page 6



Baisse des prix et inflation zéro, annonces d’un recul de toute l’économie

Depuis quelques temps, les prix des carburants sont en baisse. En un an, le litre de super 95 et le fioul de chauffage sont moins chers de 35 centimes en moyenne, le gazole de 21 centimes, même si on est loin de retrouver à la pompe l’équivalent de la chute du baril (159 l) de pétrole brut qui oscille maintenant entre 9 et 10 $, quand il y a deux ans il était à plus de 25 $ le baril. Le pétrole est aujourd’hui moins cher qu’en 1973, avant le choc pétrolier.

Et c’est la même chose pour l’ensemble des matières premières, l’aluminium ou les produits agricoles comme le coton, le blé, la viande… presque tout est en baisse. Du côté des produits industriels, cela commence aussi. La tonne d’acier est tombée en trois ans de 520 à 220 $, et la tonne de polypropylène (un plastique très courant) de 800 à 500 $ en un an.

C’est un phénomène général qui se traduit par les taux d’inflation les plus bas. En France, c’est presque l’inflation zéro, du jamais vu depuis 40 ans. Les prix de la zone des pays de l’euro et des Etats-Unis augmentent d’à peine 1 à 1,5 %, quant au Japon, c’est la déflation qui a commencé.

La stagnation et la baisse des prix sont le résultat direct du jeu de l’offre et de la demande. La crise financière qui a touché l’Asie a entraîné un appauvrissement de ces pays et un effondrement de leurs achats, alors que la production mondiale des matières premières et des produits industriels, elle, continue sa progression. D’où une surproduction… par rapport aux possibilités de consommation du marché.

C’est une spirale sans fin qui commence, l’amorce de la déflation, dans laquelle les méventes entraînent la chute des prix et la chute de l’activité industrielle, les licenciements, l’accroissement de la misère, qui aggravent encore plus la contradiction entre l’offre et la demande.

Les Bourses de leur côté continuent leur progression chaotique. Celle de Paris, par exemple, malgré la chute de la fin de l’été, devrait finir l’année en hausse de 32 %, après les + 28 % de 1997. Toujours plus nombreux, les capitaux investis en Bourse se mènent une guerre économique de plus en plus âpre pour s’approprier les profits des entreprises qui, eux, ont de plus en plus de difficultés à progresser.

Du côté des trusts pétroliers par exemple, les bénéfices ont baissé en moyenne de 34 % au troisième trimestre de 1998 (Exxon -23 %, Mobil -45 %, Texaco -56 %, Arco -80 % etc.). Aucune de ces compagnies n’est bien sûr déficitaire, mais leur problème est de réaliser un certain taux de bénéfice, sous peine de voir les actionnaires se détourner pour chercher des entreprises plus profitables. Alors, pour les satisfaire, les trusts fusionnent à tout va (BP et Amoco, Exxon et Mobil, Total et Pétrofina) pour faire des économies sur les coûts de recherche et d’investissement, sur les secteurs administratifs, les réseaux de distribution et les raffineries en supprimant tout ce qui apparaît faire " double emploi ". Exxon-Mobil, le nouveau 1er trust mondial du pétrole, avec un chiffre d’affaires de 1100 milliards de francs, une capitalisation boursière de 1400 milliards (autant que le budget de l’Etat français), parle de supprimer entre 9000 à 20 000 emplois sur 122 000 salariés !

La course aux profits des capitaux financiers entre de plus en plus nettement en contradiction avec les limites du marché, et donc la possibilité de distribuer des dividendes aux actionnaires. C’est l’annonce des " réajustements " comme disent les économistes, c’est-à-dire des krachs, des déplacements brutaux, des effondrements, du même type que celui qui avait touché toutes les Bourses du monde l’été dernier.

Cela se traduit par un redoublement des attaques contre les travailleurs. C’est la seule façon pour les entreprises capitalistes de continuer à maintenir ou augmenter leurs profits face à un marché qui stagne.

Strauss-Kahn fanfaronne sur la baisse des prix actuelle qui serait profitable à la relance de l’économie, il bluffe. La prochaine étape sera une attaque généralisée contre les salaires, qui entraînera un recul de l’ensemble de l’économie mondiale. La déflation qui s’amorce ne peut être que les prémices de la récession. Et du côté des capitalistes, Mégret et les siens ne cachent pas qu’ils se préparent à cette situation, en ébauchant les forces politiques qui postuleront pour mater la classe ouvrière et assurer l’ordre.

 

La visite de Clinton en Palestine : une démonstration supplémentaire que les Palestiniens ne peuvent compter que sur leur révolte

La visite de Clinton, en famille, sur le territoire palestinien a été l’occasion d’un déferlement médiatique pour tenter d’accréditer l’image du représentant de la plus riche puissance du monde apportant une paix prochaine.

La duplicité n’a pu que se révéler à travers cette représentation des familles Clinton et Arafat écoutant pieusement une messe à Bethléem, qui, peut-être, pourra servir à redorer le blason de Clinton dans ses démêlés avec la justice américaine. Mais si le dirigeant des Etats-Unis est apparu pour ce qu’il est, une marionnette n’ayant aucune prise sur la situation et affichant son mépris pour la population palestinienne, Arafat a publiquement apporté la démonstration qu’il ne comptait que sur la reconnaissance des grands de ce monde. Sans sa participation active, la comédie de Clinton, premier président américain à débarquer en Palestine pour apporter la paix, n’aurait pu se dérouler. Le concert de déclarations de louanges a été réciproque de part et d’autre. Clinton a déclaré : " pour la première fois, dans l’histoire du mouvement palestinien, le peuple palestinien et ses représentants élus ont désormais l’occasion de déterminer leur propre destinée sur leur propre terre ", et Arafat parlant " des gens dans la rue, attendant pour apercevoir le président et lui montrer leur amour et leur approbation ". Pour le représentant de l’impérialisme, il s’agit de faire croire que la paix peut être octroyée d’en haut alors que c’est la révolte, depuis 11 ans, de la population pauvre palestinienne qui a contraint le gouvernement israélien et les Etats-Unis à quelques concessions. Arafat est solidaire de Clinton pour tenter de s’imposer comme le seul représentant d’un Etat palestinien, s’il venait à voir le jour, au moment où la grève de la faim des prisonniers politiques et le soutien qu’elle rencontre dans la population, révèlent que le sort de la population n’a pas changé.

Le voyage sous haute protection de Clinton était balisé par un policier palestinien tous les 5 mètres. C’est que le jour même de la venue de Clinton, samedi dernier, en Cisjordanie, à Kalkilva, des milliers de personnes ont enterré un jeune Palestinien de 18 ans, tué par l’armée israélienne et la grève était générale dans la ville où les magasins avaient baissé leur rideau en solidarité. La veille, un autre jeune, lui aussi âgé de 18 ans, avait été tué lors d’affrontements pour exiger la libération des prisonniers politiques et plus de 200 manifestants avaient été blessés. A Jéricho, des étudiants s’en sont pris à un casino récemment ouvert, en accusant l’Autorité palestinienne d’être impuissante à faire libérer les prisonniers.

Arafat a respecté, et c’est bien le seul, au pied de la lettre les accords de Wye Plantation. Il s’est même prêté à la comédie, en présence de Clinton, de faire voter à mains levées, conditions imposées par Nétanyahou, par le Conseil national palestinien le renoncement à la clause de la Charte palestinienne sur la destruction d’Israël. Décision qui avait déjà été prise en 1996. Par contre, Nétanyahou a réaffirmé qu’il ne ferait aucune concession : pas question de libérer les prisonniers politiques ni de retirer l’armée de Cisjordanie. Le Premier ministre israélien est d’autant plus intransigeant qu’il a besoin de l’extrême-droite pour avoir une majorité parlementaire et que celle-ci menace de la faire chuter s’il fait la moindre concession.

Dans ses conditions, le sommet entre Clinton, Arafat, et Nétanyahou ne pouvait se solder que par une mascarade accouchant d’une souris : des commissions mixtes vont être mises en place, permettant de continuer à discourir sur la paix…

 

Algérie : les politiciens manœuvrent tandis que la population s’enfonce dans la misère

Lundi, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a démissionné après avoir présenté de façon provocante le bilan de ses trois années de pouvoir devant l’Assemblée algérienne. " Je suis fier d’avoir fait le sale boulot " a-t-il déclaré, revendiquant les mesures de fermetures d’entreprises et les licenciements de centaines de milliers de salariés dont il avait pris la responsabilité pendant ses trois ans à la tête du gouvernement.

La démission d’Ouyahia, remplacé par Hamdani, un homme du sérail, ancien secrétaire général de Boumédiène avant d’être nommé ambassadeur en France, libère les appétits politiciens à commencer par le sien… Les partis d’opposition avaient fait de sa démission une condition pour leur participation aux élections présidentielles d’avril 1999, que Zéroual a fait avancer d’un an et demi. En effet, Ouyahia n’est pas seulement l’homme des licenciements et de l’application du plan du FMI de 94, il est aussi l’homme des truquages éhontés au profit du parti gouvernemental aux élections législatives et municipales. Sa démission est à la fois une concession aux partis d’opposition, un résultat du règlement de comptes des clans au pouvoir et une façon de se placer sur la ligne de départ pour les présidentielles.

Vieux politiciens et candidats des partis en place se mettent donc sur les rangs pour ces élections au moment où la population connaît des conditions de vie dramatiques. Des milliers de travailleurs algériens sont réduits à la misère par le chômage ou attendent quelquefois depuis plus d’un an que leurs salaires soient payés. Des milliers d’entre eux que leurs directions, notamment dans les entreprises métallurgiques, avaient contraints à " un départ volontaire " ne touchent même pas les maigres allocations-chômage. Beaucoup de familles ne mangent plus qu’un repas par jour et les soins médicaux sont réduits au strict minimum. Le désespoir et la colère dominent. Une famille de six personnes a échappé grâce à l’intervention d’un voisin à un suicide collectif. Privés de toutes ressources par le licenciement du père, le couple et ses quatre enfants s’étaient enfermés chez eux et ne s’alimentaient pas depuis plusieurs jours. A Guelma, dans une usine de porcelaine, les travailleurs ont fait plus de dix jours de grève pour exiger leurs salaires qui ne sont plus payés depuis le mois d’août.

L’Algérie est saignée à blanc par le remboursement de la dette – le ministre des Finances a déclaré que l’Algérie devrait rembourser 33,5 milliards de dollars entre 1999 et 2005 – et par l’effondrement du prix du pétrole qui ampute d’environ 40 % le budget de l’Etat de l’année 1999. Face à ce pillage dont le gouvernement fait subir les conséquences à la population, les manœuvres politiciennes apparaissent d’autant plus dérisoires et révoltantes.