Nantes, en grève totale depuis près d'une semaine.

Devant le mouvement de grève et la détermination des travailleurs qui ont obligé les élus locaux à afficher leur solidarité, Strauss-Kahn a déclaré qu'il " souhaitait que les dirigeants de la Seita trouvent d'autres solutions " que les fermetures et a assuré que l'Etat allait faire en sorte que " de nouvelles propositions soient faites ". Les travailleurs de la Seita n'ont rien à attendre de ces vagues promesses, arrachées sous la pression de leur riposte, et ils ne pourront compter que sur eux-mêmes.

 

Tous dans la rue samedi en solidarité avec les sans-papiers

Depuis le début de la semaine, le gouvernement a fait intervenir à plusieurs reprises les CRS et les pompiers pour essayer de faire cesser le mouvement et les grèves de la faim des sans-papiers, tout en répétant qu’il est hors de question de " céder à la pression " et en multipliant les déclarations réactionnaires.

Vendredi dernier, les CRS ont évacué par la force les sans-papiers en grève de la faim depuis 74 jours à Limeil-Brévannes. Devant leur détermination et les réactions de protestation, craignant les conséquences de la mort de l’un d’eux, il leur a " accordé " des autorisations provisoires de séjour (APS) " pour la période nécessaire à leur rétablissement ".

Mardi, à Bordeaux, les forces de police ont encerclé le quartier où se trouvaient les travailleurs immigrés en grève depuis 69 jours. Une centaine de membres du comité de soutien, alertés, ont aussitôt rejoint les sans-papiers, tandis que la Préfecture promettait une APS en échange de leur hospitalisation. Les grévistes ont finalement accepté et sont sortis, pour certains le poing levé, conduits par les pompiers dans les différents hôpitaux de la ville. Là, ils ont reçu un courrier de la Préfecture leur précisant qu’ils ne seraient en aucune façon régularisés.

Et à Orléans, le maire socialiste a pris un arrêt d’insalubrité demandant l’évacuation des sans-papiers qui occupent la cathédrale depuis le 26 juillet et où certains sont en grève de la faim depuis 25 jours.

Depuis le début de la semaine, le gouvernement répète que la régularisation serait un " encouragement, un formidable appel d’air pour l’immigration clandestine ". Jospin a martelé qu’on " ne peut pas accueillir tout le monde " et a qualifié d’irresponsables ceux qui soutiennent le combat des sans-papiers, les accusant de " jouer avec la peau des autres par procuration ", se faisant applaudir par la droite à l’Assemblée. Pour plaire à la fraction la plus réactionnaire, Jospin joue avec la vie des sans-papiers, rivalisant de morgue et d’hypocrisie avec ses prédécesseurs, de Juppé à Rocard.

Voynet avait cru, le week-end dernier, pouvoir " demander " la régularisation des sans- papiers. Mais sa demande polie a provoqué l’irritation de Jospin. Et Sarre, un ami de Chevènement, a trouvé son attitude " inouïe ", mettant " en péril l’autorité du gouvernement ", rappelant qu’un " ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne ". Voynet a vite fait savoir qu’il n’en était pas question. Quant à Cohn-Bendit, en campagne pour les européennes, il a invité Jospin à " méditer sur la grandeur d’un homme politique " " au nom de la gauche à laquelle nous rêvons "... rêvant de sa carrière de politicien.

Robert Hue, lui, a tenu à montrer qu’il est responsable. Pour lui, la question n’est pas " la régularisation de tous les sans-papiers ", il ne faut pas être " jusqu’au-boutiste ", " il ne faut faire preuve d’aucun entêtement d’un côté ni de toute surenchère de l’autre "...

Dans leur lutte contre le gouvernement pour obtenir les droits minimums et pouvoir vivre dignement, les sans-papiers ne peuvent compter que sur eux-mêmes et sur le soutien des travailleurs et de la population. Leur lutte est la nôtre. Soyons nombreux aux manifestations qui sont organisées samedi 21 dans toute la France pour la régularisation de tous les sans-papiers.